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Calme dans la tourmente Paris Palais Garnier 04/13/2018 - et 15, 17, 18* avril 2018 Suite de danses Ivan Clustine (chorégraphie), Frédéric Chopin (musique)
Un Ballo
Jirí Kylián (chorégraphie), Maurice Ravel (musique)
Joke Visser (costumes), Joop Caboort (lumières)
Spring and Fall
John Neumeier (chorégraphie, décors, costumes, lumières), Antonín Dvorák (musique)
Ecole de danse de l’Opéra national de Paris
Orchestre de l’Opéra national de Paris, Felix Krieger (direction musicale)
Suite de danses: J. Palayret, A. Gay (© Svetlana Loboff/Opéra national de Paris)
Le spectacle annuel de l’Ecole de danse du Ballet de l’Opéra national de Paris (BOP) a présenté cette année un programme passionnant et des divisions d’élèves prêtes à prendre la succession d’un corps de ballet dans la tourmente.
Un climat très particulier règne en ce printemps au BOP, dû à la divulgation dans la presse écrite d’un rapport de la commission d’expression artistique, qui aurait dû rester confidentiel, concernant un questionnaire auprès de ses salariés, les danseurs, sur leurs conditions de travail au sein de cette entreprise nationale, et dont les conclusions semblent quelque peu péjoratives pour cette dernière. L’Ecole de danse, qui est impliquée aussi dans cette polémique pour l’inadéquation de son enseignement à la réalité du terrain du répertoire dansé par le BOP, vient cependant avec ce spectacle de prouver le contraire en faisant danser quatre soirs avec deux distributions un spectacle en trois parties particulièrement bien équilibré et brillant.
Suite de danses d’Ivan Clustine (1913) rappelle furieusement Les Sylphides de Fokine avec sa musique de Chopin sirupeusement orchestrée par Henri Busser, André Messager et Paul Vidal, ses tutus romantiques, ses pointes et son abstraction formelle. C’est cependant un ballet idéal pour admirer une troupe en bon état de marche, la position des corps, la personnalité des pieds, la justesse des ports de bras. La compagnie y a excellé mais on a été particulièrement séduit par le couple mis en vedette par le Pas de deux formé par Aurélien Gay, à la technique parfaite et à l’expression très extravertie, et Jeanne Palayret, ballerine longiligne infiniment gracieuse et dont on reparlera sans aucun doute bientôt. La fraction de l’orchestre maison présente dans la fosse, pas la meilleure, faisait son possible pour aérer un peu cette suite sans logique de transcriptions de pièces pour piano.
Un Ballo: R. Duval, M. Katoch, E. Cardix, I. Mcintosh (© Svetlana Loboff/Opéra national de Paris)
Un Ballo, courte pièce de Jirí Kylián pour dix danseurs réalisée sur des musiques de Ravel en 1991 pour le Nederlands Dans Theater 2, est un chef-d’œuvre avec ses éclairages (Joop Caboort) ingénieux qui jouent avec la chorégraphie. Magnifique tenue, là aussi, et joie de danser irrésistible.
Spring and Fall (© Svetlana Loboff/Opéra national de Paris)
La dernière partie reprenait Spring and Fall, une pièce néoclassique réglée par John Neumeier en 1991 (Manuel Legris faisait partie de la distribution) à l’occasion du Gala Nijinski et entrée au répertoire du BOP la même année. Le substrat musical en est l’exquise Sérénade pour cordes de Dvorák, que Felix Krieger réussit faire jouer de façon plus discrète par l’orchestre. Comme pour Kylián, on est à un niveau de chorégraphie superlatif (ne sont-ils pas les deux plus grands chorégraphes vivants aujourd’hui?) car on retrouve tout l’art de Neumeier de faire évoluer individualités et groupe d’une façon qui lui est tout à fait singulière dans l’abstraction la plus totale, même si son propos est inspiré par un poème de l’Anglais Gerard Manley Hopkins. Elle donne à toute la troupe vue précédemment l’occasion de former un ensemble parfait.
La directrice de l’Ecole, Elisabeth Platel, qui est venue saluer à l’issue de cette dernière représentation avec son équipe de professeurs, pouvait être fière de la bonne santé de son enseignement.
Olivier Brunel
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