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Ramey et les Autres

Paris
Opéra National de Paris Bastille
09/21/2001 -  24, 27, 29 septembre, 2, 5, 9, 11, 14 octobre 2001
Giuseppe Verdi : Attila
Samuel Ramey (Attila), Maria Guleghina (Odabella), Carlo Guelfi (Ezio), Franco Farina (Foresto), Mihajlo Arsenki (Uldino), Igor Matioukhine (Leone)
Josée Dayan, Jeanne Moreau (mise en scène), Philippe Miesch (décors), Patrice Cauchetier (costumes), Philippe Albaric (lumières)
Orchestres et choeurs de l'Opéra National de Paris, Pincha sSteinberg (direction)

Semaines d'expérimentations tous azimuts sur la première scène nationale : après l'opéra où l'on ne chante pas (La Petite fille aux allumettes, néanmoins fascinant), voici celui (cette fois, barbant sans remède) où l'on ne bouge plus ! Que Mesdames Dayan et Moreau aient éprouvé le besoin de se mettre à deux pour nous offrir cette tranche de Nicolas Joël sous Tranxène qui n'aurait pas fait tâche dans la saison de l'Opéra de Rome voilà cinquante ans a de quoi laisser rêveur. Pas la moindre ébauche d'une caractérisation dramaturgique à l'horizon : dans une scénographie d'une absolue platitude, on guettera en vain un geste sensible, un abandon au souffle du mélo qui irrigue si puissamment Attila ; choristes et chanteurs resteront, même pas de marbre, mais bien de bois. Seuls les très beaux costumes de Patrice Cauchetier et les éclairages soignés de Philippe Albaric viendront accrocher l'œil dans cette morne steppe où le gazon ne semble de toute façon jamais avoir poussé.
Livrés à eux-mêmes, les solistes peinent pour la plupart d'entre eux à imposer leur personnage et n'ont plus qu'à s'en remettre au chant, avec des mérites divers. Farina chante n'importe quoi dans son premier air (ce qu'une bonne partie du public ne lui aura pas pardonné au rideau final), mais montre ensuite cette solidité qu'on lui connaît, à défaut d'une réelle séduction. Solidité est aussi le maître mot de la prestation de Guelfi, très beaux moyens, style correct sans raffinement. Guleghina reste un cas ; les afficionados ont beau haïr la rusticité de ses vocalises, l'incertitude occasionnelle de l'intonation, l'émission parfois malsaine du bas médium, l'impact physique de cette voix gigantesque demeure sidérant. A défaut d'une vraie présence d'actrice, elle semble également acquérir au fil des années un rayonnement physique dont sa tenue de scène était jusqu'alors dépourvue. Ce qui n'empêchera pas de regretter, la comparaison avec le Nabucco anthologique de 1995 s'imposant, qu'une Varady n'ait jamais dans sa longue carrière abordé ce rôle où elle nous eût renversé ; pour la musique d'Odabella, revenez à Studer dans l'enregistrement EMI de Muti, ou mieux encore au Santo di patria illuminé de Sutherland en récital.
Ramey, par bonheur, efface tout. Se riant de la médiocrité de la scène, il souffle pour la première fois Paris par cette incarnation qui restera, avec Mefistofele, l'une des plus abouties de sa carrière. Acteur brûlant (ce qu'il n'est pas toujours), maintien impérial et regard magnétique comme fissurés par une sourde angoisse, il dompte en quelques mesures ce vibrato élargi par le temps pour retrouver la splendeur de timbre et de ligne de ses plus beaux jours. Infinie variété des nuances et des couleurs, ornementation d'un goût sûr animant une rythmique infaillible, exploitation délicate des vertus mélodiques et expressive du mot ; voici bien longtemps que le bel canto n'avait été porté à ce niveau. Triomphe fracassant et mérité.
Quitte à renoncer à un grand chef de théâtre (ce qui est depuis longtemps chose faite à l'Opéra), convenons également que Steinberg contribue mieux qu'un Bertini au plaisir d'entendre ce répertoire par sa tenue plus équilibrée du cadre général, ses tempos très sûrs, son sens bienvenu et jamais démonstratif du détail instrumental. En dépit de certains décalages (finale du premier acte notamment), le chœur est d'une juste somptuosité de timbre. Grâce à un orchestre préparé comme rarement pour une première dont il n'aurait pas vocation à être l'évident héros, on découvre aussi dans Attila des subtilités de couleurs, en particulier lors des préludes, témoignant encore une fois de la richesse d'un ouvrage injustement considéré comme mineur.



Vincent Agrech

 

 

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