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En piste

Liège
Opéra royal de Wallonie
01/26/2018 -  et 27, 28*, 30 janvier, 1er, 2, 3, 4 (Liège), 9 (Charleroi) février 2018
Georges Bizet: Carmen
Nino Surguladze*/Gala El Hadidi (Carmen), Marc Laho*/Florian Laconi (Don José), Silvia Della Benetta (Micaela), Lionel Lhote*/Laurent Kubla (Escamillo), Alexia Saffery (Frasquita), Alexise Yerna (Mercédès), Patrick Delcour (Le Dancaïre), Papuna Tchuradze (Le Remendado), Roger Joakim (Zuniga), Alexandre Tiereliers (Lillas Pastia), Alexei Gorbatchev (Moralès, Andres), Réjane Soldano (Une marchande), Benoît Delvaux (Un bohémien)
Maîtrise et Chœurs de l’Opéra royal de Wallonie, Pierre Iodice (chef des chœurs), Orchestre de l’Opéra royal de Wallonie, Speranza Scappucci*/Pierre Dumoussaud (direction musicale)
Henning Brockhaus (mise en scène), Margherita Palli (décors), Giancarlo Colis (costumes), Valentina Escobar (chorégraphie)


(© Lorraine Wauters/Opéra royal de Wallonie)


Un peu moins de huit ans après la précédente production, l’Opéra royal de Wallonie monte une nouvelle Carmen (1875) : tant mieux pour le novice qui n’a encore jamais vu cet opéra, tant pis pour ceux qui espèrent un élargissement du répertoire dans cette maison conservatrice. Henning Brockhaus situe l’action dans le monde du cirque, propice à la couleur et au divertissement. L’intention semble confuse, à l’instar de la note du metteur en scène : apparemment, il s’agit moins d’une mise en abyme, comme dans Paillasse, où la réalité rejoint la fiction, qu’une simple transposition, de surcroît peu originale. Des éléments suggèrent que les quatre actes forment des numéros de cirque, mais un doute subsiste quant aux personnages, qui paraissent flous. Sont-ils tous des membres de la troupe ? Quelle position Carmen et Don José occupent-ils ? D’une banalité navrante – le brigadier égorge la bohémienne au centre de la piste –, la conclusion conforte notre conviction que l’univers circassien ne constitue ici qu’un prétexte pour éblouir le public.


Parler de ratage serait toutefois injuste et inexact : la scénographie ne manque pas de séduire et la direction d’acteurs, efficiente, suscite peu de réserve. Le spectacle comporte toutefois des idées contestables, comme l’entrée de Carmen sur le dos d’un faux éléphant manipulé par des accessoiristes, un parangon de mauvais goût. Les figurants, en particulier les danseurs et les acrobaties, n’endossent qu’une fonction décorative. Cette mise en scène dépourvue d’audace aurait pu avoir été conçue par le directeur général et artistique. C’est donc bel et bien une énième production conventionnelle pour coller à la politique en vigueur dans ce théâtre. Il faut tout de même saluer, une fois de plus, la qualité des costumes confectionnés dans les ateliers.


Une double distribution pour trois des rôles principaux assure les neuf représentations, dont une à Charleroi. Dans La Damnation de Faust, l’année passée, Nino Surguladze s’exprimait dans une langue incompréhensible. La mezzo-soprano accomplit cette fois un effort, surtout dans les dialogues, mais l’accent demeure inévitablement prononcé de par ses origines géorgiennes. Elle possède cependant la tessiture adéquate pour Carmen, qu’elle chante de sa voix pleine et puissante, sans tomber dans le piège de la caricature. Marc Laho convainc, lui aussi, en Don José, mais la ligne vocale, fermement placée, revêt des couleurs plus pauvres, le volume et l’éclat restant limités, ce que compense la bonne tenue du phrasé. Le ténor liégeois fait preuve d’une incontestable intégrité stylistique et confirme son aisance théâtrale.


Lionel Lhote se glisse dans la peau d’Escamillo avec la prestance qui sied au toréador. La présence de ce baryton au timbre magnétique constitue une garantie de chant français stylé et travaillé. Soprano au vibrato trop accusé et aux aigus souvent durs, Silvia Della Benetta met en avant une voix corsée et probablement surdimensionnée pour Micaela. Elle confère cependant du caractère à la fiancée, dressant ainsi d’elle un portrait un peu différent de la fille vertueuse et discrète à laquelle on s’attend généralement. Alexia Saffery, qui remplace Natacha Kowalski en Frasquita, attire favorablement l’attention, mais elle déséquilibre à son avantage son association avec la Mercédès stridente d’Alexise Yerna qui ne rate pas une occasion de dévoiler ses cuisses. Les petits rôles sont convenablement endossés, malgré le jeu scénique emprunté de Roger Joakim en Zuniga.


Le meilleur pour la fin : la direction inspirante de Speranza Scappucci, attentive à la cohésion du plateau. L’orchestre sonne même mieux que d’habitude, avec précision, fougue et sensualité. L’exécution se signale aussi par sa transparence, ce qui met en valeur le jeu fin et expressif des bois. Unis et engagés, les choristes, renforcés par les enfants de bonne volonté de la Maîtrise, laissent peu à désirer, mais c’est surtout la prestation de l’orchestre qu’il faut retenir, au point de regretter que le chef principal attitré ne dirige déjà plus d’opéra à Liège cette saison.



Sébastien Foucart

 

 

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