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Trpceski et Kavalinski s’imposent en duettistes Paris Maison de la radio 11/09/2017 - Dimitri Chostakovitch : Symphonies n° 9 en mi bémol majeur, opus 70, et n° 12 en ré mineur «L’Année 1917», opus 112 – Concerto n° 1 pour piano et trompette en ut mineur, opus 35 Andrei Kavalinski (trompette), Simon Trpceski (piano)
Orchestre national de France, Neeme Järvi (direction)
N. Järvi (© Simon van Boxtel)
Un an après sa précédente venue à l’Auditorium de la Maison de la radio à la tête de l’Orchestre national de France, Neeme Järvi revient à Paris avec la même formation, toujours pour rendre hommage à Chostakovitch. Après la célébrissime Septième Symphonie (1941), place cette fois à un concert plus original avec deux symphonies rarement à l’affiche, les Neuvième (1945) et Douzième (1961). On reconnaît là l’insatiable curiosité du chef estonien, un hyperactif toujours très présent sur scène comme dans les studios d’enregistrement – lui qui peut se targuer de posséder à son actif plus de 400 disques dont plusieurs symphonies de Chostakovitch gravées pour Chandos et Deutsche Grammophon à partir de la fin des années 1980.
Avec le délicieux Concerto n° 1 pour piano et trompette (1933) donné entre les deux œuvres, on a là une palette assez large de l’inspiration du compositeur russe. Le Concerto fait en effet place à un Chostakovitch volontiers joyeux et facétieux, se tournant vers une veine néoclassique et légère bien éloignée des expérimentations constructivistes des années 1920. Pour autant, c’est davantage vers la symphonie concertante que Järvi tourne cette œuvre, en demandant manifestement à ses solistes de ne pas se distinguer outre mesure, fidèle en cela à ses partis pris interprétatifs. L’accompagnement, allégé dans les parties doucereuses, se montre plus âpre dans la verticalité – véritablement cravachée au piano par l’impeccable Simon Trpceski. Andrei Kavalinski n’est pas en reste à la trompette, mais c’est peut-être plus encore dans le mouvement lent qu’il impressionne par ses pianissimi de rêve, épousant le tempo étiré de Järvi, d’une intense concentration. Ces choix apportent ainsi une noirceur étonnante à ce mouvement superbe. En contraste, le finale nous embarque dans un élan sans respiration aucune, parfaitement rendu par un Trpceski toujours impressionnant de perfection dans la précision rythmique. Le bis, une adaptation de l’un des airs les plus fameux («Ombra mai fu») de l’opéra Serse de Haendel, donne la part belle à la trompette toujours impériale d’Andrei Kavalinski, tandis que Trpceski fait valoir son toucher félin et aérien, sans jamais chercher à prendre le dessus sur son partenaire.
Plus tôt dans la soirée en ouverture de concert, la charmante Neuvième Symphonie avait résonné de son ton joyeux et optimiste: rien d’étonnant à cela tant Chostakovitch avait voulu ainsi signifier la fin du long conflit de la Seconde Guerre mondiale. Pour autant, l’humour et la facétie attendus n’intéressent guère Järvi qui imprime ses tics de direction pendant toute la soirée, accélérant les parties rapides pour mieux apaiser les passages lents en contraste. A la raideur des verticalités, franches, directes et sans aucune respiration succèdent les parties lyriques étirées, sans nerf et sans vibrato, qui envoûtent pour mieux ennuyer ensuite tant le parti pris vire au systématique. Cette lecture analytique portée vers la musique pure, en un ton péremptoire résolument frigide, convient mieux à la massive Douzième Symphonie, une des plus faibles de Chostakovitch: en mettant sur le même plan la mélodie principale et les contrechants imprimés par les différents groupes d’instrument, Järvi modernise quelque peu cette œuvre tournée à la fois vers Tchaïkovski et Mahler. On imagine le choc des auditeurs qui, cette même année 1961, purent la comparer avec la sublime Quatrième Symphonie, enfin créée après vingt-sept ans d’attente!
Florent Coudeyrat
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