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Si peu théâtral Paris Philharmonie 09/18/2017 - et 29 juillet (Salzburg), 17 (Edinburgh), 26 (Luzern) août, 5 septembre (Berlin), 15 (Chicago), 21 (New York) octobre 2017 Claudio Monteverdi : L’incoronazione di Poppea Hana Blaziková (Poppea, Fortuna), Kangmin Justin Kim (Nerone), Marianna Pizzolato (Ottavia), Gianluca Buratto (Seneca), Carlo Vistoli (Ottone), Anna Dennis (Drusilla, Virtù), Lucile Richardot (Arnalta, Venere), Silvia Frigato (Amore, Valletto), Furio Zanasi (Soldato 1, Liberto), Gareth Treseder (Famigliari), Zachary Wilder (Lucano), Francesca Boncompagni (Damligella), John Taylor Ward (Mercurio, Littore), Michal Czerniawski (Nutrice), Robert Burt (Soldato 2)
Monteverdi Choir, English Baroque Soloists, Sir John Eliot Gardiner (direction)
Elsa Rooke, Sir John Eliot Gardiner (mise en scène), Rick Fisher (lumières), Isabella Gardiner, Patricia Hofstede (costumes)
J. E. Gardiner (© Maciej Gozdzielewski)
Après avoir dirigé toutes les Cantates de Bach sur les lieux mêmes de leur création, John Eliot Gardiner revient à Monteverdi, pour célébrer son 450ème anniversaire, dont il donne actuellement les trois opéras en version de concert mise en espace ainsi que les Vêpres de la Vierge. Après Salzbourg, Edimbourg, Lucerne et Berlin, et avant Chicago et New York, il est passé par la Philharmonie de Paris. Pour les Vêpres, il faudra attendre le 8 octobre en la chapelle royale du château de Versailles. Ces représentations parisiennes étaient dédiées à la mémoire de Sir Peter Hall, disparu il y a quelques jours, pour qui John Eliot Gardiner avait une très grande admiration.
La représentation berlinoise du Couronnement de Poppée a été détaillée dans nos colonnes par Sébastien Gauthier et l’on n’a pas grand chose à ajouter à son appréciation de la distribution vocale, qui était exactement la même à Paris, si ce n’est qu’existait une disparité entre les voix de style et technique purement «baroques» de quasiment tous les chanteurs et les deux grandes et magnifiques voix à la technique plus opératique de Gianluca Buratto (Seneca) et Marianna Pizzolato (Ottavia). La voix du contre-ténor américano-coréen Kangmin Justin Kim est curieusement fabriquée, avec des passages étranges d’un registre ou d’une émission à l’autre, mais réussit assez bien à donner un relief au personnage de Néron, que l’on voit mieux chanté par un plein ténor.
Le grand paradoxe de cette représentation est un décalage frappant entre la volonté de montrer l’action théâtrale et le peu de dramatisme que met John Eliot Gardiner dans sa direction. Le chef britannique a réalisé lui même cette mise en espace très convaincante avec la collaboration de la dramaturge française Elsa Rooke et de son épouse Isabella pour les costumes. Il a, après des expériences malheureuses avec divers metteurs en scène, décidé de se servir lui-même ce qui est infiniment louable et plus courageux que certains de ces collègues qui, pour rester dans le vent, continuent de hurler avec les loups travaillant avec des metteurs en scène qui dénaturent le sens des œuvres.
Sa direction à la tête des superbes English Baroque Soloists est la perfection musicale même. Chaque phrase est polie à l’extrême avec une splendeur instrumentale, le traitement des chœurs plus que parfait. Mais le choix des tempi et une certaine placidité font que ce Couronnement ne sonne jamais théâtral malgré le jeu des acteurs, tous totalement impliqués, parfaitement dirigés et parfois spectaculairement spatialisés dans la salle. Très grand paradoxe quand on sait la passion dramatique que Gardiner sait mettre dans la moindre cantate de Bach et encore plus dans ses Passions.
Olivier Brunel
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