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Terrestre Aïda

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Théâtre antique
08/02/2017 -  & 5 août 2017
Giuseppe Verdi: Aida
Elena O’Connor (Aida), Anita Rachvelishvili (Amneris), Ludivine Gombert (La sacerdotessa), Marcelo Álvarez (Radames), Quinn Kelsey (Amonasro), Nicolas Courjal (Ramfis), José Antonio García (Il Re di Egitto), Rémy Mathieu (Un messagero), chœurs des Opéras d’Angers-Nantes, Avignon, Monte-Carlo, et Toulon, Xavier Ribes, Aurore Marchand, Stefano Visconti, Christophe Bernollin (Chefs de chœurs), Corps de ballet des Opéras d’Avignon et Metz, Orchestre national de France, Paolo Arrivabeni (direction musicale)
Paul-Emile Fourny (mise en scène), Benoît Dugardyn (scénographie), Jean-Pierre Capeyron, Giovanna Fiorentini (costumes), Patrick Méeüs (éclairages), Laurence May-Bolsigner (chorégraphie)


(© Philippe Gromelle)


Après un Rigoletto d’exception en juillet (lire ici), il ne sera pas possible de tresser de semblables couronnes de laurier à l’Aïda de 2017, eu égard aux aléas de dernière minute qu’il a bien fallu gérer, et à un plateau vocal très... contrasté.


Décidément, cette année, les nerfs de Jean-Louis Grinda, directeur artistique des Chorégies, auront été mis à rude épreuve. Après le malaise de Mikko Franck, le chef de Rigoletto une heure avant le début de la représentation, et la difficulté de trouver un remplaçant en si peu de temps, voilà que Sondra Radvanovsky, «dans un état d’extrême fatigue physique», nous dit un communiqué, se voit contrainte d’annuler son engagement à Orange dans le rôle d’Aïda, souhaitant vraisemblablement être en pleine possession de ses moyens pour sa Norma au Met en ouverture de saison, le 25 septembre. C’est donc une jeune soprano américaine quasiment inconnue en Europe, Elena O’Connor, qui remplace la Canadienne. Sa carrière a débuté en trombe il y a peu aux Etats-Unis où une retentissante Tosca (qu’elle a également chantée à Wiesbaden en juin dernier pour ses débuts européens) lui a valu des critiques très louangeuses. Pour le dire sans ambages, O’Connor n’a pas - ou pas encore - la carrure d’un rôle qui n’est bien distribué qu’à un authentique lirico spinto. Le timbre est certes onctueux, très caractéristique des sopranos afro-américaines, et les graves d’une délicate noirceur, mais la voix ne parvient pas à s’envoler dans les passages orchestraux étoffés. Marcello Álvarez déçoit. Son Radamès est peu investi, cavalier parfois, et l’Argentin peine à se faire entendre. Les choses commencent assez mal avec «Celeste Aida...»; malgré toute l’indulgence qu’on peut avoir pour les chanteurs devant affronter cet air diabolique à peine cinq minutes après le lever du rideau, la performance reste médiocre. Il faudra attendre la scène du tombeau, dernière de l’ouvrage, pour que ce chanteur, par ailleurs très apprécié, se défasse d’un chant fruste et trouve la noblesse qui faisait jusque-là défaut. Et que dire du Roi d’Egypte de José Antonio García sinon qu'il est tout à fait indigne de ce lieu mythique? Quinn Kelsey en Amonasro, Nicolas Courjal en Ramfis et Ludivine Gombert en Grande prêtresse relèvent le niveau et offrent tous trois des prestations de qualité. Seule à vraiment tirer son épingle du jeu, l’Amnéris d’Anita Rachvelishvili survole sans difficulté la distribution. Voix puissante, timbre lumineux et chant autoritaire lui valent une belle ovation.


Mais le grand vainqueur de la soirée, c’est l’Orchestre national de France, souverain, conduit par Paolo Arrivabeni. Sa direction convainc, subtile et nuancée, naviguant du fracas des fff au murmure flottant des ppp, rigueur et panache au bout de sa baguette. Et le son du National est cossu: un vrai ravissement. Les forces conjointes des chœurs des Opéras d’Angers-Nantes, Toulon, Avignon et Monte-Carlo emplissent l’amphithéâtre avec une remarquable cohésion et une très grande musicalité (Orchestre et chœurs reviennent le 4 août pour Les Planètes de Gustav Holst).


Dans un tel contexte musical, on aurait aimé que la mise en scène de Paul-Emile Fourny fasse oublier les faiblesses vocales. La première impression de sobriété élégante est vite dissipée lorsque la scène est envahie par les fantassins de Bonaparte au temps de la Campagne d’Egypte et la foule d’admirateurs en costumes austères dix-huitième qui s’émerveillent devant les trésors archéologiques que l’on découvrait à peine. Doublée du parallèle entre les prises de guerre rapportées d’Ethiopie par Radamès, qui deviennent pour l’occasion celles de Bonaparte ramenées en France (notamment l’obélisque de la Place de la Concorde), l’idée n’est pas sotte et aurait pu séduire, mieux exploitée et plus discrète. C’est hélas un sentiment d’anachronisme hétéroclite qui prévaut dans ce déferlement de shakos, d’épaulettes à franges, de fourragères dorées qui cohabitent incongrûment avec pagnes, coiffes égyptiennes, et sandales à lanières. La chorégraphie de Laurence May-Bolsigner est soignée, novatrice par moments, très bien exécutée, mais elle fait les frais des défauts de la mise en scène.


En toute justice, mentionnons également l’accablante chaleur (trente-sept degrés à minuit !) qui n’a pas aidé les artistes et a mis sur la brèche les secouristes de la Croix-Rouge qu’on a vu intervenir à de multiples reprises dans les travées.


En 2018, les Chorégies présenteront Mefistofele et Le Barbier de Séville.



Christian Dalzon

 

 

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