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De Debussy à Schoenberg, les Pelléas de Louis Langrée

Paris
Maison de la radio
05/24/2017 -  
Ludwig van Beethoven : Concerto pour piano n° 4, opus 58
Arnold Schoenberg : Pelléas und Mélisande, opus 5

Nelson Freire (piano)
Orchestre national de France, Louis Langrée (direction)


L. Langrée (© Jennifer Taylor)


Louis Langrée rend d’abord hommage aux victimes de Manchester et propose une minute de silence. N’étaient quelques applaudissements intempestifs, la transition avec le début du Quatrième Concerto de Beethoven serait poignante : Nelson Freire, en quelques mesures, nous emmène ailleurs. La suite le montrera magnifique de sonorité, souverain dans l’art de l’allégement timbré, de la volubilité rêveuse : interprétation intimiste, dont la lumière colorée peut aussi se tamiser, notamment dans l’Andante con moto, d’une beauté automnale. Le jeu semble parfois tenir de l’improvisation rhapsodique, avec une superbe cadence pour l’Allegro moderato initial, aussi inventive que contrôlée. Tel est le secret du pianiste brésilien, essentiel dans le Concerto beethovénien sans doute le plus difficile, dont la pierre d’achoppement est le dosage du poids : l’alliance de la liberté et de la rigueur. L’orchestre est à l’unisson du soliste, comme cela se produit rarement : en allant au fond de la partition, jusque dans ses moindres nuances, en aérant les textures, par l’effectif et par le geste, Louis Langrée donne lui aussi l’impression d’inventer alors qu’il ne cesse d’avancer là où beaucoup se montrent trop statiques, sans rien lisser ou aplanir – le mouvement lent, souvent affadi ou étiré, ici très tendu, préserve la vérité du dialogue avec le piano. Deux superbes bis : l’arrangement de l’extrait de l’Orphée de Gluck et le deuxième Intermezzo des Six pièces opus 118 de Brahms.


Quelques jours après Christian Thielemann et la Staatskapelle de Dresde, Louis Langrée s’empare du Pelléas et Mélisande de Schoenberg. Deux interprétations à l’exact opposé l’une de l’autre. Est-ce parce qu’il est, presque plus que tout autre, familier du drame lyrique de Debussy qu’il vient d’interpréter aux Champs-Elysées avec le même orchestre ? La lecture du Français est moins analytique, moins polyphonique – mais pas moins claire. Il opte pour un traitement plus... debussyste, justement, de leitmotive que l’Allemand soulignait davantage, voire surlignait. Les couleurs sont plus fondues, alors qu’elles avaient tendance à se juxtaposer. Sa direction, surtout, est beaucoup plus incandescente, à la tête d’un National – déjà à son meilleur chez Beethoven – qu’elle chauffe à blanc : Thielemann anticipait le Schoenberg à venir, Langrée plonge la partition dans la fournaise expressionniste. Ce n’est pas pour cela que nous le préférons : les deux approches sont admirablement défendues. C’est parce qu’il laisse voir, derrière la musique, le drame de Maeterlinck, qu’il dirige le poème symphonique en chef de théâtre, beaucoup plus narratif, installant d’emblée un climat étouffant et ténébreux, libérant ensuite les forces aveugles de la passion – Thielemann l’annexait à la musique pure. Quarante-cinq minutes de musique qui vous prennent à la gorge.



Didier van Moere

 

 

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