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Festival belcantiste Nancy
Opéra
05/04/2017 - et 7, 9, 11 mai 2017
Gioachino Rossini : Semiramide
Salome Jicia (Semiramide), Franco Fagioli (Arsace), Nahuel Di Pierro (Assur), Matthew Grills (Idreno), Fabrizio Beggi (Oroe, L’Ombre de Nino), Inna Jeskova (Azema), Ju In Yoon (Mitrane)
Chœur de l’Opéra national de Nancy, Merion Powell (chef de chœur), Chœur de l’Opéra-Théâtre de Metz Métropole, Nathalie Marmeuse (chef de chœur), Orchestre symphonique et lyrique de Nancy, Domingo Hindoyan (direction musicale)
Nicola Raab (mise en scène), Madeleine Boyd (décors), Julia Müer (costumes), Bernd Purkrabek (lumières)
(© Opéra national de Lorraine)
La production était annoncée comme l’événement de la saison nancéenne par les glottolâtres: la prise de rôle de Franco Fagioli en Arbace dans le Sémiramis de Rossini. Après Artaserse de Vinci et La Clémence de Titus, Laurent Spielmann confirme son soutien au contre-ténor argentin, en se faisant le défricheur de nouveaux répertoires pour un soliste qu’il a contribué à faire connaître sur la scène française, avant qu’il ne devienne la coqueluche des amateurs de gosiers pyrotechniques. Si dans l’ultime opus de Mozart, présenté il y a trois ans, confier au Sud-Américain le rôle de Sesto revenait à un retour aux intentions originales du compositeur et de la distribution de la création, faire chanter par un contre-ténor le travesti Arsace transgresse la lettre rossinienne dans une gageure dont d’aucuns attendaient le résultat. La surprise ne déçoit pas. Retrouvant la stabilité de l’émission que des incarnations plus théâtrales avaient quelque peu bousculée au profit de ressources expressives également présentes ici, Franco Fagioli déploie une virtuosité étourdissante qui ne verse jamais dans la gratuité, et dessine admirablement les modulations psychologiques d’un héros écrasé par son destin.
S’il concentre les applaudissements, ses partenaires ne se révèlent aucunement en reste. Son rival, Assur, est confié au remarquable Nahuel Di Pierro, basse trentenaire qui affirme déjà une plénitude, sinon une maturité, presque précoces, où la beauté du son cèle le venin dramaturgique de la vengeance avec une crédibilité au diapason des conventions de l’opéra romantique italien, même si un soupçon de rugosité ne déplairait pas à certains tympans. En Sémiramis, Salome Jicia fait palpiter une appréciable science de la séduction et de la duplicité, qui contraste avec l’accorte simplicité de l’Azema dévolue à Inna Jeskova. Le timbre de Matthew Grills n’ignore point l’éclat idiomatique du ténor léger Idreno. Oroe et apparition de l’Ombre de Nino, Fabrizio Beggi se signale par une évidente solidité vocale qui prend çà et là le pas sur les raffinements de couleurs. Mentionnons encore le Mitrane de Ju In Yoon, ainsi que les forces chorales réunissant les rangs nancéens et messins, s’acquittant de leur office. A la tête de l’Orchestre symphonique et lyrique de Nancy, Domingo Hindoyan insuffle à la fosse le dynamisme nécessaire.
Reléguer la partie visuelle en fin de chronique n’a rien d’une désobligeance à l’égard du travail très scénographique de Nicola Raab, qui sait laisser les notes s’épanouir sans trop s’effacer cependant. S’appuyant sur les décors anthracite de Madeleine Boyd, rehaussés par les lumières de Bernd Purkrabek, la conception de la metteur en scène se construit autour d’un vaste miroir dans le tain duquel se cacheraient les mânes de l’époux assassiné qui, encombrant le piédestal du trône, demanderaient réparation. On pourra s’amuser de costumes à la pompe parfois plus Grand Siècle qu’âge romantique, à l’exemple de l’Idreno grimé en avatar du dauphin du Roi Soleil, sans que la diversité vestimentaire ne démente l’efficacité d’un spectacle où l’exigence d’effets ne se confond jamais avec la débauche: prima la musica.
Gilles Charlassier
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