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La star, le violoniste et le musicien

Vienna
Konzerthaus
03/26/2017 -  et 28 (London), 29 (Torino), 31 (Moscou) mars, 2 (Saint-Pétersbourg), 5 (Tel Aviv) avril 2017
Ludwig van Beethoven: Sonate pour violon et piano n° 1, opus 12 n° 1
Johannes Brahms: Scherzo de la Sonate «F-A-E» – Sonate pour violon et piano n° 3, opus 108
Eugène Ysaÿe: Sonate pour violon seul «Ballade», opus 27 n° 3
Serge Rachmaninov: Vocalise, opus 34 n° 14
Pablo de Sarasate: Fantaisie de concert sur «Carmen», opus 25

Joshua Bell (violon), Sam Haywood (piano)


J. Bell, S. Haywood (© Robert Torres)


Le public européen cultive toujours un fond de méfiance vis-à-vis des vedettes qui vendent trop bien: passe encore s’il s’agit de Philippe Herreweghe, dont le répertoire et la probité conservent une pureté quasi janséniste; en revanche, publier des albums de cross-over intitulés «Musical Gifts from Joshua Bell and Friends», dont les notices mentionnent invariablement «Grammy Award-winning violinist and exclusive Sony Classical artist», ne rassure pas le mélomane bien-pensant. Ce récital permettait au fond d’entendre plusieurs facettes de l’interprète américain.



Le violoniste sirupeux


Première pièce de la soirée, la Première Sonate de Beethoven laisse paraître Joshua le violoniste plus que Bell le musicien: avec des jetés d’archet ostensibles, des staccatos virtuoses, des phrases maniérés, les choix musicaux semblent plus guidés par les doigts du violoniste que par sa tête. Viendrait-il à l’idée au chef compétent qu’il est, d’exiger de son orchestre de faire un sort à chaque note comme il semble le vouloir au violon? Cela dit, il subsiste de belles choses: la sobriété efficace du piano de Sam Haywood apporte un contrepoids bienvenu aux pirouettes un peu désinvoltes de son partenaire; d’autre part, cette manière de relier les phrases entre elles par un portamento (particulièrement audible dans les variations du deuxième mouvement) ne manque pas de panache – bien qu’un peu trop prévisible. On sent les interprètes sur une piste intéressante, mais pas encore franchement convaincants.



Le violoniste musicien


Les mêmes recettes sont appliquées dans Brahms mais cette fois les effets sont opposés. Relances rageuses, pizzicati fantomatiques, doubles cordes généreuses: ces déchaînements expressifs sont désormais en complète adéquation avec la partition, les excès enrichissant la musique sans la dénaturer. Là aussi le piano tient un double rôle essentiel: accompagnateur certes (le boss sur scène, c’est le violoniste), mais très présent grâce à un toucher ferme et toujours très timbré. Maintenant une pulsation implacable dans les tempos les plus fous, Sam Haywood clarifie d’un coup de poignet les enchaînements harmoniquees les plus complexes.


Le pur musicien


Brahms était le sommet de la première partie; la sonate d’Ysaÿe fut l’apothéose du récital. Rappelant avec une certaine fierté que son professeur Joseph Gingold en fut le créateur, Joshua Bell s’approprie l’œuvre comme s’il en héritait lui-même: sa technique impeccable lui permet d’évoluer en tout liberté à travers une gamme de registres intenses, sans jamais mettre à défaut sa sonorité rayonnante. Moment de pure musique, où la virtuosité est un simple moyen de transmettre une vision.



Le virtuose


Deux friandises musicales referment le récital. La Vocalise de Rachmaninov, que le tempo judicieux et la retenue expressive débarrassent de potentiels excès, et la Fantaisie sur «Carmen» de Sarasate, enfin, qui donne l’occasion d’entendre le violoniste lâcher un peu un peu la bride, et de faire monter l’enthousiasme du public.



Dimitri Finker

 

 

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