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Un rare Prokofiev de retour à Francfort

Frankfurt
Opéra
01/27/2017 -  et 5, 11, 17*, 24 février 2017
Serge Prokofiev : Der Spieler, opus 24
Andreas Bauer (General a.D), Sara Jakubiak/Barbara Zechmeister* (Polina), Frank van Aken (Alexej), Hedwig Fassbender (Babuschka), Theo Lebow (Der Marquis), Iurii Samoilov (Mr. Astley), Paula Murrihy (Blanche), Peter Marsh (Fürst Nilski), Magnús Baldvinsson (Baron Würmerhelm), Dietrich Volle (Potapitsch), Thesele Kemane (Direktor des Casinos), Michael McCown (1. Croupier), Ingyu Hwang (2. Croupier), Magnús Baldvinsson (Dicker Engländer), Doguş Güney (Langer Engländer), Anna Ryberg (Eine aufgetakelte Dame), Louise Alder (Eine blasse Dame), Julia Dawson (Eine Dame "comme ci comme ça"), Anikó Takács (Ein verehrungswürdige Dame), Sarah Mehnert (Eine verdächtige Alte), Hans-Jürgen Lazar (Krankhafter Spieler), Isaak Lee (Buckliger Spieler), Ludwig Mittelhammer (Verbitterter Spieler), Carlos Krause (Alter Spieler)
Frankfurter Opern- und Museumsorchester, Sebastian Weigle (direction musicale)
Harry Kupfer (mise en scène), Alan Barnes (reprise de la mise en scène), Hans Schavernoch (scénographie), Yan Tax (costumes), Joachim Klein (lumières), Thomas Reimer (vidéo), Malter Krasting (dramaturgie)


B. Zechmeister, F. van Aken (© Monika Rittershaus)


Terminé en 1917 mais seulement créé en 1929 à Bruxelles, Le Joueur fait partie des opéras de Prokofiev parmi les moins connus. L’une des raisons en est précisément cette création tardive (à l’instar de L’Ange de feu, récemment donné à Lyon) mais également un effectif pléthorique particulièrement difficile à réunir. Prokofiev pousse même la difficulté en insérant un opéra dans l’opéra à l’acte IV avec le récit truculent d’Alexeï, qui l’emporte vingt fois de suite à la roulette du casino. Cette satire tirée de l’ouvrage éponyme de Dostoïevski souffre malheureusement des choix contestables de l’adaptation réalisée par le compositeur lui-même, comme la longueur de l’ouvrage, mais également des duos redondants entre Alexeï et Polina. Si on ne trouve pas trace ici de la virtuosité et de l’emphase orchestrales de L’Ange de feu, les amateurs d’orchestre seront tout de même à la fête tant celui-ci constitue une voix à part entière qui développe une foison d’idées musicales, souvent grotesques, vite interrompues pour passer aux suivantes. On notera enfin que l’ouvrage laisse peu de place à l’expression lyrique, préférant un parlé-chanté (d’où, sans doute, le choix de Francfort en faveur de la version allemande) en phase avec les opéras de son époque – ceux de Schreker notamment.


L’Opéra de Francfort reprend la production élaborée par Harry Kupfer voilà quatre ans dans les mêmes lieux et déjà dirigée par Sebastian Weigle. Dans un ouvrage où l’absurdité des relations humaines atteint un niveau de férocité inouï, Kupfer transpose l’action dans un hôpital psychiatrique contemporain mais ne parvient pas réellement à exploiter cette idée intéressante. L’effet de contraste avec les personnages, tous vêtus de costumes de style art déco, ne fonctionne guère. Il reste le plaisir d’une scénographie parfaitement léchée qui s’appuie sur l’alignement interminable d’une suite de portes en fond de scène, surplombé de deux écrans vidéo rappelant les devantures alléchantes des salles de spectacle. Une mosaïque de photos de casinos de toutes les époques vient aussi épisodiquement rappeler l’intemporalité du propos de l’ouvrage, tandis qu’au centre de la scène trône une immense roulette multicolore: c’est là l’une des images fortes du spectacle, tout autant que l’inattendue et désopilante météorite en image vidéo, sensée illustrer la dérive de ces personnages au cœur de pierre. Kupfer ne convainc cependant qu’à moitié, ne parvenant pas à réaliser la satire mordante attendue.


Francfort parvient, une fois encore, à réunir un plateau vocal d’une remarquable homogénéité. C’est surtout l’incandescente Baboulenka de Hedwig Fassbender qui remporte les acclamations du public par l’intensité cassante et ironique de son interprétation, tandis que son aigu tendu sied parfaitement à ce rôle irrésistible. A ses côtés, Andreas Bauer (Le général) montre une basse généreuse, bien épaulé par un Youri Samoilov (Mr. Astley) à la diction appliquée. On regrettera l’absence de Sara Jakubiak (malade) dans le rôle de Polina, remplacée par une correcte Barbara Zechmeister dont on pourra seulement regretter le manque de puissance dans les graves. Elle forme cependant un couple assez dépareillé avec Frank van Aken (Alexeï), plus investi dramatiquement.

Une fois n’est pas coutume, on notera le peu d’affinités de Sebastian Weigle avec cet ouvrage de Prokofiev. Le chef allemand européanise par trop la partition, lissant les arêtes pour exalter les rares couleurs présentes. Si cette direction a pour avantage de ne pas couvrir les voix, on reste quelque peu sur sa faim tant les possibilités expressives et corrosives de l’ouvrage semblent sous-exploitées.



Florent Coudeyrat

 

 

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