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Théâtre du Châtelet
01/12/2017 -  et 14*, 16, 18, 20, 22, 24, 26, 27 février 2017
Jacques Offenbach : Fantasio
Marianne Crebassa (Fantasio), Franck Leguérinel (Le roi de Bavière), Marie-Eve Munger (La princesse Elsbeth), Jean-Sébastien Bou (Le prince de Mantoue), Loïc Félix (Marinoni), Alix Le Saux (Flamel), Philippe Estèphe (Sparck), Enguerrand de Hys (Facio), Kévin Amiel (Max), Flannan Obé (Hartmann), Bruno Bayeux (Rutten, Le tailleur, Le garde suisse)
Ensemble Aedes, Mathieu Romano (chef de chœur), Orchestre philharmonique de Radio France, Laurent Campellone (direction musicale)
Thomas Jolly (mise en scène), Alexandre Dain (collaboration artistique), Thibaut Fack (décors), Sylvette Dequest (costumes), Antoine Travert, Philippe Berthomé (lumières)


M. Crebassa (© DR/Pierre Grosbois)


L’Opéra-Comique présente au Théâtre du Châtelet une œuvre rarissime de Jacques Offenbach, son opéra comique Fantasio d’après Alfred de Musset. Musicologique!


Les spectateurs des théâtres subventionnés parisiens vivent en ce début d’année toute une série de translocations. Le Théâtre de la Ville, fermé pour travaux, poursuit sa programmation dans des lieux aussi différents que l’Espace Cardin, le Théâtre Montfort, celui de la Cité internationale, la Cité de la musique... Le Théâtre du Châtelet va fermer aussi pour la même raison mais reprendra son grand succès, Singin’ in the Rain, dans la nef du Grand Paris du 28 novembre au 11 janvier. Mais, avant de fermer, il héberge ce premier spectacle de l’actuelle saison de l’Opéra-Comique, lequel aurait dû rouvrir après une année de travaux dont le retard pris a obligé ce théâtre à refondre sa programmation et annuler quelques spectacles. La réouverture officielle aura lieu ce 26 avril avec Alcione de Marin Marais, dirigé par Jordi Savall, tandis que la création de La Princesse légère de Violeta Cruz est reportée d’une année.


En attendant, c’est à une résurrection que convie l’Opéra-Comique au Châtelet, celle d’un opéra comique de Jacques Offenbach, Fantasio, sur un livret de Paul de Musset d’après une pièce de son frère Alfred. Créé en 1872 sans succès ni à Paris ni à Vienne, il fut abandonné, dispersé, recyclé en partie dans Les Contes d’Hoffmann, brûlé dans l’incendie de l’Opéra-Comique. Mais la musicologie aujourd’hui fait des miracles et, grâce aux travaux du spécialiste d’Offenbach Jean-Christophe Keck, Fantasio fut reconstitué en 2013, représenté à Berlin, enregistré et aujourd’hui revit sur scène, à une translocation près, dans sa maison d’origine.


La musicologie est une belle chose mais au sortir de la représentation de quasiment trois heures, entracte compris, on peut se demander si un metteur en scène désirant captiver son auditoire ne devrait pas passer outre et formater à la mesure de son intérêt un spectacle pour le rendre vivant en effaçant ses faiblesses et sans y injecter des textes supplémentaires. Car, quoique monté avec un soin extrême, Fantasio déçoit beaucoup. L’intrigue romantique mais mince (un mariage arrangé entre une princesse et un prince de deux royaumes en guerre, contrarié par le coup de tête d’un étudiant soupirant déguisé en bouffon) s’éternise avec des dialogues jamais vraiment spirituels et une répartition très bancale entre airs et ensembles interminables. Le premier acte, d’une grande heure, est d’un statisme désespérant et, quoique très habilement réalisée, la mise en scène de Thomas Jolly plonge l’action dans des tonalités d’éclairages sombres qui ne facilitent en rien la compréhension et ont un effet soporifique.


Thomas Jolly, dont on se souvient qu’il n’a pas fait l’unanimité au début de la saison avec un pourtant très ingénieux Héliogabale de Cavalli à l’Opéra national de Paris, a créé avec Thibaut Fack un système de praticables ingénieux et de machines qui permettent dans un décor unique des déplacements clairs et efficaces. Sa direction d’acteurs est simple, permettant aux chanteurs, tous excellents acteurs, de ne pas trop s’empêtrer dans l’aspect théâtral de leurs parties mais tout étant joué dans une obscurité peu propice jusqu’au final fluo, on passe souvent à côté des subtilités de leur jeu. La distribution comporte des jeunes chanteurs, dont le rôle-titre (créé à Paris par Célestine Galli-Marié), chanté avec une voix magnifiquement timbrée et projetant bien (mais pas toujours bien compréhensible) par l’excellent mezzo-soprano Marianne Crebassa, qui vient de recevoir une «Victoire de la musique». On distingue aussi le Prince de Mantoue de Jean-Sébastien Bou, à la diction parfaite, et le Roi de Franck Leguérinel. La Princesse Elsbeth de Marie Eve Munger manque de volume vocal et même de personnalité. Tous les petits rôles sont parfaitement tenus et l’ensemble est très cohérent.


Le meilleur de l’œuvre, qui ne s’élève jamais à la hauteur des opéra-bouffes d’Offenbach, même les plus minces, est sa partition orchestrale à l’écriture toujours subtile et raffinée, que la direction de Laurent Campellone à la tête de l’Orchestre philharmonique de Radio France et des voix de l’Ensemble Aedes a magnifiée durant toute cette longue soirée.



Olivier Brunel

 

 

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