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Cimarosa tout en couleurs Nancy Opéra 01/31/2017 - et 2, 5, 7, 9 février 2017 Domenico Cimarosa : Il matrimonio segreto Donato Di Stefano (Signor Geronimo), Lilian Farahani (Carolina), Maria Savastano (Elisetta), Cornelia Oncioiu (Fidalma), Anicio Zorzi Giustiniani (Paolino), Riccardo Novaro (Comte Robinson)
Orchestre symphonique et lyrique de Nancy, Thierry Garin (continuo pianoforte), Sascha Goetzel (direction musicale)
Cordula Däuper (mise en scène), Ralph Zeger (décors), Sophie du Vinage (costumes), Hans-Rudolf Kunz (lumières)
(© Opéra national de Lorraine)
La réception des œuvres ne manque jamais d’une versatilité à laquelle la postérité n’omet point d’ajouter son grain de sel. Acclamé lors de sa création, et jusqu’au milieu du dix-neuvième siècle, adulé entre autres par un Delacroix, Le Mariage secret est tombé depuis dans la torpeur d’un relatif oubli dont certaines maisons l’extraient de temps à autre. On ne peut que saluer l’initiative de Laurent Spielmann à l’Opéra national de Lorraine de programmer le chef-d’œuvre de Cimarosa – au cœur d’une saison qui aime à sortir des chemins trop balisés, de Geneviève de Brabant au très attendu Coq d’or de Rimski-Korsakov le mois prochain.
Confiée à Cordula Däuper, la production importée de Zurich assume sans complexe la dimension buffa de l’ouvrage. La maison dessinée par Ralph Zeger et qui sert de décor unique répond à l’unité de lieu du livret de Bertati. Après la présentation des personnages, étiquette nominative au balcon fleuri, pendant l’Ouverture, on découvre, au fil des rotations du dispositif, l’ensemble des pièces d’une demeure hautement colorée, au diapason de laquelle Sophie du Vinage a conçu les costumes de protagonistes généreusement maquillés à des fins plus comiques que réalistes. L’humour de la présente lecture n’en abdique pas moins de l’élucidation et de la vraisemblance, en rendant plus urgente la révélation du mariage entre Paolino et Carolina par la grossesse de la fille cadette, quitte à précipiter l’issue et la faire accoucher d’une poupée à l’heure des révélations finales. Entre un patriarche sur la cuvette et des cupcakes généreusement fluorescents, tandis que le coucou augural des deux actes fonctionne comme les trois coups du lever de rideau, les zygomatiques sont régulièrement sollicités, à défaut de l’être toujours par la subtilité. On mentionnera par ailleurs les lumières de Hans-Rudolf Kunz, qui accompagnent la bonbonnière.
La carrure de Donato Di Stefano résume l’autorité paternelle du Signor Geronimo. En Carolina, Lilian Farahani contraste par l’homogénéité de sa sentimentalité avec la piquante sinon acide Elisetta de Maria Savastano. Cornelia Oncioiu se distingue par une maturité de matrone. Anicio Zozi Giustiniani compense par la sympathie qu’il dégage une légèreté un peu trop idiomatique, tandis que Riccardo Novaro nourrit un Comte Robinson de belle allure. A la tête de l’Orchestre symphonique et lyrique de Nancy, Sascha Goetzel restitue autant la parenté mozartienne que les prémices rossiniennes qui affleurent dans la partition, et peut compter sur la complicité du continuo de Thierry Garin au pianoforte, lequel n’hésite pas à se lancer dans des paraphrases à la virtuosité de cadences, à l’instar de celle autour de l’Ouverture des Noces de Figaro: entre Beaumarchais et Cimarosa, il n’y a qu’un pas – et quelques notes.
Gilles Charlassier
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