Back
L’ONB n’a peur de rien Bruxelles Bozar, Salle Henry Le Bœuf 01/29/2017 - Arnold Schönberg: Begleitungsmusik zu einer Lichtspielszene, opus 34
Erich Wolfgang Korngold: Concerto pour violon, opus 35
Leonard Bernstein: Symphonie n° 2 «The Age of Anxiety» Lorenzo Gatto (violon), Jan Michiels (piano)
Orchestre national de Belgique, Stefan Blunier (direction)
S. Blunier (© Veerle Vercauteren)
Stefan Blunier retrouve l’Orchestre national de Belgique dont il fut le principal chef invité de 2010 à 2013. Le thème de la peur parcourt ce programme particulièrement intéressant, d’où son titre, en italien : «La Paura». Paradoxalement, les œuvres ne présentent pas de lien avec l’Italie, mais plutôt avec les Etats-Unis, où s’est réfugié Schönberg, contraint de fuir le nazisme. La Musique d’accompagnement pour une scène de film (1930) exprime un sentiment de crainte, mais aussi de malaise et d’instabilité. L’orchestre restitue avec précision les couleurs caractéristiques du langage de la Seconde Ecole de Vienne. Soulignant avec minutie les contrastes de dynamiques, il atteint les pics d’intensité sans effet de saturation.
En s’exilant outre-Atlantique, Korngold suit le même destin que Schönberg. Lorenzo Gatto livre de son Concerto pour violon (1945) une interprétation, comme attendu, brillante et lyrique. Ennemi de la vulgarité et de la facilité, ce violoniste à la technique sûre cultive une sonorité raffinée et exprime le caractère contrasté de chaque mouvement sans trop s’épancher : tout bénéfice pour cette œuvre remarquable dont le seul tort est d’occulter le reste de la production du compositeur. Le soliste se plie à l’exigence du bis en puisant dans le corpus incontournable des Sonates et Partitas de Bach, mais il ne révèle rien de neuf sur son jeu. Et décidément, les violonistes un tant soit peu audacieux dans le choix de leurs bis demeurent rares.
La seconde partie est entièrement consacrée à un compositeur né, cette fois, sur le sol américain. La Deuxième Symphonie «The Age of Anxiety» (1949, révisée en 1965) de Bernstein s’inscrit de plein droit dans la thématique. Voilà un choix assurément original : rare au concert en Belgique, cet ouvrage convoque des références européennes, la musique de Chostakovitch venant même, à un moment, à l’esprit, tout en s’inscrivant dans la tradition américaine, comme le suggèrent les inflexions jazzy et le geste du compositeur qui révèle, dans cette partition, sa science de l’orchestration et son sens de l’effet.
Au piano, Jan Michiels s’impose sans peine face à l’orchestre qui se manifeste avec force tout en se montrant limpide et respectueux des équilibres. Dans cet ouvrage qui le sollicite sans cesse, bien qu’il ne relève pas à proprement parler du concerto, il convainc par son jeu maîtrisé et capable de couleurs, d’éclat et de rythme. Sous la direction bienveillante de Stefan Blunier, l’orchestre se montre quant lui affûté et constant. Le chef à la bonhomie sympathique restitue l’essence et la grandeur de cet ouvrage vivement contrasté tout en veillant aux détails.
Sébastien Foucart
|