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Merveilleuses sonorités viennoises

Paris
Philharmonie
01/07/2017 -  
Wolfgang Amadeus Mozart : Concerto pour piano et orchestre n° 22 en mi bémol majeur, K. 482
Anton Bruckner : Symphonie n° 3 en ré mineur (1877)

Staatskapelle Berlin, Daniel Barenboim (piano et direction)


D. Barenboim (© Chris Christodolou)


Pour ce dernier concert du cycle Mozart-Bruckner donné en ce mois de janvier, Daniel Barenboim avait choisi d’associer un des plus célèbres concertos de piano de Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791), le Vingt-deuxième (1785) avec la symphonie d’Anton Bruckner (1824-1896), la Troisième, qui est peut-être avec la Cinquième la plus difficile d’accès. Pour autant, et comme les soirs précédents, la salle Pierre Boulez de la Philharmonie de Paris affichait complet pour accueillir l’Orchestre de la Staatskapelle de Berlin.



Contrairement au concert de la veille, la première partie fut un réel enchantement. Certes, Barenboim n’est pas un adepte des partis pris baroques (au sens large du mot) et son Mozart sonne on ne peut plus «classique»: mais là, ça fonctionne merveilleusement. Accompagné par un ensemble des plus conséquents (31 cordes, une flûte, des clarinettes, bassons, cors et trompettes par deux sans oublier des timbales), il livre une version plus orchestrale que véritablement concertante de cette œuvre mais soulignons que l’importance de l’orchestre est requise par la partition elle-même (dans l’Andante, le soliste passe souvent au second plan) et que l’unité interprétative aura convaincu à chaque instant. D’emblée, les cordes font preuve d’une vivacité et d’une fraîcheur communicatives, le piano s’insérant sans difficulté dans cet écrin moelleux. L’Andante fut un moment de profonde introspection, écouté par un public des plus silencieux. Quant au célèbre Allegro conclusif, Barenboim l’enleva avec une certaine malice (quelle main droite! en dépit de quelques trilles un peu durs dans les attaques) qui souleva l’enthousiasme de la salle.


Bien que durant environ une heure, la Troisième Symphonie de Bruckner est d’une particulière complexité en raison d’un deuxième et d’un quatrième mouvement qui recèlent tellement d’idées qu’on a parfois du mal à y trouver une véritable unité. La difficulté du chef, et partant de l’orchestre, consiste donc essentiellement à ne pas les appréhender bloc par bloc mais au contraire à embrasser la partition pour lui donner toute sa force, chaque mouvement répondant à un autre (les sonorités du premier se retrouvent dans le quatrième par exemple). A ce jeu-là, Daniel Barenboim fait une fois encore montre de sa connaissance du monde brucknérien, livrant aux spectateurs une superbe interprétation de cette symphonie.


Le premier mouvement (Gemässigt, mehr bewegt, misterioso) impressionne ô combien: la pulsation initiale impose un orchestre d’une inaltérable solidité sans pour autant être massif (la finesse des cordes ou les interventions de la petite harmonie l’ont amplement démontré), qui déroule un tapis héroïque, renvoyant immédiatement au monde wagnérien des Nibelungen. Si les cuivres sont d’une plénitude incroyable (mention spéciale à Christian Batzdorf à la trompette solo), on se laisse surtout emporter par certains passages qui se nimbent d’un climat brumeux des plus évocateurs. Et là, une fois les derniers accords lancés, petit incident: s’étant semble-t-il légèrement blessé à la main gauche (qui, dans un emportement, a dû heurter la barre de fer derrière son estrade), Barenboim quitta la scène pendant une petite dizaine de minutes, le temps qu’on lui mette un pansement et qu’il revienne sous les applaudissements pour aborder le deuxième mouvement. C’est d’ailleurs, deuxième incident de la soirée, quelques minutes après le début de ce même mouvement qu’un des huit contrebassistes fut pris d’un malaise et s’effondra avec quelque fracas avant même d’avoir pu atteindre les coulisses: à l’heure où nous écrivons ce papier, sachez que celui-ci va bien comme nous l’a confirmé ce matin l’administration de la Philharmonie de Paris!


Le deuxième mouvement fut d’une indicible beauté, Barenboim prenant tout son temps pour tenir un discours qui, des cordes aux cuivres (excellent pupitre de trombones, bien qu’ils aient parfois eu tendance à un peu trop cuivrer), des puissants forte aux soudains pianissimi, donnait une image idéalisée du compositeur, faisant justement dire aux meilleurs analystes que cette symphonie était «le point de départ du style brucknérien accompli» (Paul-Gilbert Langevin, Bruckner, L’Age d’homme, p. 130). Après un Scherzo là aussi typiquement brucknérien, inquiétant à souhait (sans oublier un Trio délicieusement champêtre mais un brin alangui), le chef conduisit le dernier mouvement avec une tenue exemplaire, salué par un public qui se leva dès le deuxième rappel.


Faut-il préciser, dès lors, qu’on attend avec une grande impatience la fin du cycle qui interviendra les 9 et 10 septembre prochain avec les Huitième et Neuvième Symphonies, cette dernière étant complétée par le Vingt-troisième Concerto de Mozart?


La seconde partie du concert sur le site medici.tv:






Sébastien Gauthier

 

 

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