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Noël franco-viennois au parfum d’Orient Tours
Grand Théâtre
12/24/2016 - et 28, 30, 31 décembre 2016
Franz Lehár : Le Pays du sourire
Sébastien Droy (Prince Sou-Chong), Gabrielle Philiponet (Lisa), Norma Nahoun (Princesse Mi), Régis Mengus (Gustave de Pottenstein), Francis Dudziak (Tchang), Philippe Lebas (Le comte de Lichtenfels), Jean Michel Mounès (Le majordome), Jean-Marc Bertre (Le général), Ilann Ouldamar (L’officier), Marie Perrin (La servante), Marie Vinay (Laure), Elodie Allary (Mizzi)
Chœurs de l’Opéra de Tours, Alexandre Herviant (chef de chœur), Orchestre symphonique Région Centre-Val de Loire Tours, Sébastien Rouland (direction musicale)
Pierre-Emmanuel Rousseau (mise en scène, décors et costumes), Elodie Vella (chorégraphie), Gilles Gentner (lumières)
(© Marie Pétry)
Commun, par habitude, à l’ensemble des théâtres lyriques français, le cahier des charges imposant un ouvrage léger pour les fêtes est renouvelé cette année avec habileté par Benjamin Pionnier, nouvellement appointé à la tête de l’Opéra de Tours et de son orchestre depuis une douzaine de mois. C’est ainsi que le chef français a mis à l’affiche un ouvrage plus en demi-teintes que de coutume, Le Pays du sourire de Lehár, dans une intégralité que la version française, et les scènes hexagonales, n’avaient jamais connue – nonobstant de mineures coupures dans les dialogues, sans incidence sur la partition.
La production réglée par Pierre-Emmanuel Rousseau, lequel signe également décors et costumes, restitue l’exotisme chinoisant de l’ouvrage – l’impossible amour entre Lisa et Sou-Chong renouvelle le thème de l’incompréhension entre Orient et Occident que Puccini avait développé dans Madame Butterfly, ici enrichi par une mise en scène du croisement de deux exils successifs. Rehaussé par les lumières de Gilles Gentner, l’ensemble ne se limite pas à un dépaysement plastique fait de toiles et d’estampes peintes à l’effigie de l’Empire du Milieu et de stéréotypes graphiques. L’opium auquel se confie le Prince, allongé, pour oublier ses remords, son mal-être et sa charge n’ignore pas les conséquences des deux guerres qui empoisonnèrent la région au dix-neuvième siècle – et que dénonce, en creux, Hergé dans Le Lotus bleu. D’une évidente cohérence visuelle, le divertissement n’interdit pas une sincérité dramatique, qui ne reste pas prisonnière des circonstances du calendrier – la fin tragique en témoigne.
La distribution fait vivre les personnages archétypaux de l’intrigue – et tout particulièrement le quatuor des caractères principaux, dévolu à une jeunesse au métier déjà confirmé. En Princesse Lisa, Gabrielle Philiponet instille une nervosité théâtrale qui palpite dans son soprano éminemment lyrique, voire dense, auquel le Sou-Chong de Sébastien Droy ne peut se montrer insensible. Préservant l’intelligibilité de sa diction, le ténor sait condenser l’intensité des sentiments sans se départir de l’intégrité d’une émission claire, rétive à tout amollissement de quelque excès de souplesse. Assumant un rôle plus discret, Norma Nahoun n’en affirme pas moins une fraîcheur touchante. La générosité de Régis Mengus dessine un Gustave de Pottenstein attachant.
Le reste du plateau ne démérite aucunement. Francis Dudziak condense à-propos l’autorité de Tchang, qui se passe d’exigences vocales excessives, quand on apprécie le jeu du comédien Philippe Lebas en Comte de Lichtenfels. Domestiques et militaires complètent le tableau, puisés dans les chœurs de la maison, préparés avec efficacité par Alexandre Herviant. Quant à l’Orchestre symphonique Région Centre-Val de Loire Tours, Sébastien Rouland en fait ressortir les couleurs et la vitalité rythmique dans une partition qui n’en manque point, et que percussions et danses illustrent éloquemment – sur lesquelles la chorégraphie d’Elodie Vella se calque sans faux pas.
Gilles Charlassier
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