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Madama Butterfly 1904

Milano
Teatro alla Scala
12/07/2016 -  et 10, 13, 16*, 18, 23 décembre 2016, 3, 8 janvier 2017
Giacomo Puccini : Madama Butterfly
Maria José Siri/Liana Aleksanyan* (Cio-Cio-San), Annalisa Stroppa (Suzuki), Nicole Brandolino (Kate Pinkerton), Bryan Hymel (F.B. Pinkerton), Carlos Alvarez (Sharpless), Carlo Bosi (Goro), Costantino Finucci (Il principe Yamadori), Abramo Rosalen (Lo zio Bonzo), Leonardo Galeazzi (Yakusidè), Gabriele Sagona (Il Commissario imperiale), Romanzo dal Zovo (L’Ufficiale del Registro), Marzia Castellini (La madre di Cio-Cio San), Maria Miccoli (La zia), Roberta Salvati (La cugina)
Coro del Teatro alla Scala, Bruno Casoni (préparation), Orchestra del Teatro alla Scala, Riccardo Chailly (direction musicale)
Alvis Hermanis (mise en scène et décors), Leila Fteita (décors), Kristine Jurjāne (costumes), Gleb Filshtinsky (lumières), Ineta Sipunova (vidéo), Alla Sigalova (chorégraphie), Olivier Lexa (dramaturgie)


(Brescia/Amisano © Teatro alla Scala)


Directeur musical de la Scala, Riccardo Chailly a entrepris de diriger un cycle Puccini à Milan. Après Turandot et La fanciulla del West, il vient d’ouvrir la saison 2016-2017 de l’illustre théâtre avec Madama Butterfly. Le maestro a cependant opté pour la toute première version de l’ouvrage, celle qui a connu un échec retentissant en 1904 dans ce même lieu. Sur la pression de son éditeur, Ricordi, Puccini a dû remanier sa partition à plusieurs reprises, en en condensant la trame, avant de parvenir à l’édition de 1907, qui est celle habituellement représentée aujourd’hui dans les théâtres lyriques. La version de 1904 compte une vingtaine de minutes de musique de plus et est découpée en deux actes. La différence la plus importante concerne le personnage de Pinkerton, qui est représenté comme un rustre cynique et goujat, voire raciste avec ses remarques désobligeantes sur le Japon et ses habitants. L’air « Addio fiorito asil », qui le rend humain et attachant, ne sera ajouté que plus tard. La fête du mariage est aussi beaucoup plus longue dans la version originale, avec une orchestration particulièrement luxuriante et riche en références à la musique japonaise. Autre différence importante : à la fin de l’œuvre, Pinkerton n’apparaît que très brièvement et ne voit pas Butterfly. L’initiative de la Scala doit être saluée, puisqu’elle permet de découvrir, sous un jour sensiblement différent, un des ouvrages lyriques les plus représentés et les plus aimés du public.


Principal artisan de cette exhumation, Riccardo Chailly démontre, dès les premières notes, son sens du théâtre et de la continuité dramatique, sans pour autant négliger les pages lyriques de la partition, qu’il sait rendre avec passion et emphase. A la tête de l’Orchestre de la Scala, le chef déploie une riche palette de couleurs et de nuances et obtient un équilibre parfait entre les pupitres. Malheureusement, il ne semble pas très attentif aux chanteurs, lesquels sont souvent couverts par les musiciens. Sans être exceptionnel, le plateau vocal est homogène et de belle tenue. Remplaçant au pied levé Maria José Siri, souffrante, Liana Aleksanyan est une Butterfly délicate et émouvante sur le plan vocal et sobre sur le plan scénique, évitant le piège du pathos. S’il donne souvent l’impression de forcer, le Pinkerton de Bryan Hymel n’en est pas moins un officier au chant généreux et à l’allure hautaine, en parfaite adéquation avec son rôle d’Américain arrogant. Tout le contraire du Sharpless de Carlos Alvarez, particulièrement humain avec son chant noble et nuancé. On retient également la Suzuki à la voix corsée et bien timbrée d’Annalisa Stroppa ainsi que le Goro sans scrupules de Carlo Bosi.


S’il fait scandale à Paris (on se souvient de sa Damnation de Faust controversée à Bastille), le metteur en scène Alvis Hermanis semble bien sage à Milan, où il a signé la saison dernière une version de I due Foscari très consensuelle. Il récidive avec une Madama Butterfly de facture traditionnelle et classique, virant parfois au kitsch. Le spectacle se déroule dans une maison de trois étages aux parois coulissantes et transparentes sur lesquelles sont projetées des vidéos qui font apparaître un Japon de fantaisie (Alvis Hermanis avoue n’avoir jamais mis les pieds au Pays du Soleil levant) et de carte postale, avec les inévitables cerisiers en fleurs. Les escargots parisiens sont ici remplacés par des papillons. La scénographie est une réussite esthétique, rehaussée par des costumes chatoyants. Les personnages japonais de l’œuvre, habillés en costumes traditionnels et au visage maquillé de blanc estompant les traits du visage, adoptent la gestuelle du théâtre kabuki. Une mise en scène très esthétisante, à défaut d’être originale. Pour l’ouverture de la saison 2017-2018, on annonce d’ores et déjà Andrea Chénier.



Claudio Poloni

 

 

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