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Thriller musical

Toulon
Opéra
11/11/2016 -  et 13* novembre 2016
Stephen Sondheim : Sweeney Todd
Jérôme Pradon (Sweeney Todd), Alyssa Landry (Miss Lovett), Ashley Stillburn (Anthony Hope), Sarah Manesse (Johanna), Sarah Tullamore (Une mendiante), Maxime de Toledo (Le juge Turpin), Julien Salvia (Tobias), Thomas Morris (Pirelli, Fogg), Sinan Bertrand (Un huissier)
Chœur de l’Opéra de Toulon, Christophe Bernollin (chef de chœur), Orchestre de l’Opéra de Toulon, Daniel Glet (direction musicale)
Olivier Bénézech (mise en scène), Johan Nus (chorégraphie et participation à la mise en scène), Christophe Guillaumin (décors), Frédéric Olivier (costumes), Régis Vigneron (lumières), Jean-Baptiste Cousin (réalisation des lumières)


(© Frédéric Stéphan)


Le répertoire d’un théâtre lyrique n’a pas vocation à se limiter au seuls gosiers romantiques, et l’Opéra de Toulon le démontre avec intelligence en mettant à l’affiche un Sweeney Todd de Sondheim coproduit avec La Clef des Chants et le Château d’Hardelot – et le concours des tutelles locales septentrionales, le département du Pas-de-Calais et la nouvelle entité régionale où ce dernier s’inscrit. Confiée à Olivier Bénézech, la mise en scène affirme les frissons du livret de Hugh Wheeler, aux allures de thriller. Nourrie de misère et de vengeance, de cadavres et de cannibalisme involontaire, l’intrigue aurait pu inviter à une débauche de sordide et d’hémoglobine que les gothiques accents d’orgue ponctuant le drame n’auraient pas été en peine d’assaisonner. Certes, les lumières de Régis Vigneron, aux inquiétants tons nocturnes, sont étoffées de fumigènes aux senteurs d’une gastronomie aussi douteuse que les tartes de Miss Lovett, mais la souillure du meurtre se garde de trop éclabousser. On pourra même trouver un rien aseptisé le décor de cuisinette dessiné par Christophe Guillaumin, tout en saluant l’habileté scénographique, généreuse en humour sinistre – outre le congélateur fumant où sont jetés les trucidés, retenons le dispositif de projection vidéographique qui métamorphose en Union Jack le rideau à lamelles dissimulant le salon au moment où le rasage devient meurtre. Mentionnons encore les costumes dessinés par Frédéric Olivier, lesquels participent d’une caractérisation des personnages qui ne s’enferme pas dans une temporalité hermétique, ainsi que les mouvements chorégraphiques conçus par Johan Nus, assumant les exigences de Broadway, en particulier dans les vigoureux ensembles.


Le plateau se révèle au diapason de l’idiosyncrasie vocale où se reconnaît la comédie musicale – n’économisant pas l’adjuvant microphonique, ici réglé avec un certain équilibre, entre autres avec la fosse. Dans le rôle-titre, le guttural Jérôme Pradon incarne un barbier blessé qui tire de ses humiliations injustes le ressort de sa revanche. Il n’hésite pas à accentuer la rudesse de son chant pour mettre en avant la soif vindicative d’un personnage à la sensibilité à vif, qui s’exprime aussi dans la tendresse désespérée face au corps inerte de Lucy, son épouse qu’il n’avait pas reconnue sous sa défroque de clocharde et jouée avec une gouaille chafouine par Sarah Tullamore. Alyssa Landry plonge Miss Lovett dans l’intonation populaire qui lui revient, quand bien même le stéréotype pourrait sonner un peu poli. Avec la Johanna délicate de Sarah Manesse, l’Anthony d’Ashley Stillburn, marin impeccablement britannique, plus éduqué que nécessaire, forme un attachant couple de jeunes amants. Egalement Fogg, Thomas Morris se délecte des italianismes de Pirelli, le charlatan. Le solide Maxime de Toledo rivalise de rapacité en Turpin avec l’huissier campé par Sinan Bertrand. Tobias volubile et à l’engagement évident, Julien Salvia tire au mieux parti des fragilités d’une voix légère. Sans oublier les chœurs préparés par Christophe Bernollin, à l’enthousiasme non sans reproche, on saluera la direction de Daniel Glet, attentive aux ressources expressives de l’intensité sonore dans une partition où l’efficacité tient la dragée haute à la subtilité, pour le plus grand plaisir du spectateur.



Gilles Charlassier

 

 

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