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Démarrage en force

Gent
Opera Vlaanderen
10/02/2016 -  et 14, 16, 18, 20, 22 septembre (Antwerpen), 4, 7, 9* octobre (Gent) 2016
Leos Janácek: Vĕc Makropulos
Rachel Harnisch (Emilia Marty), Michael Kraus (Jaroslav Prus), Michael Laurenz (Albert Gregor), Sam Furness (Vítek), Raehann Bryce-Davis (Kristina), Guy de Mey (Hauk-Sendorf), Károly Szemerédy (Dr. Kolenatý), Adam Smith (Janek Prus)
Koor Opera Vlaanderen, Jan Schweiger (chef de chœur), Orkest Opera Vlaanderen, Tomás Netopil (direction)
Kornél Mundruczó (mise en scène), Monika Pormale (décors, costumes), Felice Ross (lumières)


(©Annemie Augustijns)


Après un diptyque déroutant il y a deux ans, plombé par un Voyage d’hiver violent, Kornél Mundruczó canalise son imagination dans L’Affaire Makropoulos (1926). Sa lecture parait cette fois plus décantée et lisible mais elle s’avère tout aussi fouillée. Surtout, l’acteur et réalisateur hongrois reste fidèle à l’esprit de l’opéra de Janácek, mélange de fantastique et de réalité concrète. Manifestant un sens poussé de l’image et de l’occupation de l’espace, il livre un spectacle puissant, porté par une direction d’acteur intense et une scénographie percutante.


Ce spectacle se déroulant d’une traite pour maintenir la tension s’étend sur deux décors, d’abord, au premier acte, un tribunal aux murs recouverts de boiserie, ensuite, dans les deux autres, un intérieur luxueux des années 1960 ; une réalisation splendide de Monika Pormale, mise en valeur par les lumières recherchées de Felice Ross. Emilia Marty, affreusement vêtue, semble provenir d’un autre monde : du sang noir coule dans les veines de cette femme mince et jeune, maintenue artificiellement en vie et vivant sur un fil. Plus troublante que séduisante, plus Lulu androgyne que grande dame straussienne, moins hautaine qu’indifférente, elle ne suscite ni empathie, ni émotion.


Dans l’ordre des choses, son départ enfin décidé dans l’au-delà réserve une dernière image saisissante. Elle descend doucement dans sa tombe, une des parois du muret de la cuisine devenant dès lors sa pierre tombale sous un effet visuel fabuleux, en même temps que les meubles de salon se lèvent sous l’effet de l’apesanteur. La première apparition de Hauk-Sendorf, un de ses anciens amants, se produit sous une lumière stroboscopique, artifice inutile et gênant, auquel le metteur a déjà eu recourt dans Le Château de Barbe-Bleue, sa précédente – et première – expérience lyrique. Il n’empêche que ce spectacle limpide, malgré la complexité de l’intrigue, reste un des meilleurs de l’Opéra des Flandres de ces dernières années, et confirme que cette nouvelle figure du monde de l’opéra pourrait compter parmi les metteurs en scène les plus en vue s’il continue à faire preuve de discernement.


A l’exception de Guy de Mey, qui porte les traits de Hauk-Sendorf avec agilité et caractère, les chanteurs débutent dans leur rôle, mais ils se révèlent brillants, formant une de ces solides distributions dont l’Opéra des Flandres a le secret. Avec sa perruque, qu’elle enlèvera par la suite pour découvrir un crâne dégarni, Rachel Harnisch ressemble à ces vedettes de la télévision et du cinéma des années 1980. Outillée pour incarner le personnage omniprésent d’Emilia Marty, dont elle adopte la couleur vocale, les accents et les inflexions, la soprano suisse s’y révèle probante, en dépit d’une légère fatigue perceptible à la fin ; ce rôle exigeant ne prend pas la chanteuse au dépourvu, mais elle manque de peu de s’y consumer.


Michael Kraus signe en Prus une prise de rôle déjà définitive ; le baryton épate par la finesse de la composition de ce personnage et par son aisance, sur tant le plan théâtral que vocal. Gravitent également autour d’eux d’excellents maillons, comme les ténors Sam Furness en Vítek et Michael Laurenz en Albert Gregor, qui maitrise les passages vers le registre aigu, ou Károly Szemerédy, imposant par sa présence et son chant en Dr. Kolenatý, qu’il sert de sa voix pleine et vigoureuse ; remarquable aussi le Janek Prus d’Adam Smith, un habitué de la maison, et la Kristina fraiche et candide de Raehann Bryce-Davis, nouvelle recrue de la troupe de jeunes de l’Opéra des Flandres.


Tomás Netopil connaît maintenant bien cet orchestre pour l’avoir conduit dernièrement dans La Flûte enchantée et La Juive. Sa direction demeure constamment claire et détaillée, intense et vivante, épousant parfaitement les inflexions et le lyrisme caractéristiques de cette musique géniale. La saison démarre fort.



Sébastien Foucart

 

 

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