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Le chalet a rouvert ses volets Toulon Opéra 09/16/2016 - Léo Delibes: Lakmé, ouverture, air des clochettes (Acte II), air de Gérald (Acte I), air de Nilakantha (Acte II)
Georges Bizet: Les Pêcheurs de perles, duo Nadir/Leila (Acte II)
Jules Massenet: Chérubin, air de Chérubin (Acte I)
Adolphe Adam: Le Toréador, trio Don Belfor/Coraline/Tracolin (Acte I) – Le Chalet
Jodie Devos (Leila, Lakmé, Chérubin, Bettly), Sébastien Droy (Gérald, Tracolin, Daniel), Ugo Rabec (Max, Nilakantha, Don Belflor)
Chœur et Orchestre symphonique de l’Opéra de Toulon, Guillaume Tourniaire (direction)
J. Devos, S. Droy, & U. Rabec
La première partie du concert offrait des pages de Lakmé, des Pêcheurs de perles, et deux raretés, l’air de Chérubin extrait de l’acte I de la comédie chantée Chérubin de Jules Massenet créée en 1905, et le trio extrait du Toréador, « Ah, vous dirai-je maman... », opéra-comique d’Adam composé en 1849. La deuxième partie était entièrement consacrée au Chalet, donné dans son intégralité. Un programme entièrement français, journées du patrimoine obligent.
De l’œuvre d’Adolphe-Charles Adam (1803-1856), compositeur français prolifique, on ne connaît plus aujourd’hui que son ballet Giselle ou les Willis (1841), toujours en bonne place dans le canon du ballet romantique et figurant au répertoire des meilleures compagnies; et, tout aussi célèbre, son cantique de Noël Minuit, Chrétiens, plus connu (et plus apprécié) dans les pays anglo-saxons sous le titre Holy Night. Dans une moindre mesure, on peut citer son ballet Le Corsaire (1856) et l’opéra-comique Le Postillon de Longjumeau (1836), ce dernier très rarement repris mais dont il existe un enregistrement assez ancien avec Jean-Philippe Lafont et June Anderson. La quasi-totalité de l’œuvre d’Adam (soixante-dix-huit opéras-comiques, vingt-neuf ballets, cinq opéras, de nombreuses pages religieuses, et près de cent cinquante pièces pour piano) a sombré dans l’oubli. Son opéra-comique Le Chalet (1834), qui connut un franc succès dès sa création (joué trois mille fois au XIXe siècle en France et à l’étranger), a disparu du répertoire depuis les années 1960.
Le livret du Chalet, que Donizetti réutilisera dans Betly et Moniuszko dans Bettly, raconte l’histoire d’une coquette villageoise, Bettly, qui fait languir un amoureux naïf, Daniel, et d’un officier hâbleur, Max, lequel courtise la jeune fille et persuade son rival de s’engager dans l’armée... Sans toutefois atteindre la fine élégance des mélodies de Donizetti, la partition est pleine de fraîcheur et d’entrain et le duo ténor-basse «Il faut me céder ta maîtresse», n’est pas loin d’égaler le duo Nemorino-Belcore dans L’Elixir d’amour. Le sujet, mais surtout son traitement, tiennent plus du vaudeville que de l’opéra-comique tel que nous le connaissons aujourd’hui. La partition est moins brillante que celles du maître de Bergame mais le sautillant Guillaume Tourniaire, à la tête de l’Orchestre symphonique de Toulon, lui donne tout l’allant et la verve qu’elle mérite. La soprano belge Jodie Devos qu’on annonçait en méforme, rend au personnage de Bettly toute sa fraîcheur, la voix est joliment colorée et les extrémités de la tessiture du rôle exécutées avec une belle assurance. Le ténor Sébastien Droy (Daniel) tire son épingle du jeu avec «Elle est à moi, c’est ma compagne»; le rôle n’est que très modérément gratifiant et ce n’est pas à lui qu’est réservée la meilleure musique. La basse Ugo Rabec campe un Max plein de panache, notamment dans son air de bravoure «Vallon de l’Helvétie», sans doute la meilleure page de l’ouvrage que toute basse chantante sachant vocaliser pourrait mettre à son répertoire sans avoir à en rougir. Droy et Rabec s’acquittent tous deux de façon convaincante du duo «Il faut me céder ta maîtresse».
Il n’existe que d’anciennes traces sonores de cet ouvrage et l’on ne peut que saluer cette résurrection par l’Opéra de Toulon pour une unique représentation de concert nous rappelant ainsi que ce compositeur est l’un des fondateurs de l’opéra-comique à la française. Elle a fait hier soir l’objet d’une captation et un CD doit paraître sous le label Timpani, distribué par harmonia mundi. Voilà qui confirme le dynamisme de cette maison et les progrès indéniables de sa phalange, permettant, peut-être, aux volets de ce Chalet de rester entrebâillés.
Le site de l’Opéra de Toulon
Christian Dalzon
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