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Attention: la 400Hz! Vienna
Staatsoper
06/14/2016 - et 16*, 19, 21 juin 2016
Christoph Willibald Gluck: Alceste
Véronique Gens (Alceste), Joseph Kaiser (Admète), Clemens Unterreiner (Grand Prêtre, Une divinité infernale), Manuel Walser (Apollon, Un hérault, Coryphée), Jason Bridges (Evandre, Coryphée), Adam Plachetka (Hercule), Maria Nazarova (Coryphée, Enfant), Juliette Mars (Coryphée, Enfant), Gebhard Heegmann (Voix de l’oracle)
Gustav Mahler Chor, Thomas Lang (chef de chœur), Les Talens Lyriques, Christophe Rousset (direction)
Christof Loy (mise en scène), Dirk Becker (décors), Ursula Renzenbrink (costumes), Olaf Winter (lumières), Thomas Wilhelm (chorégraphie)
A. Plachetka (© Wiener Staatsoper/Michael Pöhn)
Diapason la 400Hz: la note de bas de page imprimée sur la couverture du programme s’affiche comme un avertissement. L’Orchestre de l’Opéra de l’Etat de Vienne ne s’est pas subitement converti au baroque: Les Talens Lyriques, sous la direction de Christophe Rousset, sont dans la fosse pour donner Alceste de Gluck. Il est quelque peu ironique de penser que si la première de la version initiale italienne de l’œuvre a pris place à Vienne en 1767, il aura fallu attendre 245 ans pour que la version française, qui a fait le succès de l’œuvre, retourne dans la ville.
La musique de Gluck oscille en permanence entre tradition et modernité: on mesure certes le considérable chemin parcouru en quelques années par un Mozart, notamment sur le traitement psychologique des personnages ; pourtant le traitement de la forme et des développements thématiques dans Alceste sont absolument révolutionnaires – Richard Wagner lui-même en était convaincu. La mise en scène de Christof Loy, créée à Aix-en-Provence en 2010, ose une interprétation assez littérale du texte, et parvient habilement à dépoussiérer la tragédie grecque en y introduisant un fourmillement de détails loufoques qui individualisent la foule de personnages sur scène.
Les performances des chanteurs sont aussi remarquables. Deux d’entre eux sortent particulièrement du lot: Véronique Gens, dans le rôle-titre qu’elle connaît à la perfection, rayonne de naturel. Elocution impeccable, voix ample et agile: elle parvient tout entière à combiner les attributs royaux avec une humanité émouvante de grâce. Autre intervention, celle d’Apollon, fort courte, mais chantée avec une intensité solaire par Manuel Walser (déjà remarqué dans un rôle secondaire de La Clémence de Titus). Joseph Kaiser, en roi Admète, se bonifie à fur et à mesure des scènes, offrant une répartie de très haut niveau à sa partenaire – tout juste note-t-on un style un peu plus précieux et quelques duretés occasionnelles. Clemens Unterreiner campe lui un Grand Prêtre athlétique et tout aussi impressionnant.
On aurait pu craindre l’orchestre un peu perdu dans la grande fosse de l’Opéra de Vienne, mais on ne perd rien de la richesse des timbres mis mouvement par le dynamisme de Christophe Rousset. On est moins convaincu en revanche par les grandes scènes d’ensemble, qui souffrent parfois d’un foisonnement ne parvenant pas à masquer certaines imprécisions et flottements rythmiques.
Des rangs plutôt clairsemés accueillaient la performance, les touristes prenant le pas semble-t-il sur les réguliers de l’opéra. Les Viennois avaient-ils peur de s’ennuyer avec Gluck? Boudaient-ils un orchestre invité venant empiéter sur les platebandes de l’orchestre du Staatsoper? S’inquiétait-il d’un répertoire préclassique, d’habitude confiné au Theater an der Wien? Ceux qui avaient fait le déplacement se réjouissaient certainement d’assister à une pièce sortant des sentiers battus. Après une longue absence au Staatsoper (aucun Gluck donné entre 1991 et 2012), l’aventure avec le compositeur se poursuit la saison prochaine, avec Armide en octobre sous la direction de Mark Minkowski.
Dimitri Finker
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