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Symphonie des adieux

Paris
Philharmonie 1
06/18/2016 -  
Gustav Mahler : Symphonie n° 3
Michelle DeYoung (mezzo)
Chœur de l’Orchestre de Paris, Chœur d’enfants de l’Orchestre de Paris, Lionel Sow (chef de chœur), Orchestre de Paris, Paavo Järvi (direction)


P. Järvi (© Kaupo Kikkas)


Welser-Möst, puis Dudamel. Mikko Franck, puis Paavo Järvi. Les Troisième Symphonie de Mahler se suivent sans se ressembler. Mais pour le directeur de l’Orchestre de Paris, c’était aussi la Symphonie des adieux : il donnait son dernier concert, avant de céder la place à Daniel Harding... dont un des premiers sera consacré à la Dixième.


L’occasion de vérifier, une fois de plus, la qualité de tout le travail accompli pendant six saisons. Libéré des pesanteurs de Christoph Eschenbach, l’orchestre a acquis – ou retrouvé – une clarté et une souplesse, un degré de perfection aussi dans la lecture des partitions, qui ont marqué chacune de leurs rencontres, même si certaines interprétations ont pu susciter des réserves. On sait gré également au chef estonien d’avoir élargi le répertoire, en particulier à Sibelius et aux musiques du Nord, sans négliger les œuvres de la tradition classique et romantique ou la musique française, avec une politique de création suivie – à travers des musiques assez traditionnelles.


Cette quatrième Troisième, si l’on peut dire, nous rappelle l’esthétique défendue constamment par le chef. Ce n’est pas un mystère qui s’accomplit, mais une forme qui se révèle. La partition relève ici de la musique pure, sans arrière-plan, sans ce côté Mitteleuropa préservé par Mikko Franck, dont la formation rejoint pourtant celle de Järvi. Celui-ci s’en tient en effet à une approche philologique. De ce point de vue, l’exécution est superbe, avec un orchestre au sommet, par sa clarté analytique, son homogénéité, l’équilibre, jamais évident chez Mahler, entre les pupitres. Rigoureusement construit, Le « Kräftig. Entschieden » file droit et sait où il va, le Menuet et le Scherzo ont une légèreté chambriste. Est-ce sec, désincarné ? Nullement. Mais la direction cherche d’abord à avancer, rebelle à toute complaisance – à tout ce qu’osait un Bernstein, finalement, toujours soucieux de relier l’œuvre à des racines que Järvi veut au contraire oublier ou dépasser. Cette conception trouve cependant ses limites dans le finale, après les extraits de Zarathoustra et du Knaben Wunderhorn chantés par une Michelle DeYoung au vibrato trop large et un excellent chœur: on ne sent pas assez la montée vers la lumière de l’amour, peut-être parce que le chef cherche trop à canaliser l’émotion, comme si la musique, pourtant magnifiquement restituée dans sa lettre, n’arrivait pas tout à fait à prendre l’essor vibrant du crescendo.


Le concert s’achève par un hommage de Bruno Hamard, le directeur général de l’orchestre, qui lit et offre à Paavo Järvi une lettre de Pauline Viardot à Berlioz. L’orchestre, ensuite, pour lui dire au revoir, joue seul la Valse lyrique de Sibelius, un de ses compositeurs de prédilection – on attend avec impatience leur intégrale des Symphonies chez Warner, qui ressuscitera de mémorables concerts.



Didier van Moere

 

 

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