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Un Tristan insuffisamment tendu

Paris
Théâtre des Champs-Elysées
05/12/2016 -  et 15, 18, 21, 24 mai 2016
Richard Wagner : Tristan und Isolde
Torsten Kerl (Tristan), Rachel Nicholls (Isolde), Michelle Breedt (Brangäne), Steven Humes (Le Roi Marke), Brett Polegato (Kurwenal), Andrew Rees (Melot), Marc Larcher (Un berger, Un jeune marin), Francis Dudziak (Le timonier)
Chœur de Radio France, Stéphane Petitjean (chef de chœur), Orchestre national de France, Danielle Gatti (direction)
Pierre Audi (mise en scène), Willem Bruls (dramaturgie), Christof Hetzer (scénographie et costumes), Jean Kalman (lumières), Anna Bertsh (vidéo)


(© Vincent Pontet)


Pour la fin très proche de son mandat de directeur musical de l’Orchestre national de France, Daniele Gatti, bientôt en route vers Amsterdam, a souhaité offrir un Tristan et Isolde en version scénique au public du Théâtre des Champs Elysées.


C’était sans doute aussi une façon de faire un état des lieux de l’orchestre qu’il quitte. Si tel était l’objectif, le constat, sans être déshonorant, n’est pas non plus complètement positif. Approximations dans les attaques, unissons des cordes parfois imprécis (hormis un beau pupitre de violoncelles), fanfares du début du deuxième acte pour le moins perfectibles, ces manques témoignent de l’important travail de fond que devra conduire le prochain directeur musical dont on attend la nomination de manière imminente. Durant ces presque cinq heures de musique, la direction de Gatti peine à convaincre, surtout dans le premier acte, même si elle parvient à plus de maîtrise, d’émotion et d’engagement dans le deuxième et surtout le troisième acte, notamment dans un Prélude très réussi. Mais la tension inhérente à cette musique n’est qu’inconstamment au rendez-vous et en tout cas jamais au niveau de celle du Tristan dirigé par par Mikko Franck salle Pleyel en 2012.


Concernant le travail de Pierre Audi, rien de choquant, surtout rien qui ne dérange la musique, ce qui est déjà beaucoup par les temps qui courent, mais rien non plus de vraiment passionnant. On a parfois plus que l’impression d’avoir déjà vu, notamment chez Patrice Chéreau, ces mouvements – parfois bruyants! – de blocs sombres qui occupent la scène durant les trois actes. Plus gênant, la direction d’acteur est réduite au minimum et l’exercice s’approche plus d’une mise en espace avec décors dans les belles lumières de Jean Kalman. Rien de tout cela en tout cas ne justifie les déplacés sifflets entendus à l’issue de la représentation à d’adresse de l’équipe de production.


Question chanteurs, le bilan est lui aussi contrasté. Passons sur le Matelot de Marc Larcher, qui ouvre bien maladroitement l’œuvre, pour évoquer le Kurvenal bien sonore de Brett Polegato, l’émouvant Roi Marke de Steven Humes, qui offre sans doute le plus beau moment de cette soirée lors de son monologue de l’acte II, et le Melot troublant d’Andrew Rees. La Brangäne de Michelle Breddt est trop inégale pour convaincre. Torsten Kerl est un Tristan investi, solide, pas toujours précis d’intonation mais qui termine la soirée indemne, ce qui est déjà un exploit. Quant à Rachel Nicholls, arrivée dans la production il y a quelques semaines suite à l’annulation d’Emily Magee, elle possède dès maintenant d’évidentes qualités de puissance, de justesse et un sens de la ligne qui feront sans doute d’elle, lorsqu’elle se sera débarrassée de quelques aigus maladroits, une Isolde avec laquelle il faudra compter. Le chœur d’hommes de Radio France, préparé par Stéphane Petitjean et qu’on ne voit pas sur scène, est précis dans ses courtes interventions du premier acte.


En somme, un Tristan non sans qualités mais inégal, plus musique que théâtre, ce dont on ne se plaindrait pas si la musique était au niveau de tension extrême qu’un tel chef-d’œuvre requiert, seule façon de transformer ces cinq heures en rêve éveillé.



Gilles Lesur

 

 

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