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Mahler selon Dudamel Paris Philharmonie 1 03/20/2016 - et 3, 4, 5, 6 (Los Angeles), 13 (New York), 17 (Amsterdam), 24 (London) mars 2016 Gustav Mahler : Symphonie n° 3 Tamara Mumford (mezzo)
Chœur de Radio France, Maîtrise de Radio France, Sofi Jeannin (chef de chœur), Los Angeles Philharmonic, Gustavo Dudamel (direction)
G. Dudamel
Après Franz Welser-Möst et Cleveland, Gustavo Dudamel et Los Angeles : les Troisième de Mahler se suivent et ne se ressemblent pas. L’Autrichien en avait une vision lumineuse, apollinienne, parfois presque schubertienne. Le Vénézuélien est plus spontané, plus généreux, plus dionysiaque, sans pour autant en faire une grande épopée panthéiste : il reste assez mesuré, finalement – le geste est beaucoup plus contrôlé qu’autrefois ou que dans certains répertoires... et la chevelure commence à grisonner. Dudamel ne se montre pas moins lumineux que Welser-Möst, que certains avaient d’ailleurs beaucoup critiqué ; il l’est autrement : l’éclat de son orchestre est plus cru. Mais l’interprétation ne convainc pas totalement : il n’a pas, comme son aîné, le sens de la forme – pierre d’achoppement de l’interprétation mahlérienne. Le « Kräftig. Entschieden » initial en pâtit beaucoup, très décousu, avec souvent une confusion entre contraste et gradation ; au lieu de chercher le fil conducteur, la direction privilégie trop la superposition, le collage avant l’heure, un peu comme si l’on se trouvait chez Ives – alors que Mahler est un musicien du développement. Le Menuet et le Scherzo posent moins de problèmes et conviennent mieux à Dudamel, même si, à la différence des chefs issus de la tradition de la Mitteleuropa, dont l’Américain Bernstein était aussi l’héritier, il oublie le côté Ländler du premier et le côté ironique du second. On y apprécie la clarté des plans et des couleurs, la qualité des pupitres aussi – plus frappante que dans le premier mouvement, où l’on gardait le souvenir de Cleveland. Le lied sur l’extrait du Zarathoustra de Nietzsche suspend ensuite magnifiquement le temps, avec le beau mezzo – mais assez froid – de Tamara Mumford, avant le « Bimm bamm » du Knaben Wunderhorn par le chœur de femmes et d’enfants, très réussi également – belle contribution des voix de Radio France. Le final laisse un peu sur sa faim, malgré sa superbe beauté plastique. Pas parce que le « langsam » n’est pas si « langsam », mais parce que l’on n’y sent pas une direction assez architecturée, comme dans le premier mouvement, ce qui émousse le grand crescendo vers la lumière de l’apothéose.
Didier van Moere
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