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Vous avez dit royal ? Paris
Cinéma MK2 Beaubourg
03/22/2016 - et actuellement sur les écrans
Royal Orchestra (Around the World in 50 concerts)
Un film de Heddy Honigmann (2014)
A quelques jours d’intervalle on a pu entendre in loco jouer la Passion selon saint Matthieu le fabuleux Orchestre royal du Concertgebouw d’Amsterdam (RCO) et voir au cinéma Royal Orchestra, le film qui lui est consacré à l’occasion de son cent-vingt-cinquième anniversaire. Vraiment royal!
Pour quelle raison le premier orchestre des Pays-Bas est-il labellisé «royal»? Parce qu’il est centenaire nous dit-on, mais assurément car son excellence mérite cette couronne qui, dans ce royaume unique, le rattache au cœur même de ses sujets. Un des trois meilleurs orchestres d’Europe, le RCO a célébré en 2013 son cent-vingt-cinquième anniversaire, à l’occasion duquel une tournée mondiale de grand prestige: cinquante concerts avec force solistes (Denis Matsuev, Janine Jansen...) sous la direction de Marris Jansons, son avant-dernier chef (ils n’ont été que sept en 127 ans). Le film Royal Orchestra, réalisé par la documentariste péruvienne d’origine néerlandaise Heddy Honigmann, rend compte de cet événement avec une originalité qui dépasse ce qui a jamais été fait.
Minutieusement préparé, le film, qui se concentre sur quatre étapes de la tournée, Buenos Aires, Soweto, Pretoria et Saint-Pétersbourg, invite des spectateurs privilégiés à raconter leur rapport à la musique et quelques musiciens choisis à partager une fraction de leur quotidien et, mieux encore, à faire partager leur enthousiasme pour leur profession. Certains sont des comédiens nés! On n’est pas près d’oublier le contrebassiste expliquer comme aucun musicologue ne le ferait la force de son intervention dans la Dixième Symphonie de Chostakovitch, le flûtiste qui avoue préférer la musique folklorique et le percussionniste raconter comment il survit à la Septième de Bruckner dans laquelle il n’a à jouer que l’unique coup de cymbales du deuxième mouvement!
Il y a des rencontres étonnantes, comme à Saint-Pétersbourg avec un rescapé des goulags à qui sa mère, qui avait vu Gustav Mahler diriger, a transmis son amour pour la musique, sa véritable planche de survie. Et ce chauffeur de taxi argentin persuadé qu’il se situe au-dessus de tous les autres car il écoute de la musique classique en roulant. Il y a bien sûr beaucoup de musique, et de l’excellente, dans cette fascinante heure et demie, mais les moments les plus émouvants ne sont pas toujours ceux que l’on attendrait. Il montre ce que – public gâté que nous sommes – oublions trop volontiers, que la musique à un tel niveau d’excellence, de professionnalisme et d’humanité peut apporter dans des lieux où elle n’existe pas ou bien sous d’autres formes. La confrontation est salutaire et explosive!
Olivier Brunel
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