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Passion et compassion Bruxelles Bozar (Salle Henry Le Bœuf) 03/11/2016 - Sofia Goubaïdoulina: Sieben Worte
Alexander von Zemlinsky: Psalm XXIII, opus 14
Karol Szymanowski: Stabat Mater, opus 53 Elzbieta Szmytka (soprano), Agnieszka Rehlis (mezzo), Andrzej Dobber (baryton), Kristina Blaumane (violoncelle), Elsbeth Moser (bayan)
London Philharmonic Orchestra and Choir, Vladimir Jurowski (direction)
V. Jurowski (© Drew Kelley)
La thématique de la passion et de la compassion parcourt la nouvelle édition du KlaraFestival, du 9 au 24 mars. Cette année, la programmation revêt donc une dimension spirituelle avec des œuvres aussi fortement contrastées que Water Passion de Tan Dun, le 19, avec le compositeur à la direction du Chœur de la Radio flamande et du Philharmonique de Bruxelles, et la Passion selon saint Matthieu de Bach, le 23, John Eliot Gardiner dirigeant les English Baroque Soloists et le Chœur Monteverdi.
Les deux semaines que durent le festival, un des plus importants consacrés à la musique en Belgique, tant par la qualité des interprètes que par l’exigence de la programmation, permettent, également, d’entendre des pages inspirées par la crucifixion: Les Sept Paroles du Christ sur la Croix de Haydn, dans la version pour orchestre, le 14, par Philippe Herreweghe à la tête de l’Orchestre des Champs-Elysées, et dans celle pour quatuor à cordes, le 18, par le Quatuor Kuss, Via Crucis de Liszt, le 22, avec le concours de Jan Michiels et d’Inge Spinette, Septem Verba a Christo de Pergolèse, le 12, par René Jacobs et l’Académie de musique ancienne de Berlin, et Sieben Worte Jesu (1982) de Sofia Goubaïdoulina ce vendredi. Cette très prenante composition d’une trentaine de minutes sollicite en permanence le violoncelle et le bayan qui jouent souvent à découvert, les cordes n’intervenant que parcimonieusement. Kristina Blaumane et Elsbeth Moser tirent de leur instrument de beaux et surprenants effets sonores et instaurent un intense climat spirituel et expressif que des quintes de toux viennent malheureusement perturber.
Autre genre à l’honneur durant cette édition: le Stabat Mater, avec celui de Pergolèse, également le 12 par René Jacobs, celui, très rare, de Schubert, le 21 mars, par Jérémie Rhorer et son Cercle de l’Harmonie, le concert se tenant à Anvers, et celui de Szymanowski (1926) ce soir. Sous la direction sobre, ferme et précise de Vladimir Jurowski, les Chœurs et l’Orchestre philharmoniques de Londres exécutent cette œuvre essentielle du compositeur polonais avec une incontestable justesse de style. L’interprétation, cependant, ne suscite pas l’émotion attendue, les musiciens, d’un professionnalisme incontestable, ne cultivant pas une identité sonore aussi prononcée que l’Orchestre royal du Concertgebouw, par exemple. Les solistes sont diversement appréciés. Seul le baryton, Andrzej Dobber, se démarque, la soprano, Elzbieta Szmytka, au timbre émacié, accusant quelque dureté dans l’intonation; la voix d’Agnieszka Rehlis, s’avère plus veloutée mais la mezzo a moins à accomplir.
Les choristes démontrent au préalable l’importance de leur savoir-faire dans le Psaume XXIII (1910) de Zemlinsky. Cette œuvre au ton pastoral constitue une découverte intéressante sans figurer, toutefois, parmi les plus intéressantes du compositeur, qui n’a de toute façon pas renouvelé le répertoire de la musique sacrée, tant s’en faut. Malgré le haut degré de finition de l’exécution et la cohérence du programme, un sentiment de frustration domine. Le concert ne permet pas de profiter de tout le potentiel de l’orchestre, à cause des œuvres, nécessairement, mais aussi de la durée, pause, changement de plateau et présentation compris. Les spectateurs, qui comptent de nombreux tousseurs indélicats, se relèvent déjà à 21 heures 55 alors que les Litanies à la Vierge Marie de Szymanowski auraient idéalement complété la soirée.
Le site de l’Orchestre philharmonique de Londres
Le site du KlaraFestival
Sébastien Foucart
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