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Piano racé

Paris
Salle Gaveau
03/11/2016 -  
Robert Schumann : Arabeske, opus 18 – Carnaval, opus 9
Mikalojus Konstantinas Ciurlionis : Préludes, VL 239, 294 & 197 – Nocturnes, VL 178 & 183
Serge Prokofiev : Sonate pour piano n° 6, opus 82

Mūza Rubackytė (piano)


M. Rubackytė (© Olivier Braive)


C’est toujours un plaisir d’anticiper un concert de piano ou de musique de chambre dans la salle Gaveau, idéale avec sa forme en boîte à chaussures et ses 1000 places. C’est aussi un déchirement de constater l’état de délabrement dans lequel elle est arrivée, quinze ans tout juste après la restauration à l’identique qui en a été faite à grands renforts de subventions publiques. Dans la salle, la peinture s’écaille par lambeaux, le hall d’entrée à lui seul donne envie de faire demi tour... Quant à l’accueil... On était surtout heureux de retrouver l’excellente pianiste lituanienne Mūza Rubackytė, qui se fait de moins en moins rare à Paris où elle réside en partie, se partageant avec son pays natal et la Suisse.


Programme passionnant et qui fait diversion avec Liszt qu’elle affectionne de jouer au concert. Schumann avec deux pièces contrastées: la très mélodique Arabesque et le Carnaval avec ses humeurs contrastées et son final qui est un quasi-mouvement de sonate. De la première, Mūza Rubackytė a fait chanter l’élégiaque et amoureuse cantilène et les développements romantiques. Du second, elle a donné une lecture exemplaire, renvoyant dos à dos les contrastes appuyés d’Eusébius et Florestan, faisant sienne cette succession d’humeurs fantasques et capricieuses. La palette de couleurs, la maîtrise rythmique, le souffle qui porte cette mosaïque pour en faire une seule et même entité forcent l’admiration. Rêvons d’un récital entièrement consacré à Schumann...


Grande patriote, Mūza Rubackytė ne manque pas une occasion de rendre hommage au compositeur lituanien Mikalojus Konstantinas Ciurlionis (1875-1911). Avec un éclairage de fond de scène vert, jaune et rouge aux couleurs de la Lituanie, elle a rendu justice quelques-uns de ses Préludes et Nocturnes, musique postromantique et de belle facture. Une aubaine penserait-on pour le public parisien d’entendre ce qui n’est pas monnaie courante. Ce n’était pas l’avis de tout le monde. Dans notre rang on feuilletait nerveusement les programmes, d’un côté, et rallumait les téléphones portables de l’autre...


De même, la Sixième Sonate de Prokofiev, composée peu de temps après son retour en U.R.S.S., ne court pas les programmes de récitals. Plus ceux des concours internationaux dans lesquels de jeunes fauves aux doigts infaillibles la joueraient les yeux bandés s’il le fallait. Mūza Rubackytė n’a certes pas le désir de cette virtuosité à fond de train et tout en s’y montrant aussi infaillible de doigts et de mémoire nous fait savourer les trésors musicaux, rythmiques et harmoniques que renferme ce bijou de la littérature pianistique soviétique. Tel un beau félin, elle passe de la sauvagerie sans brutalité des deux mouvements extrêmes aux caresses pour exalter le chant et les dissonances des mouvements centraux dansants et si proches mélodiquement de son Roméo et Juliette, de ce monument qu’avait créé le jeune Sviatoslav Richter en 1940 à Moscou.


Couverte de bouquets de fleurs, très élégamment vêtue de noir, Mūza Rubackytė a régalé son public de deux bis de Liszt: le Troisième des Rêves d’amour et la transcription de la «Mort d’Isolde» de Wagner. Las! Les portables étaient déjà rallumés, les conversations entamées. Y a-t-il un temps réglementaire aux récitals de piano et à la reconnexion à la vie réelle? Les artistes devront désormais faire avec les nouvelles addictions de leur public...


Le site de Mūza Rubackytė



Olivier Brunel

 

 

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