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Audacieuse ouverture de saison

Roma
Teatro Costanzi
11/27/2015 -  et 29 novembre, 1er, 3, 5, 10* décembre 2015
Hans Werner Henze : The Bassarids
Ladislav Elgr (Dionysus), Russell Braun (Pentheus), Mark S. Doss (Cadmus), Erin Caves (Tiresias), Andrew Schroeder (Capitaine de la Garde royale), Veronica Simeoni (Agave), Sara Hershkowitz (Autonoe), Sara Fulgoni (Beroe)
Coro del Teatro dell’Opera, Roberto Gabbiani (chef du chœur), Orchestra del Teatro dell’Opera, Stefan Soltesz (direction musicale)
Mario Martone (mise en scène), Sergio Tramonti (décors), Ursula Patzak (costumes), Raffaella Giodarno (chorégraphie), Pasquale Mari (lumières)


V. Simeoni (© Yasuko Kageyama/Opera Roma)


Après avoir été malmené à l’orée de la saison précédente par le départ précipité de Riccardo Muti, l’Opéra de Rome retrouve un dynamisme audacieux, et Carlos Fuentes, le sovrintendante du Teatro all’Opera, ouvre la saison avec la première romaine des Bassarides de Henze. Plus souvent associé à une tradition lyrique dominée par Verdi et Puccini qu’à la musique des soixante dernières années, le Teatro Constanzi n’a pas pour autant ignoré, au fil de son histoire, l’un des plus importants compositeurs d’opéra du vingtième siècle, aujourd’hui relativement négligé, du moins en France – l’opus inspiré par Les Bacchantes d’Euripide n’y a été pas été repris depuis sa création en 2005 au Châtelet, au cours d’une série chahutée par des grèves. En 1954, Boulevard Solitude était monté pour trois soirées, tandis qu’onze plus tard, en décembre 1965, Le Jeune Lord bénéficiait de quatre représentations. Avec six dates à l’affiche, la présente production confiée à Mario Martone plaçait la barre plus haut – et au vu du succès public, tant à l’aune des commentaires de sorties que du remplissage de la salle, fût-ce à coup de tarifs réduits, on ne peut que se réjouir de la réussite d’un pari que l’on pouvait tenir pour très risqué.


Conçue autour d’un panneau réfléchissant incliné, la mise en scène joue des effets des miroirs, de mystères et de troubles de l’identité qui innervent le drame. Si les costumes d’Ursula Patzak comme les décors dessinés par Sergio Tramonti, rehaussés par les lumières de Pasquale Mari, ne poursuivent pas une esthétisation archaïsante, le dispositif s’attache à faire incarner l’atemporalité du mythe. Sans verser dans une crudité gratuite, la violence n’est pas éludée, et la chorégraphie réglée par Raffaella Giordano en fait ressortir la puissance rituelle. Sur le mont Cythéron, la fascination pour Dionysos n’occulte pas les ramifications politiques de la force cultuelle, tandis qu’au quatrième mouvement, les relents d’ivresse d’où s’éveille Agave tenant la tête de son fils Pentheus mort qu’elle prend encore pour un lion ne négligent pas l’hémoglobine, tout en évitant l’excès factice autant que le minimalisme aseptisé.


En Dionysos, dissimulé d’abord sous l’anonymat de l’Etranger, Ladislav Elgr affirme une vigueur soumettant la séduction à une rudesse loin des tentations apolliniennes. Russell Braun démontre en Pentheus une admirable maîtrise de sa tessiture qui s’allonge jusqu’en des aigus à l’éclat de défi, celui du prince contre l’obscur envoûtement des morts et de l’Etranger. Mark S. Doss ne manque point de sagesse paternelle en Cadmus, souligné par des graves solides et équilibrés. Veronica Simeoni déploie remarquablement les tourments qui agitent la fragile complexité d’Agave. Erin Caves n’ignore pas l’ambiguïté presque bouffe de Tirésias, quand Andrew Shroeder concentre le sérieux du Capitaine de la Garde royale. Sarah Hershkowitz et Sara Fulgoni se complètent, respectivement Autonoe et Beroe. Sans oublier l’impact des chœurs, préparés avec attention par Roberto Gabbiani, il convient de saluer la direction de Stefan Soltesz, qui sait tirer d’une phalange sans doute modérément familière de ce répertoire une belle expressivité, soutenue par un souci de la caractérisation des registres de la partition. Sans atteindre l’anthologie, le résultat estimable encourage à venir découvrir le Benvenuto Cellini de mars prochain, autre temps fort d’une saison qui déjoue les réputations péninsulaires.



Gilles Charlassier

 

 

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