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La danse en écoute

Perpignan
Théâtre de l’Archipel
11/21/2015 -  
Gérard Grisey : Vortex Temporum
Bostjan Antoncic, Carlos Garbin, Marie Goudot, Cynthia Loemij, Julien Monty, Michaël Pomero, Igor Shyshko (danseurs)
Ensemble Ictus: Jean-Luc Plouvier (piano), Chryssi Dimitriou (flûte), Dirk Descheemaeker (clarinette), Igor Semenoff (violon), Jeroen Robbrecht (alto), Geert De Bièvre (violoncelle), Georges-Elie Octors (direction musicale)
Anne Teresa De Keersmaeker (chorégraphie, lumières), Luc Schaltin (lumières), Anne-Catherine Kunz (costumes), Bohana Cvejic (dramaturgie musicale)


Rendez-vous automnal de la musique contemporaine au cœur de ce que l’on pourrait appeler la Catalogne française, le festival Aujourd’hui musique de Perpignan sait mélanger genres et formats, pour atteindre un public large, au-delà des cloisonnements habituels. L’édition 2015 en témoigne, du concert «académique» au spectacle audiovisuel, en passant par la danse, sans oublier les apéritifs musicaux ou des expositions: la modularité du Théâtre de l’Archipel, dessiné par Jean Nouvel et inauguré en 2011, constitue le partenaire idéal pour une semaine imaginative de création qui se referme dans la grande salle du Grenat – du nom de la pierre dont se parent traditionnellement les femmes de la région – par Vortex Temporum, production chorégraphique d’Anne Teresa De Keersmaeker (sur la partition éponyme de Gérard Grisey), créée à la Ruhrtriennale en octobre 2013.


Partition majeure que l’on peut entendre à rebours comme le testament du compositeur français, qui décédera deux ans plus tard en 1998, Vortex Temporum s’élabore autour des multiples variations et transformations d’un arpège – extrait de Daphnis et Chloé de Ravel – jouant ainsi sur l’élasticité et les paradoxes dans la perception du temps. Autour des six musiciens de l’ensemble Ictus – rompu à ce répertoire avec autant de précision que d’engagement – auxquels s’ajoute la baguette communicative de Georges-Elie Octors – évoluent sept solistes de la compagnie Rosas d’Anne Teresa de Keersmaeker. La chorégraphe flamande, dont les parisiens ont pu apprécier le minimalisme esthétisant ces dernières années, entre autres à Garnier, construit une dialectique dynamique et équilibrée avec les notes, sans céder à la redondance.


Après une première partie aux fausses allures de concert, les instrumentistes s’effacent en coulisses pour laisser la place aux danseurs. Sans accompagnement sonore, le geste, d’une vitalité sensible, réussit le miracle de commenter, sinon de reconstituer dans l’espace nu, la partition entendue juste avant. Renouvelant l’adage de Balanchine, on voit la musique pendant que l’on écoute la danse. Les deux mondes se rejoignent ensuite, et l’on voit se former sept «couples» où les deux arts s’apparient en autant de «doubles», tandis que le tempo se distend. L’atmosphère se fait alors méditative, avant de reprendre le tissage du motif initial, dont le retour oscille entre mémoire et jubilation du présent. Architecture intellectuelle et sensualité immédiate semblent avoir trouvé dans ce Vortex Temporum posthume à deux voix, une alchimie originale, au-delà de la juxtaposition de deux langages à laquelle se résument souvent les créations chorégraphiques. Autant dire qu’Aujourd’hui musique sait réserver à son public des expériences singulières – n’est-ce pas la vocation d’un festival?



Gilles Charlassier

 

 

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