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De la Halle des sports à l’Usine Saint-Céré Halle des sports 08/03/2015 - et 6, 7, 8 juillet (Montpellier), 7, 11*, 15 août (Saint-Céré), 25, 26 septembre (Antibes) 2015, 4, 5 novembre (Clermont-Ferrand), 4, 6 (Massy), 18 (Les Sables d’Olonne) décembre 2016, 10 (Montmorillon), 28 (Coignères) novembre, 16 décembre (Yerres) 2017 Jacques Offenbach : La Périchole Héloïse Mas (La Périchole), Marc Larcher*/Pierre-Emmanuel Roubet (Piquillo), Philippe Ermelier (Le vice-roi), Eric Vignau (Don Pedro de Hinoyosa), Yassine Benameur (Le comte Miguel de Panatellas), Sarah Lazerges (Guadalena, Manuelita), Flore Boixel (Berginella, Ninetta), Dalila Khatir (Mastrilla, Brambilla), Antoine Baillet-Devalez (Le marquis de Tarapote, Le marquis de Santarem)
Chœur et Orchestre du festival de Saint-Céré, Jérôme Pillement (direction musicale)
Benjamin Moreau, Olivier Desbordes (mise en scène), Pascale Péladan (chorégraphie), Jean-Michel Angays (costumes), Elsa Belenguier (décor)
E. Vignau, P. Ermelier, Y. Benameur (© Nelly Blaya)
Coproduit avec Les Folies d’O (Montpellier) où il a été créé le mois dernier, La Périchole (1868/1874) est le nouveau spectacle lyrique de l’édition 2015 du festival de Saint-Céré. Comme Mozart et Verdi, Offenbach est presque chez lui dans le Lot, autant grâce à ses ouvrages les plus connus – Les Contes d’Hoffmann en 2008, La Belle Hélène, repris pour la dernière fois en 2012 – que par des découvertes stimulantes – Le Roi Carotte en 2008, puis Le Voyage dans la lune en 2014.
Sans qu’il soit aisé d’en identifier précisément les raisons, l’impression générale est toutefois que cette Périchole ne se situe pas tout à fait au niveau des quatre productions susmentionnées qui, il est vrai, avaient, chacune à sa manière, placé la barre très haut. Une première explication doit sans doute être recherchée dans le livret de Meilhac et Halévy, inégal et peut-être surtout hésitant quant au style – on se situe parfois très loin de l’opéra-bouffe, la mélancolie se mêlant à la légèreté et à la satire. Et les notes d’intention d’Olivier Desbordes et Benjamin Moreau, soulignant la dimension politique et contemporaine du propos, ne trouvent qu’assez marginalement une traduction dans leur mise en scène, bien plus allusive que celles du Roi Carotte ou même du Voyage dans la lune: le vice-roi déguisé en rappeur, par exemple, ou des textes légèrement actualisés comme le veut la tradition, tout cela ne va pas bien loin et l’on retient bien davantage l’interpolation inattendue de la scène de la pendaison manquée de Papageno dans La Flûte enchantée.
Serait-ce donc la faute à l’arrangement instrumental, dont le programme, au demeurant, ne précise pas l’auteur? Certainement pas, car Jérôme Pillement mène rondement son affaire; et puis Offenbach, aussi bien que Saint-Céré, en ont vu d’autres, même si l’effectif installé côté jardin de la Halle des sports, bien que de petite taille (flûte, hautbois, clarinette, trompette, trombone, accordéon, percussion et quintette à cordes), tend à couvrir les chanteurs et s’il faut ici ou là faire l’impasse sur la justesse.
Toujours est-il que la soirée ne semble décoller que vers le milieu du deuxième acte (couplets «Les femmes, il n’y a qu’ça»): on retrouve alors tout l’esprit vif, festif et burlesque du lieu. Les idées fusent, mises en valeur par les petites chorégraphies délibérément ridicules de Pascale Péladan, par les costumes décalés de Jean-Michel Angays, qui renouent avec les perruques et les touches de couleur du Voyage dans la lune, offrant une belle galerie de personnages secondaires, et par le décor à double détente d’Elsa Belenguier – l’en-bas bariolé du peuple ouvrier façon réalisme italien des années 1950 au premier plan et, sur des gradins derrière un rideau reproduisant un mur d’affiches politiques plus ou moins lacérées, l’en-haut en noir et blanc du pouvoir au second plan.
Pour le reste, le travail de troupe – à la fois musical et théâtral – si caractéristique du festival, des choristes jusqu’au rôle-titre, continue de susciter l’admiration. D’un point de vue strictement vocal, le niveau se révèle en outre excellent, qu’il s’agisse d’Héloïse Mas, Périchole au timbre enjôleur, à la diction impeccable et au phrasé onctueux, de Marc Larcher, Piquillo frais et de bon aloi, ou de Philippe Ermelier, vice-roi point trop caricatural. Le duo de Péruviens (à nattes) d’opérette formé par Eric Vignau et Yassine Benameur apporte un zeste de folie bienvenu, tandis qu’en cousines cabaretières puis en dames d’honneur, Sarah Lazerges, Flore Boixel et Dalila Khatir font preuve d’un abattage à toute épreuve.
A la fin de l’entracte, elles haranguent le public, n’hésitant pas à monter dans les tribunes pour se plaindre du froid alors que les spectateurs ont plutôt le sentiment de se trouver dans une étuve. Mais la résidence du festival dans la Halle des sports vit ses derniers jours: avec la réouverture du théâtre de l’Usine début 2016, ce sera, pour le public, l’assurance d’une climatisation salutaire et, bien plus, le couronnement d’un projet artistique de longue haleine, exemplaire de la manière dont une manifestation estivale s’est non seulement enracinée dans le paysage culturel local mais a contribué à le façonner durablement tout au long de l’année.
Le site de Jérôme Pillement
Le site d’Héloïse Mas
Le site de Philippe Ermelier
Simon Corley
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