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Magnificences classiques Colmar Chapelle Saint-Pierre & Eglise Saint-Matthieu 07/08/2015 - Chapelle Saint-Pierre
Joseph Haydn : Quatuor n° 47 en fa dièse mineur, opus 50 n° 4
Ludwig van Beethoven : Quatuor n° 13 en si bémol majeur, opus 130 (avec Grande Fugue, opus 133) Quatuor Zaïde: Charlotte Juillard, Leslie Boulin-Raulet (violon), Sarah Chenaf (alto), Juliette Salmona (violoncelle)
Eglise Saint-Matthieu
Joseph Haydn : Symphonies n°85 en si bémol majeur «La Reine de France» et n° 94 en sol majeur «La Surprise» – Concerto pour cor en ré majeur, Hob.VIId:3
Wolfgang Amadeus Mozart : Concerto pour clarinette en la majeur, K. 622
Romain Guyot (clarinette), Stanislav Davydov (cor)
Orchestre national philharmonique de Russie, Vladimir Spivakov (direction)
Rendez-vous incontournable du début d’été, le festival international de Colmar célèbre, pour sa vingt-septième édition, la mémoire de Maurice André. Si la trompette se trouve naturellement mise à l’honneur, entre autres pour le concert de clôture, le reste des cuivres ne manque pas à l’appel, à l’image du cor, qui, sous les doigts de Stanislav Davydov, permet d’entendre une rare pièce concertante que Haydn a consacrée à l’instrument. L’inventivité mélodique du Concerto en ré majeur respire une largeur de souffle, patente dans le lyrique Adagio, à laquelle la direction de Vladimir Spivakov n’est sans doute pas étrangère.
A la tête de l’Orchestre national philharmonique de Russie, le directeur artistique n’a cure des dynamiques parfois resserrées désormais usuelles dans le répertoire classique, et laisse s’épancher les couleurs de la formation avec une ampleur, sinon une placidité, qui appartient pour certains à l’histoire de l’interprétation. L’assise des timbres et des pupitres se distingue par son imperturbable aplomb, ménageant au fil des symphonies une appréciable homogénéité. La Quatre-vingt-cinquième «La Reine de France» ne verse jamais dans la pompe, équilibrant au fil de la partition la versatilité d’humeur si reconnaissable du compositeur – le Vivace initial le signale avec éloquence. On la retrouve dans une Symphonie «La Surprise» généreuse en sonorité, plus qu’en dramatisation peut-être, à l’instar d’un Andante un peu lisse pour faire sursauter des perruques qui, de toute manière, appartiennent à la muséologie.
V. Spivakov
Une telle facture ne se dément point dans le Concerto pour clarinette de Mozart. Romain Guyot détaille les inflexions de la partie soliste avec une remarquable précision, infléchissant avec un soin presque gourmand les détours du sentiment mozartien. Assurément, on goûte là d’éminentes qualités rhétoriques qui n’ont pas besoin du blanc-seing musicologique pour affirmer leur authenticité: la cadence en donne l’illustration, comme la poésie qui empreint le mouvement lent ou le tourbillon final.
Le répertoire de chambre n’est pas négligé, et l’excellent programme du Quatuor Zaïde vient le confirmer. Dans l’Opus 50 n° 4 de Haydn, les quatre musiciennes exaltent leur sens inné d’une plasticité du son dénuée de tout narcissisme. Nul besoin d’exagérer les contrastes pour impulser une évidente énergie au discours, qui sait se teinter d’une mélancolie furtive. Cet instinct de la continuité, l’Opus 130 de Beethoven le révèle à un degré encore supérieur. Sobrement, elles savent mettre en avant l’architecture de l’ouvrage. Le premier mouvement manifeste une clarté dans la construction que le Presto condense sans se contraction inutile. Les correspondances s’établissent naturellement avec l’Andante con moto comme l’Alla danza tedesca. La Cavatine exhale une grâce qui ne renie pas ce que l’on pourrait nommer sa féminité, quand le finale, dans sa version Grande Fugue, rayonne d’une polyphonie aussi accomplie que naturelle. Avec les Zaïde, l’exigence du quatuor à cordes ne sacrifie pas l’expressivité sur l’autel du didactisme, et Colmar y prête une oreille attentive.
Le site du festival international de Colmar
Gilles Charlassier
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