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Du cinématographe au ballet Paris Palais Garnier 05/28/2015 - et 29, 30 mai, 1er, 2, 3, 4, 5, 6 juin 2015 Les Enfants du paradis Mathieu Ganio*/Yannick Bittencourt/Stéphane Bullion (Baptiste), Karl Paquette*/Alessio Carbone/Josua Hoffalt (Frédéric Lemaître), Laëtitia Pujol*/Eve Grinsztajn/Amandine Albisson (Garance), Muriel Zusperreguy*/Christelle Granier/Mélanie Hurel (Nathalie), Vincent Chaillet*/Aurélien Houette/Audric Bezard (Lacenaire), Nolwenn Daniel*/Marine Ganio/Valentine Colsante (La ballerine), Benjamin Pech*/Alexis Renaud/Yann Saïz (Le comte), Stéphanie Romberg*/Caroline Bance (Madame Hermine), Charlotte Ranson*/Marion Barbeau (Desdémone), Ballet de l’Opéra national de Paris
Orchestre de l’Opéra national de Paris, Jean-François Verdier (direction musicale)
Marc-Olivier Dupin (musique), José Martinez (chorégraphie et adaptation), François Roussillon (adaptation), Ezio Toffolutti (décors), Agnès Letestu (costumes), André Diot (lumières)
M. Zusperreguy, M. Ganio (© Charles Duprat/Opéra national de Paris)
Etoile des plus remarquables du Ballet de l’Opéra national de Paris, José Martinez a aussi chorégraphié pour la première compagnie de France, et sa création éponyme de 2008 à partir du film de Marcel Carné Les Enfants du paradis en offre un admirable exemple qui revient sur la scène de Garnier pour une série de neuf représentations en cette fin de printemps. Mettre des pas sur le mythique ouvrage cinématographique, et les paroles de Prévert qui ne le sont pas moins, relevait assurément de la gageure ici relevée avec panache, et un jeu pantomimique habilement développé. Les caractères sont ainsi symbolisé autant par leur allure que leur costume: la robe de Garance ou la mélancolie lunaire de Baptiste. La présence significative de la foule dans l’original pelliculaire constitue un matériau de choix pour le corps de ballet, galbé, sinon sculpté, en des tableaux expressifs, autant dans son animation devant le théâtre du boulevard du Temple, que dans son immobilité pour mettre en valeur les protagonistes et leur intimité. L’écriture des ensembles se trouve alors à la croisée de la danse classique et des exigences narratives.
Ces dernières sont supportées par la partition de Marc-Olivier Dupin, mêlant adaptation de morceaux du répertoire à une création musicale originale aux frontières de la tonalité qui sert essentiellement la progression du drame, tandis que les citations et pastiches forment un écrin à des numéros de virtuosité ou d’émotion, à l’instar des arias et autres formes de la tradition lyrique, parmi lesquels le ballet de Robert Macaire au second acte sur des pages de Scarlatti orchestrées figure comme l’exemple le plus étendu. Loin de la menacer, cette hybridité nourrit la cohérence de l’œuvre, dans son alternance de formats et d’affects au fil des scènes. Soulignons également que les costumes sont dus à Agnès Letestu, qui trouve là un relais à l’une des passions, tandis que le tandis formé par André Diot aux lumières et Ezio Toffolutti aux décors réunit deux noms bien connus de l’Opéra de Paris.
Dans le vêtement de Baptiste créé par José Martinez, et dans lequel il fit ses adieux en 2011, Mathieu Ganio se glisse avec un naturel touchant. Le masque et le blanc de cet avatar de Pierrot lui siéent sans réserve, qu’il fait vivre avec une belle sensibilité au fil des spasmes sentimentaux qui l’agitent. En Garance, Laëtitia Pujol privilégie un certain monolithisme dolosif, qui contraste avec l’énergie de la Nathalie de Muriel Zusperreguy. Karl Paquette démontre une relative richesse de jeu en Frédéric Lemaître, que l’on retrouve pendant l’entracte au pied du grand escalier dans le mime d’Otello, avec Charlotte Ranson en Desdémone sensuelle et victime, prolongeant par cet intermède hors planches le théâtre dans le théâtre qui innerve la pièce. On relèvera le Comte de Benjamin Pech, désormais à l’heure des rôles de caractère qu’il incarne de manière convaincante, ainsi que la Madame Hermine redoutable de jalousie de Stéphanie Romberg. Mentionnons enfin la Ballerine dévolue à Nolwenn Daniel, qui se retirera du Ballet de l’Opéra avec ce même rôle.
Gilles Charlassier
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