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Lumineuse Irina Lungu

Roma
Teatro Costanzi
02/04/2015 -  et 5, 6, 7, 8* février 2015
Giuseppe Verdi : Rigoletto
Ivan Magrì*/Yosep Kang (Duc de Mantoue), George Petean*/Giovanni Meoni (Rigoletto), Irina Lungu*/Claudia Boyle (Gilda), Marco Spotti (Sparafucile), Anna Malavasi (Maddalena), Marta Torbidoni (Giovanna), Carlo Cigni (Comte de Monterone), Marco Camastra (Marullo), Pietro Picone (Matteo Borsa), Leo Paul Chiarot (Comte de Ceprano), Michela Nardella (Comtesse de Ceprano), Marika Spadafino (Un page), Francesco Luccioni (Un gardien)
Coro del Teatro dell’Opera, Roberto Gabbiani (chef du chœur), Orchestra del Teatro dell’Opera, Gaetano d’Espinosa (direction musicale)
Leo Muscato (mise en scène), Federica Parolini (scénographie), Silvia Aymonino (costumes, Alessandro Verazzi (lumières)


(© Yasuko Kageyama)


On avait salué en décembre dernier l’ouverture de saison avec Rusalka, double pari, au regard du titre comme des difficultés qui avaient mis en péril la survie de l’institution. Après Werther en janvier, la première place lyrique romaine poursuit sa programmation avec un ouvrage nettement plus familier du public italien, Rigoletto, quoiqu’absent du Teatro Costanzi pendant presqu’une décennie avant la nouvelle production de Leo Muscato étrennée en octobre dernier, et reprise en ce début février. Le premier maillon de ce qu’il est convenu d’appeler la «trilogie populaire» de Verdi prend ici le parti du dépouillement et de l’illusion théâtrale, faisant descendre des cintres les décors successifs. Ainsi, un simple rectangle de rideaux à l’enseigne illuminée au nom du duc de Mantoue signale la demeure du libertin, tandis que le procédé permet la juxtaposition des lieux et de la duperie dans l’enlèvement de Gilda. Cet alibi de transparence scénographique se retrouve dans le repaire de Sparafucile, sans pour autant convaincre sans réserve. On appréciera les lumières d’Alessandro Verazzi, galbant les espaces, à défaut de les habiter continûment.


Du moins le plateau vocal réserve-t-il de belles satisfactions avec la Gilda d’Irina Lungu, palpitant de fragilité par son émission aérienne qui ne se refuse aucune virtuosité, sans jamais verser dans l’ornementation gratuite. L’émotion et la cristallinité du timbre s’équilibrent harmonieusement dans le «Caro nome», sans affection aucune. Dans le rôle de Rigoletto, bouffon et père angoissé, George Petean appuie parfois la rugosité du personnage, privilégiant un registre aux confins du parler pour souligner l’impuissance, voire le désespoir, sans cependant sacrifier la densité vocale, plus proche souvent de l’expressivité que d’une certaine rondeur jugé par d’aucuns plus lyrique. Ivan Magri fait rayonner l’insouciance un rien manipulatrice du duc de Mantoue, qui s’imprime dans une lumière moins légère et évidente que d’autres gosiers légendaires, sans pour autant démériter. Marco Spotti se distingue en Sparafucile solide, inquiétant comme il sied, avec un matériau sans reproche que l’on retiendra. Anna Malavasi a pour Maddalena la couleur que l’on y attend. Marta Torbidoni confère à Giovanna la juste consistance, tandis que Carlo Cigni fait retentir en Monterone une puissance non monolithique. Marco Camastra et Pietro Picone forment en Marullo et Borsa une paire satisfaisante, quand Leo Paul Chiarot et Michela Nardella ne déparent nullement en Comte et Comtesse de Ceprano. Mentionnons encore les chœurs, préparés idiomatiquement par Roberto Gabbiani. Quant à la direction de Gaetano d’Espinosa, dont on attendait beaucoup, elle se révèle d’un métier accompli, ménageant la tension dramatique au fil de l’ouvrage, sans pour autant l’éclairer sous un jour absolument nouveau.



Gilles Charlassier

 

 

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