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Du théâtre à l’opéra

Vienna
Theater an der Wien
02/16/2015 -  et 18, 20, 23, 25, 27* février 2015
Giovanni Paisiello: Il barbiere di Siviglia
Topi Lehtipuu (Il conte di Almaviva), Mari Eriksmoen (Rosina), Pietro Spagnoli (Bartolo), Andrè Schuen (Figaro), Fulvio Bettini (Don Basilio), Erik Arman (Il Giovanetto), Christoph Seidl (Lo Svegliato)
Freiburger Barockorchester, René Jacobs (direction)
Moshe Leiser, Patrice Caurier (mise en scène), Christian Fenouillat (scénographie), Agostino Cavalca (costumes), Christophe Forey (lumières)


T. Lehtipuu, M. Eriksmoen (© Herwig Prammer)


On a aujourd’hui certes quelque peu oublié les partitions alternatives au Barbier de Séville de Rossini, qui, dès sa création en 1816, éclipsa celles de Nicolas Isouard (1796) ou de Giovanni Paisiello (1782). Cette dernière fut pourtant extraordinairement populaire dans toute l’Europe, comptant près de cent représentations dans la seule ville de Vienne dans les vingt ans qui suivirent sa composition. La musique est certes moins spectaculaire que celle d’un Rossini, plus unidimensionnelle que celle d’un Mozart (dont on reconnaît d’ailleurs, à plusieurs reprises – ce qui exclut le hasard – des emprunts, ou devrait-on dire des hommages, insérés dans ses propres opéras). Mais là n’est pas l’essentiel; il faut de fait l’écouter comme un écrin sonore à une pièce de théâtre. Et c’est exactement la vision proposée dans cette production du Theater an der Wien.


Dans la fosse, René Jacobs déploie son énergie habituelle pour tirer des gradations dynamiques au cordeau et ciseler des articulations millimétrées. Il guide toute son équipe à travers les écueils de la partition pour en révéler des moments de fulgurances inattendues. Sur scène, c’est une véritable production théâtrale qui voit le jour; le livret utilisé par Paisiello est très proche de la pièce originale de Beaumarchais – quatre actes, à peine raccourcis – et l’action file à toute allure. La scène du troisième acte où s’endort Bartolo est un résumé saisissant de la richesse des émotions suscitées par les interprètes. On sent brusquement un frisson traverser la salle, lorsque le comte Almaviva s’approche de Rosine et lui saisit la main. Le silence se fait. Un instant plus tard, on se tient les côtes de rire à l’écoute des petits cris de volupté des amoureux (musicalement fort savoureusement transcrits). Et finalement, on sursaute de frayeur au réveil du vieillard. On peut sans nul doute ressentir, grâce à la fraîcheur de l’interprétation, les mêmes frissons que ceux du public deux siècles auparavant.


Les chanteurs sont tous impeccables: un Figaro (Andrè Schuen) de première classe, vocalement agile et scéniquement engagé, qui incarne au sens propre son personnage. Pietro Spagnoli en Bartolo propose une interprétation puissante, sans caricature. Mari Eriksmoen est une Rosine versatile, qui sait alterner en un clin d’œil entre la jeune fille naïve et l’amoureuse éperdue. Topi Lehtipuu (comte Almaviva) est moins universel; sans véritablement décevoir, son invariable attitude de grand dadais un peu raide confère moins de richesse scénique au personnage.


Ajoutons à cela une lumière magnifique, qui donne à la scène un cachet de toile de Hopper, se combinant idéalement avec les costumes et décors des années 1940. On assiste donc à une magnifique redécouverte, qu’une simple audition au disque ne pourrait qu’improbablement distinguer.



Dimitri Finker

 

 

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