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Roméo im Cabaret Lyon Théâtre de la Croix-Rousse 02/24/2015 - et 26, 27*, 28 février, 1er, 3, 4 mars 2015 Boris Blacher : Romeo und Julia (création française) Tyler Clarke (Roméo), Laure Barras (Juliette), April Hailer (La diseuse, La nurse, Peter), Alix Le Saux (Lady Capulet), Robert Macfarlane (Tybalt), Thibault de Damas (Capulet, Benvolio)
Chanteurs du Studio de l’Opéra de Lyon, Orchestre de l’Opéra de Lyon, Philippe Forget (direction musicale)
Jean Lacornerie (mise en scène), Lisa Navarro (décors), Robin Chemin (costumes), David Debrinay (lumières), Raphaël Cottin (chorégraphie)
(© Bertrand Stofleth)
Plus réputé comme pédagogue que comme compositeur, l’Allemand Boris Blacher (1903-1975) a formé de nombreux disciples dont les plus connus ont pour nom Aribert Reimann, Gottfried von Einem, Claude Ballif, Marius Constant... Il eut les ailes brisées par l’arrivée du nazisme, qui le mit sur la liste des compositeurs de «musique dégénérée», et écrivit, durant son exil intérieur, notamment ce Roméo et Juliette en 1943-1944, dont l’Opéra de Lyon offre la création française. Blacher réduisit lui-même très respectueusement le livret, en anglais, à sa substance principale et en réalisa une version musicalement légère, courte (soixante-quinze minutes) adaptée, à l’instar de L’Histoire du Soldat de Stravinsky, à la production itinérante, de tréteaux. Sept chanteurs, neuf musiciens, un piano et un curieux mais efficace recadrage dans le contexte du cabaret berlinois avec une meneuse de revue qui chante, en allemand, quelques songs semblant sortis de chez Kurt Weill. Le langage use de polytonalité et parfois de dodécaphonisme, mâtiné de jazz avec une orchestration très légère («Petit, tu ne dois jamais doubler un instrument» professait-il au jeune Marius Constant).
C’est au Théâtre de la Croix-Rousse, avec qui le spectacle est coproduit, que l’Opéra de Lyon a programmé cette création originale et c’est le directeur de cette maison, Jean Lacornerie, qui en a réalisé la mise en scène. Réalisation extrêmement efficace, dans une scénographie assez réaliste et économe de Lisa Navarro, à qui on reprochera tout de même de reléguer le petit orchestre en retrait du décor et à l’arrière de la scène, au détriment de l’efficacité de cette orchestration minimale parfaitement menée par le chef Philippe Forget, et ceci dans un théâtre de bonnes proportions.
Ce sont les chanteurs du Studio de l’Opéra de Lyon, dont Jean-Paul Fouchécourt est le directeur artistique, qui assurent cette production avec beaucoup d’enthousiasme et de talent, notamment pour les protagonistes, Tyler Clarke et Laure Barras, et bien sûr la diseuse April Hailer, actrice et chanteuse tout à fait dans l’esprit de cabaret berlinois. Mais la musique de ce Roméo et Juliette de chambre n’arrive pas à la hauteur de celles, pour parler de contemporaines, de Weill, Krenek et Hindemith et sachant qu’à la création scénique au Festival de Salzbourg de 1950, les interprètes en étaient Hilde Güden et Hermann Uhde, on se prend à rêver que l’Opéra de Lyon ait pour cette création réalisé un projet plus ambitieux dans le cadre du festival d’opéra par exemple, avec des interprètes de plus grande pointure.
Olivier Brunel
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