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La tradition a parfois du bon Liège Opéra royal de Wallonie 12/20/2014 - et 21*, 23, 26, 27, 28, 30, 31 décembre 2014, 2 (Liège), 10 (Charleroi) janvier 2014 Giacomo Puccini: Tosca Barbara Haveman/Isabelle Kabatu* (Tosca), Marc Laho/Calin Bratescu* (Mario Cavaradossi), Ruggero Raimondi/Pierre-Yves Pruvot* (Scarpia), Roger Joakim (Cesare Angelotti), Laurent Kubla (Il Sagrestano), Giovanni Iovino (Spoletta), Marc Tisson (Sciarrone), Pierre Gathier (Un Carciere), Gaby Cocina/Juliette Dejardin/Charlotte Louis (Un Pastorello)
Maîtrise de l’Opéra royal de Wallonie, Jean-Claude Van Rode (chef de la Maîtrise), Chœurs de l’Opéra royal de Wallonie, Marcel Seminara (chef des chœurs), Orchestre de l’Opéra royal de Wallonie, Paolo Arrivabeni*/Cyril Englebert (direction)
Claire Servais (mise en scène), Carlo Centolavigna (décors), Michel Fresnay (costumes), Olivier Wéry (lumières)
I. Kabatu, P.-Y. Pruvot (© Jacky Croisier)
L’Opéra royal de Wallonie reprend sa Tosca de 2007 pour les fêtes de fin d’année : un spectacle cohérent, lisible et respectueux des conventions. La scénographie ne réserve aucune surprise et se conforme à l’idée que la plupart se forgent de l’opéra de Puccini : des décors réalistes, des costumes d’époque et des lumières étudiées pour que le noir domine. La production mélange les ingrédients nécessaires à une bonne Tosca – faste, intensité, intimisme, perversion, violence – sans négliger la dimension religieuse. Le Christ sur la croix au deuxième acte souligne ainsi la dévotion du chef de la police et la foi de la cantatrice. Le château Saint-Ange s’avère trop fruste et schématique, comme si le théâtre disposait de moins de moyens après un premier acte grandiloquent, mais le ciel demeure d’une grande beauté. La mise en scène de Claire Servais s’appuie sur une direction d’acteur compétente bien que le troisième acte, plus délié, moins intense, peine à convaincre, au contraire du deuxième, tendu et captivant.
Le théâtre liégeois peut se prévaloir de disposer d’un directeur musical digne de ce nom en la personne de Paolo Arrivabeni. L’orchestre se montre uni, s’approprie le drame au plus près et affiche un niveau remarquable, bien que les cordes aient paru imprécises et hésitantes à un moment au troisième acte. Le chef, qui obtient des musiciens de beaux effets dans les moments plus évocateurs, choisit convenablement les tempi pour que le drame progresse sans jamais s’appesantir et ajuste la dynamique pour que les chanteurs s’imposent sans forcer leur voix.
Isabelle Kabatu se profile en authentique tragédienne. La chanteuse belge ne possède pas la plus belle des techniques et le plus irréprochable des styles mais elle transcende sa voix en s’investissant entièrement dans le personnage de Tosca dont elle éclaire les différentes facettes. Le timbre séduit, surtout dans le grave, au contraire de celui, plus quelconque, de Calin Bratescu, qui chante Cavaradossi avec le minimum d’élégance et de sensibilité. Le ténor roumain, qui paraît même niais à côté de la Tosca grande dame de Kabatu, chante correctement mais sans l’aura de sa partenaire et de Pierre-Yves Pruvot, qui confèrent davantage de profondeur à leur personnage. Le baryton français campe un Scarpia que l’on aime détester grâce à une forte présence scénique, une diction mordante, un timbre de grande beauté et une ligne de chant remarquable – Ruggero Raimondi, qui retrouve ce personnage pour cinq représentations, conjugue-t-il aujourd’hui toutes ces qualités ?
Les rôles secondaires s’avèrent remarquablement tenus, en particulier le solide Angelotti de Roger Joakim et le Sacristain finement caractérisé de Laurent Kubla. Préparés par Marcel Seminara, toujours fidèle au poste, les chœurs chantent comme à leur habitude avec force et conviction. Le programme gratuit de cinquante-neuf pages comporte pas moins de quatre textes rédigés par deux musicologues mais il ne contient une fois de plus aucune biographie des interprètes. Une bonne résolution pour l’année prochaine : que l’Opéra royal de Wallonie incorpore de nouveau dans le programme une présentation, même succincte, des artistes qui portent ses productions sur leurs épaules.
Sébastien Foucart
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