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Une création abyssale

Montpellier
Opéra Comédie
11/19/2014 -  et 20, 21, 22 novembre 2014
Mathis Nitschke : Happy Happy (création)
Karen Vourc’h (soprano), Solistes du chœur: Véronique Parize (soprano), Alexandra Dauphin (mezzo-soprano), Siegfried Bernard Polvara (ténor), Xin Wang (baryton basse), Ida Dudenhoeffer, Abel Divol (figurants)
Chœurs de l’Opéra national Montpellier Languedoc-Roussillon, Noëlle Gény (chef de chœur), Orchestre national Montpellier Languedoc-Roussillon, Arno Waschk (direction musicale)
Urs Schönebaum (conception et lumières), Alma Terrasse (assistante à la mise en scène), Mathis Nitschke (direction du son)


(© Marc Ginot)


Pour ceux qui auraient manqué Jetzt la saison dernière,Happy Happy offre une belle séance de rattrapage pour découvrir le talent de Mathis Nitschke. Le précédent opus rassurait déjà les oreilles rétives à la contemporanéité atonale et conceptuelle, où l’économie de l’inspiration le disputait à la puissance rythmique. La recette que l’on ne soupçonnait pas nécessairement comme expérimentale atteint avec cette seconde commande de Jean-Paul Scarpitta sa vitesse de croisière. Plus qu’un opéra, la structure en quinze numéros se veut, selon les mots même du musicien allemand, l’héritière des soirées de lieder, reliés entre eux par des récurrences thématiques, même si le fond ne suit guère l’intention formelle.


La composition atteint ici son degré premier, et le plus bas, celui de l’assortiment de motifs tirés du répertoire, à la façon d’un bouquet musical. La quatrième pièce en donne un effarant condensé, mêlant à la façon d’un banal DJ le Rex tremendae du Requiem de Mozart au Dies irae de celui de Verdi, avec un zeste de Huitième de Schubert, quand un peu plus loin, le «Vissi d’arte» de Puccini est textuellement cité. L’esthétique du collage, passablement dépassée aujourd’hui, n’a en soi rien de condamnable, mais tout le monde n’a pas le talent de Berio – sans compter un métier balbutiant, plus apte à organiser un quizz qu’une exploration de la mémoire musicale. Le livret, si la chose peut encore en avoir le nom, se résume à une compilation de citations du panthéon littéraire et philosophique – Rilke, Giraudoux, Kant, Gandhi, etc. – réduites ici à des platitudes bien-pensantes.


Du moins le chœur dispose-t-il d’une partie où il peut se mettre en valeur, et quatre des solistes profitent d’une tribune plus marquée – Véronique Parize, Alexandra Dauphin, Siegfried Bernard Polvara et Xin Wang. Le dixième numéro, énumérant des rêves où les généralités morales s’acoquinent avec la trivialité matérielle, fait passer les effectifs devant le micro en un rituel inconscient de sa propre parodie. Karen Vourc’h se donne plus en spectacle qu’en voix, quand bien même la présence théâtrale ne lui fait aucunement défaut. La facilité de ce juke-box présente au moins l’avantage d’être aisé à suivre – et sans doute à diriger pour Arno Waschk –, et s’avère presque digeste si l’on renonce à y rechercher quelque authenticité artistique. Ponctué par des néons qui montent et descendent des cintres, meublant le noir irrévocable du plateau, le produit aurait droit à la consommation s’il ne gaspillait pas des ressources publiques mises en danger à l’heure actuelle. A en juger le travail qu’elle a réalisé à Nancy, on ne doute pas que Valérie Chevalier redonnera à la parole à la véritable création lyrique sur la scène montpelliéraine.



Gilles Charlassier

 

 

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