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Comique... troupier

Paris
Opéra-Comique
11/13/2014 -  
«Si l’Opéra-Comique m’était conté»
Anna Caterina Antonacci, Sabine Devieilhe, Julie Fuchs, Patricia Petibon (sopranos), Frédéric Antoun (ténor), Stéphane Degout, Vincent Le Texier (barytons), Jérôme Deschamps, Christian Hecq, Julien Lubek (comédiens), Académie de l’Opéra-Comique: Sandrine Buendia (soprano), Eléonore Pancrazi (mezzo), Ronan Debois (baryton), Vianney Guyonnet (baryton-basse)
Chœur de chambre accentus, Orchestre Les Siècles, François-Xavier Roth (direction musicale)
Michel Fau (mise en scène), Emmanuel Charles (scénographie et costumes)


(© Pierre Grosbois)


Soirée de gala place Boieldieu pour fêter, avec «Si l’Opéra Comique m’était conté», le tricentenaire d’une des trois plus anciennes institutions culturelles parisiennes avec l’Opéra de Paris et la Comédie-Française. Peu de people, l’endroit est moins glamour que le Palais Garnier, mais ministre, ancien ministre, probables futurs ministres ou ministrables et mécènes se pressaient pour la fête, deux heures ininterrompues de spectacle suivies d’un dîner de gala pour les mécènes. Chargé de la mise en scène, et travesti successivement en Carmen et en Mélisande, Michel Fau aura fait tordre de rire ce Tout-Paris de la Culture avec la complicité du directeur sortant Jérôme Deschamps et les comédiens Julien Lubek et Christian Hecq de la Comédie-Française.


Il est probable que raconter trois cent ans, même avec des raccourcis, d’une histoire aussi compliquée que celle de l’Opéra-Comique, parti sous Louis XIV d’une troupe de forains et ayant donné à la musique française tous les chefs-d’œuvre que l’on sait, aurait été, sans une certaine dose d’humour, extrêmement ennuyeux. L’option tout à fait légitime de la faire dans un style décontracté, à la manière d’une bande dessinée, avec une iconographie d’époque et des vidéos très ingénieuses et surtout une illustration musicale de très grande qualité, était certainement le meilleur moyen de le faire passer. L’option comique troupier, humour potache, avec des parodies de Carmen et Pelléas à la façon de Charpini et Brancato (sans la discipline vocale que cela suppose) qu’ont choisie Michel Fau et Jérôme Deschamps (option qui avait déjà quelque peu entaché la récente Ciboulette, succès de la saison 2012-2013) était déjà plus risquée, surtout s’adressant à un parterre comptant les autorités en matière de subventions, sponsors, mécènes et officiels de la Culture. Une façon, peut-être de jouer sur le mot «comique», en tout cas une franche affirmation de la façon de traiter ce comique-là.


Raconter l’Opéra-Comique en deux heures était sans doute ambitieux mais ce fut réussi! La narration a passé rapidement sur les deux premiers siècles pour s’attarder sur le plus riche XIXe et le début du XXe, Sans complaisance pour les injustices et erreurs des directeurs successifs (l’éviction de Wagner, les mauvais traitements et muselages infligés à Berlioz et Bizet) et avec toujours un très bon sens didactique.
Le tour de force de présenter des exemples musicaux, toujours bien choisis, et de les faire défendre à brûle-pourpoint par des interprètes appropriés a presque toujours été bien réalisé. D’un quatuor de jeunes interprètes, choisis dans les récentes promotions de l’Académie de l’Opéra-Comique, à la vedette absolue qu’est le soprano italien Anna Caterina Antonacci en passant par toute une école actuelle de jeunes interprètes français, c’était un panorama du chant français plutôt en bonne forme, un bulletin de santé très rassurant.


Quelques très grands moments avec la Marguerite de Berlioz d’Antonacci, son «D’amour l’ardente flamme» réellement brûlant, comme plus tard une Habanera de Carmen (dans le costume original de la créatrice...) et dans un très large extrait de La Voix humaine de Poulenc, dans un français châtié à l’extrême, pas seulement par la prononciation mais aussi pour le signifié des mots, un exemple pour toute cette génération. Déjà reconnus comme interprètes exceptionnels de ce répertoire, Patricia Petibon faisait merveille (attifée elle aussi dans un costume impossible) dans le Cours-la-Reine de Manon et le duo de Saint-Sulpice (malheureusement avec Frédéric Antoun, un plus faible Des Grieux), Stéphane Degout exceptionnel dans Pelléas (aux côtés du Golaud de Vincent Le Texier, pas dans sa meilleure forme et hors sujet dans «Scintille diamant») et délivrant, dans Mârouf, sinon une caractérisation idéale du personnage au moins une magistrale leçon de chant français. Magnifique aussi la performance de Sabine Devieilhe très applaudie dans «Les oiseaux dans la charmille» des Contes d’Hoffmann et dans l’«Air des clochettes» de Lakmé. Très beau final en tutti avec la Barcarolle des Contes d’Hoffmann.


L’Orchestre Les Siècles dirigé par François-Xavier Roth a assuré le liant avec une incontestable versatilité mais pas toujours le même bonheur stylistique. Plusieurs numéros étaient sur ce point très à côté, comme le Prélude de Carmen et l’accompagnement de La Fille du régiment, nuisant singulièrement à la prestation de Julie Fuchs dans le «Salut à la France», et aussi par le choix des tempi dans Manon. Le chœur accentus a apporté le soutien nécessaire à tous ces interprètes avec beaucoup de soin et d’efficacité.



Olivier Brunel

 

 

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