About us / Contact

The Classical Music Network

Tours

Europe : Paris, Londn, Zurich, Geneva, Strasbourg, Bruxelles, Gent
America : New York, San Francisco, Montreal                       WORLD


Newsletter
Your email :

 

Back

Une belle ouverture de saison

Tours
Grand Théâtre
10/10/2014 -  et 12, 14 octobre 2014
Wolfgang Amadeus Mozart : Così fan tutte, K. 588
Vannina Santoni (Fiordiligi), Carine Séchaye (Dorabella), Catherine Dune (Despina), Sébastien Droy (Ferrando), Alexandre Duhamel (Guglielmo), Franck Leguérinel (Don Alfonso)
Chœurs de l’Opéra de Tours et chœurs supplémentaires, Emmanuel Trenque (direction des chœurs), Orchestre symphonique Région Centre-Tours, Jean-Yves Ossonce (direction musicale)
Gilles Bouillon (mise en scène), Nathalie Holt (décors), Marc Anselmi (costumes), Marc Delamézière (lumières), Bernard Pico (dramaturgie), Edouard Bonnet (vidéo)


(© François Berthon)


Sous son apparente légèreté dramatique, Così fan tutte n’est pas l’ouvrage de Mozart le plus aisé à réussir. Les régies assises sur un concept y perdent généralement très vite leur fertilité autoproclamée. Sans se confire dans une évocation napolitaine, ni quelque hasardeuse coquetterie dix-huitiémiste, la mise en scène de Gilles Bouillon s’ouvre autour d’une table de billard, symbole du pari entre Don Alfonso et le deux jeunes gens qui constitue l’armature de la démonstration de Da Ponte: si la fidélité n’est pas une vertu humaine, elle ne disqualifie pas la sincérité des sentiments et de l’attachement. La direction d’acteurs, fluide et naturelle, se met au service de l’effet musical, éclairant avec netteté les duos, en particulier dans les ensembles, ainsi mis en miroir et en comparaison.


A ce titre, la direction aussi allante que précise de Jean-Yves Ossonce constitue un remarquable écrin au propos dramaturgique. Attentif à la clarté comme à l’expressivité des pupitres, le chef français s’appuie sur la dernière édition de la partition avec une rigueur musicologique qui n’a cure des postures et chapelles baroqueuses. Nul besoin d’étaler ce travail, il innerve spontanément une battue à la mesure des remarquables musiciens de l’Orchestre symphonique Région Centre-Tours. Ici, dynamique et vitalité ne se confondent pas avec précipitation. Les chœurs, préparés par Emmanuel Trenque, ne diront pas le contraire.


Les solistes, non plus. Vannina Santoni offre une Fiordiligi à la mesure des contrastes qui jalonnent une psychologie tourmentée, sans afféterie. La Dorabella de Carine Séchaye dégage une énergie contagieuse et rehausse un timbre parfois monochrome, mais efficace. Despina d’expérience complice d’Alfonso plutôt que jouvencelle, Catherine Dune réserve une composition aboutie et bien audible, même dans les accents contrefaits du docteur et du notaire, çà et là un peu délicats. Cela change agréablement des blancs colibris, à la jeunesse volontiers discutable, que l’on a coutume de distribuer dans ce rôle. Côté messieurs, les satisfactions ne sont pas moindres. Si le Ferrando lumineux de Sébastien Droy gagne en assurance au fil de la soirée, Alexandre Duhamel affirme d’emblée en Guglielmo une voix solide. La présence théâtrale domine l’instinct des nuances et ne s’effraie du virtuose air, tant en termes de chant que de jeu, que Jean-Yves Ossonce a voulu réhabiliter – «Rivolgete», en lieu et place de l’usuel, et plus bref, «Non siate ritrosi» –, l’estimant, à juste titre, plus proche des intentions profondes de Mozart, qui l’a d’ailleurs repris pour un air de concert. Quant à Franck Leguérinel, l’autorité de son Don Alfonso se passe sans peine d’une plénitude vocale de toute façon révolue.


A rebours de médiatisations dispendieuses, l’Opéra de Tours témoigne avec cette ouverture de saison d’un artisanat accompli, condition indispensable à la pertinence et à la réussite artistiques. Le budget n’a de valeur que si on sait s’en servir, telle est la leçon tourangelle.



Gilles Charlassier

 

 

Copyright ©ConcertoNet.com