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Parfum de nostalgie sur La Bohème

Bordeaux
Grand-Théâtre
09/26/2014 -  et 28, 29, 30 septembre, 1er, 2, 3, 5, 6*, 7 octobre 2014
Giacomo Puccini : La bohème
Sébastien Guèze*/Dimitri Pittas (Rodolfo), David Bizic*/Thomas Dollié (Marcello), Nahuel di Pierro*/Vincent Pavesi (Colline), Riccardo Novaro (Schaunard), David Ortega (Benoît), Nathalie Manfrino*/Elaine Alvarez (Mimi), Georgia Jarman*/Mélody Louledjian (Musetta), Jean-Philippe Marlière (Alcindoro), Alexis Defranchi*/Bruno Moga (Parpignol), Jean-Philippe Fourcade (Un sergent des douanes), Jean-Marc Bonicel (Un douanier), Olivier Bekretaoui (Un marchand)
Chœur de l’Opéra national de Bordeaux, Jeune Académie vocale d’Aquitaine, Salvatore Caputo (direction des chœurs), Orchestre national Bordeaux Aquitaine, Paul Daniel (direction musicale)
Laurent Laffargue (mise en scène), Clovis Bonnaud (reprise de la mise en scène), Philippe Casaban, Eric Charbeau (décors), Hervé Poeydomenge (costumes), Patrice Trottier (lumières)


N. Manfrino, S. Guèze (© Guillaume Bonnaud)


A rebours du misérabilisme qui prévaut généralement dans les mises en scène de La Bohème, Laurent Laffargue a choisi l’évocation nostalgique en transportant la jeunesse de Murger quelque part entre les années 1960 et 1970, les dernières sans doute où le dénuement matériel estudiantin et artiste ne se limite pas à sa dimension socio-économique. Le général de Gaulle discourt muettement dans le tube cathodique chez Momus, tandis que le cabaret «La Bohème» où Musetta et Marcello travaillent au troisième acte prend les codes visuels de la fin de la décennie suivante, si ce n’est un peu plus, quand sur le mur de la colocation se distinguent une affiche libertaire assimilant SS et CRS et une toile rouge lacérée reproduisant le geste de Fontana. Les fragrances de souvenirs d’adressent ainsi à un faisceau générationnel large, presque semblable à celui du Grand-Théâtre de Bordeaux. Dans ce bric-à-brac mémoriel, la tristesse le cède à la tendresse, adoucissant sans doute la pesanteur dramatique qui entoure le destin de Mimi, comme elle allège le pittoresque désuet encombrant souvent le début de l’ouvrage – surtout le deuxième acte.


Revenant sur les planches girondines sept ans après la création de la production, ici reprise avec tact par Clovis Bonnaud, Nathalie Manfrino fait entendre une indéniable maturation dans sa caractérisation de Mimi, sans en sacrifier la jeunesse. D’autant que les infidélités du vibrato ne sont plus qu’un mauvais souvenir pour la soprano française, laquelle ne se contente pas d’une émission stable et homogène, et donne à son personnage une intensité sincère et touchante, qui n’a pas besoin d’excès pour exprimer sa générosité naturelle. La bénédiction vocale s’étend à Sébastien Guèze, Rodolfo jouant les matamores jaloux pour dissimuler sa timidité et son inquiétude. L’incarnation affirme une présence authentique et équilibrée, qui s’accommode sans peine d’un timbre manifestement plus à l’aise chez Puccini qu’en d’autres répertoires. A côté d’un des plus crédibles couples Mimi-Rodolfo du moment, celui formé par David Bizic et Georgia Jarman, Marcello et Musetta, ne dépare pas, même si le premier privilégie parfois la solidité et la seconde la coquetterie, réservant la subtilité pour la dernière scène où elle manifeste sa profonde bonté. Nahuel di Pierro s’acquitte honorablement des interventions de Colline, tout comme Riccardo Novaro en Schaunard. David Ortega offre une composition réussie en Benoît. Evoquons encore les apparitions de caractère, bien en place: Jean-Philippe Marlière, Alcindoro mené en bateau; Alexis Defranchi, Parpignol; Jean-Philippe Fourcade, un sergent des douanes; Jean-Marc Bonicel, un douanier, et Olivier Bekretaoui, un marchand.


En ouverture de sa deuxième saison à la tête l’Orchestre national Bordeaux Aquitaine – et pour sa première production lyrique in loco –, Paul Daniel témoigne d’une lecture intelligente de la partition de Puccini, qui ne dédaigne pas de faire entendre un héritage germanique, voire wagnérien, digéré d’une manière originale. Plus qu’un simple accompagnement, les textures, et en particulier les cordes, déploient une cohérence et une couleur qu’il fait plaisir d’entendre dans la fosse bordelaise, comme dans un tel répertoire. Saluons enfin la performance du chœur de la maison, préparé par Salvatore Caputo, et de la Jeune Académie vocale d’Aquitaine.



Gilles Charlassier

 

 

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