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Exaltant Giulio Prandi! Ambronay Abbatiale 09/27/2014 - et 22 novembre 2014 (Pavia) Niccolò Jommelli : Beatus Vir en la majeur
Georg Friedrich Haendel : Dixit Dominus, HWV 232 Rachel Redmond (soprano), Marta Fumagalli (alto)
Ghislieri Choir and Consort, Solistes: Mara Corazza, Caterina Iora, Karin Selva (sopranos), Xavier Hetherington (ténor), Renato Dolcini (basse), Giulio Prandi (direction)
G. Prandi
Pour la trente-cinquième édition, les festivités se bousculent à Ambronay pour célébrer les anniversaires d’un grand nombre de compositeurs baroques: Jean-Philippe Rameau, Jean-Marie Leclair, Pietro Locatelli, Niccolò Jommelli et Carl Philipp Emanuel Bach. Une initiative habituelle au fil des ans, certes, mais on se réjouira toujours de ce type de manifestations, si tant est qu’elles ne se bornent pas à circonscrire les œuvres entendues aux sempiternels «tubes» du répertoire. Rien de tel, fort heureusement, avec «l’année Rameau». Un simple parcours des programmations à travers la France permet de se convaincre de la chance de pouvoir découvrir la quasi-totalité de son œuvre, plus seulement au disque mais sur la grande scène du spectacle vivant. Pour les autres compositeurs, plus rares au concert, les occasions restent moins nombreuses, même si l’on sait pouvoir faire confiance à Ambronay pour se tourner vers d’évidents spécialistes.
Pour le trois centième anniversaire de la naissance de Niccolò Jommelli (1714-1774), parfait contemporain de C. P. E. Bach et Gluck, le festival d’Ambronay a fait appel à l’un des jeunes ensembles très en vue en ce moment: le Ghislieri Choir and Consort. Basée à Pavie, ville moyenne située à une trentaine de kilomètres au sud de Milan, la formation a été fondée en 2003 par Giulio Prandi. Après avoir déjà enregistré trois disques remarqués pour DHM/Sony, tous centrés sur le répertoire de la musique religieuse italienne du XVIIIe siècle, Prandi sillonne désormais les festivals, comme récemment encore à la Chaise-Dieu et à Besançon. Ces manifestations proches géographiquement se sont accordées pour proposer des programmes différents lors de ces trois dates. Une gageure rendue possible grâce à l’énergie et à la formidable curiosité intellectuelle de ce chef né en 1977, qui devrait graver prochainement la musique religieuse du jeune Mozart. A Ambronay, associé au Dixit Dominus de Haendel (l’une des œuvres les plus brillantes de son auteur), Prandi ose le Beatus Vir de Jommelli, compositeur peu connu du grand public.
Très célèbre en son temps, le Napolitain a fait carrière dans toute l’Italie – de Rome à Venise, avant de rejoindre la cour de Stuttgart – composant une œuvre religieuse considérable, dont trois Beatus Vir. Ecrite à Rome en 1751, l’œuvre ici révélée fait la part belle à la soprano, omniprésente dans cette partition aux embuches redoutables. Rachel Redmond, lauréate de la cinquième édition du «Jardin des voix» des Arts florissants, fait valoir son timbre solaire et aérien, se jouant de toutes les difficultés. Particulièrement à l’aise dans le registre aigu et les vocalises, on aimerait cependant un peu plus de velouté dans son émission. Un détail tant son engagement et ses qualités de projection emportent rapidement toutes réserves. Dans une acoustique qui privilégie la voix, Prandi se montre attentif à toutes les nuances, prêtant une attention constante au sens du texte chanté. Les individualités jaillissent comme autant d’interventions théâtrales, apportant lisibilité et sensibilité à ce chœur où les différentes voix sont aléatoirement mêlées. Le «Jucundus homo» enthousiasme par l’excitation frénétique du chœur, toujours parfaitement secondé par un orchestre prêt à rugir ou à murmurer, en réponse aux moindres inflexions de son chef. Cette direction particulièrement dramatique se révèle sans cesse exaltante, tant la vigueur que Prandi parvient à impulser à ses troupes est visiblement communicative.
Avec Haendel, l’excitation ne retombe pas. L’énergie continue de circuler à travers tout le chœur, tandis que l’alto de Marta Fumagalli fait son entrée, avec une aisance radieuse digne des plus grandes. Les parties individuelles du chœur se montrent elles aussi d’un haut niveau, particulièrement la basse de Renato Dolcini, tandis que les sopranos offrent un «De torrente» empreint d’une grâce subtile. Toujours aussi en verve, mouillant la chemise au propre comme au figuré, Prandi poursuit son jeu de nuances attentives sans jamais relâcher la tension inhérente à la ferveur religieuse. Un public enthousiaste salue cette vibrante prestation, vite récompensé par deux bis brillants – Giulio Prandi mettant astucieusement en miroir le premier mouvement du Dixit Dominus de Haendel avec celui de Galuppi. On retrouvera ce programme enthousiasmant le 22 novembre prochain en la basilique San Michele Maggiore de Pavie, une occasion d’apprécier ce formidable ensemble en ses terres lombardes.
Florent Coudeyrat
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