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Le concerto et l'oiseau Vienna Konzerthaus 02/01/2001 - 02/02/01 Igor Stravinsky : Concerto pour violon en Ré majeur Igor Stravinsky : Ballet de l'Oiseau de Feu (1910) Hilary Hahn (violon), Wiener Symphoniker, Eliahu Inbal (direction) Après les nombreuses écoutes d’un concerto au disque , où la prise de son avantage bien souvent artificiellement les interventions du soliste, on est généralement surpris d’en redécouvrir la véritable balance lors d’un concert. On pouvait cependant avoir la curieuse impression, depuis les premiers balcons de la grande salle du Konzerthaus, d’être à quelques mètres à peine de la soliste. Sa puissance sonore était-t-elle réellement si impressionnante ? Ou était-ce une illusion acoustique ? Hilary Hahn projette sans aucun doute de manière admirable les inflexions de son Vuillaume "del Gesú", mais l’acoustique rendait le décalage entre les impressions visuelles et auditives si démesuré, qu’il ne restait plus qu’à fermer les yeux pour apprécier sans arrière-pensée le concerto de Stravinsky.
Hilary Hahn est assurément une violoniste de tout premier plan, douée d’un bel instinct musical et survolant sans sourciller les difficultés de la partition. Elle fait de plus preuve d’un certain métier en poursuivant sans se déconcentrer le troisième mouvement, perturbé par le malaise d’un auditeur - qu’on espère sans gravité. On est malgré tout gêné par une certaine retenue dans son jeu : la prise de son est toujours très soignée, le vibrato perlé et le beau son qu’elle produit sonne un peu extérieur. Les critiques s’effacent néanmoins au fil de la musique, lorsqu’une passion plus éprouvée semble l’envahir et la pousse à des risques supplémentaires. Elle revient sur scène sans se faire longuement prier, pour un presto tiré des Partitas de Bach : le tempo est très rapide, parfois a la limite de l’intelligible. Mais la lecture se révèle en fin de compte souple et intelligente, sans inutiles effets de manchettes.
L'orchestre des Wiener Symphoniker ne s'était pas particulièrement distingué durant le concerto, prodiguant un accompagnement assez standard et manquant de tranchant. L'incompréhension entre chef et instrumentistes éclate en pleine lumière pendant l'Oiseau de Feu; notons qu’il s'agit de la version intégrale du ballet, assez rarement jouée en concert, et non pas des suites arrangées plus tard par le compositeur lui-même. On perd donc très vite pied dans le ballet de Stravinsky : les chefs de pupitres essayent d'imposer leur conception au reste des pupitres, ressortant excessivement et rompant l’homogénéité de timbre ; le chef d’orchestre en arrive à donner de la voix pour récupérer les musiciens perdus ; la plupart des changements de tempo ne se clarifient qu'après quelques temps de flottement. Inbal se borne donc à buriner chaque temps afin de mettre tout le monde à peu près d’accord. Certains passages ressortent miraculeusement de ce brouillard harmonique, nous faisant regretter ce qu’on aurait pu entendre, avec les mêmes interprètes, mais à un autre concert. Dimitri Finker
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