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Un spectacle enchanteur

Bregenz
Seebühne
07/24/2014 -  et 25, 26, 27, 29, 30, 31 juillet, 1er, 2, 3, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 12, 13, 14, 15, 16*, 17, 19, 20, 21, 22, 23, 24, 25 août 2014
Wolfgang Amadeus Mozart : Die Zauberflöte, K. 620
Albert Pesendorfer/Alfred Reiter* (Sarastro), Norman Reinhardt*/ Nikolai Schukoff/Rainer Trost (Tamino), Eike Wilm Schulte/Wilfried Staber* (Sprecher, 2. Geharnischter), Laura Claycomb*/Daniela Fally/Kathryn Lewek (Königin der Nacht), Anja-Nina Bahrmann/Bernarda Bobro*/Gisela Stille (Pamina), Magdalena Anna Hofmann/Maraike Schröter* (Erste Dame), Verena Gunz/Sabrina Kögel* (Zweite Dame), Bernadett Fodor*/Katrin Wundsam (Dritte Dame), Dénise Beck/Jana Baumeister* (Erster Knabe), Eva Dworschak*/Veronika Vetter (Zweiter Knabe), Dymfna Meijts*/Viola Zimmermann (Dritter Knabe), Markus Brück/Paul Armin Edelmann*/ Daniel Schmutzhard (Papageno), Hanna Herfurtner/Susanne Grosssteiner* (Papagena), Alexander Kaimbacher/Martin Koch* (Monostatos/1. Geharnischter)
Prager Philharmonischer Chor, Lukás Vasilek (préparation), Wiener Symphoniker, Hartmut Keil*/Patrick Summers/Stephan Zilias (direction musicale)
David Pountney (mise en scène), Johan Engels (décors), Marie-Jeanne Lecca (costumes et marionnettes), Ran Arthur Braun (chorégraphie et cascades), Fabrice Kebour (lumières)


(© Bregenzer Festspiele/Karl Forster)


Il est parfois de drôles de coïncidences : au moment même où, vers la fin de La Flûte enchantée, Tamino et Pamina entament l’épreuve de l’eau, une averse commence de tomber sur Bregenz. Mais la représentation du chef-d’œuvre de Mozart se poursuit comme si de rien n’était : les spectateurs enfilent leur imperméable sans broncher et les chanteurs bravent les éléments tant bien que mal, avec beaucoup de stoïcisme. Ici les soirées ne sont interrompues qu’en cas de déluge. C’est ce qui permet de présenter un spectacle en plein air, sur le lac de Constance, tous les jours ou presque un mois durant, dans une région où la pluie n’est pas rare même en plein été. Les décors, les costumes et les installations électriques résistent à l’eau, seul l’orchestre est à l’abri, dans une salle située à une centaine de mètres derrière le public. Les musiciens et les chanteurs sont sonorisés : 80 haut-parleurs sont disséminés dans les éléments du décor et 800 (!) dans les tribunes où est installé le public. La sonorisation est d’excellente qualité, les 7000 spectateurs ayant véritablement l’impression de bénéficier de l’acoustique d’une salle fermée. Et lorsqu’un peu plus tard dans la soirée la technique flanche et que la sonorisation s’arrête brusquement quelques minutes durant, on se rend compte à quel point les voix – qu’on entend alors à peine – sont peu de choses dans cet environnement où rien ne porte naturellement le son.


Mais qu’importe, car on vient à Bregenz avant tout pour le spectacle sur le lac, bien avant la musique et les voix. Ceci est d’autant plus vrai pour cette Flûte enchantée, créée l’année dernière dans une mise en scène du directeur du festival, l’Anglais David Pountney, et reprise cette année. Le spectacle est un pur régal pour les yeux. Il se passe tellement de choses sur la scène flottante qu’on ne sait plus où donner de la tête. Trois dragons de 28 mètres de hauteur et reliés par des passerelles suspendues au-dessus du vide encadrent l’espace scénique, au centre duquel trône un plateau tournant hérissé de brins d’herbe qui se gonflent et se dégonflent au fil de la soirée. Les interprètes rejoignent le dispositif scénique dans des embarcations les plus diverses, Pamina arrivant dans un bloc de verre et Papagena dans une immense coquille d’œuf. Le metteur en scène a joué à fond la carte de la féerie et du conte pour enfants, non sans une certaine touche de poésie, avec notamment d’immenses marionnettes pour incarner les trois Dames de la Reine de la Nuit et les trois Garçons. Il y a aussi des cascadeurs et des acrobates jouant à Spiderman, un serpent se transformant en monstre marin géant, des animaux sauvages aux énormes yeux lumineux, sans parler des nombreux effets spéciaux, des personnages qui tombent dans le lac et des feux d’artifice ponctuant régulièrement la représentation. On ne s’ennuie à aucun moment, jamais La Flûte n’a paru aussi animée et vivante. Un spectacle enchanteur !


Par la force des choses, on l’a dit, la musique et les voix passent au second plan, c’est la règle du jeu à Bregenz. A la tête des Wiener Symphoniker, le chef Hartmut Keil offre une lecture vive et nerveuse, au diapason de la mise en scène de David Pountney. Trois distributions différentes alternent dans les rôles principaux. En ce soir du 16 août, ce sont Norman Reinhardt en Tamino et Laura Claycomb dans le rôle de la Reine de la Nuit qui offrent les plus belles prestations vocales, mais les autres chanteurs ne déméritent absolument pas. Après onze années passées à Bregenz, David Pountney quitte le festival autrichien sur un triomphe. Il sera remplacé par Elisabeth Sobotka, directrice de l’Opéra de Graz, qui a d’ores et déjà annoncé qu’elle allait programmer Turandot l’année prochaine et Carmen en 2017. La tâche qui l’attend n’est pas facile car David Pountney a placé la barre très haut.



Claudio Poloni

 

 

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