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CD et livres: l’actualité d’avril
04/15/2023


Au sommaire :

Les chroniques du mois
En bref
Face-à-face
ConcertoNet a également reçu





Les chroniques du mois




Must de ConcertoNet


    Győrgy Vashegyi dirige Gervais


    Journal de Reynaldo Hahn


    Pierre Gallon interprète Bach


    Le chœur de chambre Les éléments


    La pianiste Yvonne Lefébure


    La musique chair du silence de Claude Molzino


    La soprano Jessye Norman


    Stockhausen / Gruppen de Pascal Decroupet


    Berio / Coro d’Alain Poirier


    Le Carnet brun de Wagner


    Claire Huangci interprète Mozart




Sélectionnés par la rédaction


    La Note Brève interprète Colin


    L’Ensemble Contraste


    L’ensemble Vox Cantoris


    La pianiste Isıl Bengi


    Le pianiste Jean‑Baptiste Fonlupt


    Jean‑François Heisser dirige Messiaen


    Il Ballo interprète Cyprien de Rore


    Paul Agnew dirige Vivaldi


    La soprano Eva Zaïcik


    Musique et sexualité d’Esteban Buch


    Tim Mead chante Vivaldi


    Jean-Philippe Audin


    L’altiste Timothy Ridout


    L’ensemble Cet étrange éclat


  Christophe Rousset dirige Acis et Galatée


    La gambiste Salomé Gasselin


    La violoncelliste Anastasia Kobekina


  Ecrire un opéra au XXIe siècle d’Armelle Babin


    Musicall Humors interprète Dowland


    La violoniste Sarah Nemtanu





 Oui !

Annie Fischer interprète Beethoven
Győrgy Vashegyi dirige Les Abencérages
Philippe Herreweghe dirige la Passion selon saint Jean
Peter Kooij chante Bach
Rinaldo Alessandrini dirige Vivaldi
Julien Chauvin interprète Vivaldi
Dafne in lauro de Fux
L’Ensemble Zefiro
Elodie Soulard interprète Tchaïkovski
Marie‑Antoinette et la musique de Patrick Barbier
Le baryton Damien Pass
Le Duo (violon et piano) Alma
Le Concert d’Astrée
Le ténor Jean‑François Novelli
Le claveciniste Olivier Baumont
Les Casadesus de Frédérick Casadesus
Le compositeur Denis Levaillant
La violoniste Arabella Steinbacher
Le violoniste Kerson Leong
Osmo Vänskä dirige Mahler
Isabelle Faust interprète Dvorák
René Jacobs dirige Mozart
Pablo Heras-Casado dirige Schubert




Pourquoi pas ?

L’ensemble La Palatine
Philippe Herreweghe dirige Bach
Dans les coulisses des orchestres de Delphine Blanc
L’ensemble Ozio Regio interprète Uccellini
Le Duo (chant et accordéon) d’Or et de Paille
L’Ensemble Cello8
Konstantin Krimmel chante Silvestrov
La violoncelliste Michèle Pierre
Cahiers Maurice Ravel
Le chef John Frandsen
La compositrice Tatiana Probst
Le Quatuor Tchalik interprète Tishchenko
Nolwenn Bargin interprète Gaubert
Le pianiste Ivan Bessonov
La pianiste Anastassiya Dranchuk
Eric Lacrouts interprète Franck et Fauré



Pas la peine

La violoniste Eldbjørg Hemsing
Le pianiste Adi Neuhaus
Essai sur la musique des années 1920 de Roland Guillon
András Keller dirige Mahler
Susanna Mälkki dirige Bartók
Karina Canellakis dirige Bartók
Gisèle et Chantal Andranian interprètent Philidor
Maria Milstein interprète Prokofiev
Rachel Willis-Sørensen interprète Strauss




Hélas!

Chloe Chua interprète Vivaldi et Locatelli
Stravinsky de Lionel Esparza
Ecouter la musique classique de Jean‑Jacques Griot
Christian Gerhaher interprète Mahler
Maya Beiser interprète Bach





En bref


Bon anniversaire au Concert d’Astrée !
L’invitation au voyage de Denis Levaillant
Les Casadesus : quelle famille ! (1)
Les Casadesus : quelle famille ! (2)
Jean‑François Novelli se souvient
Le sortilège de Fiona Monbet
Gaubert, flûtiste et compositeur
Ravel : à vos Cahiers !
Les débuts au disque de John Frandsen
Survol de la musique des années 1920
Le clavecin proustien d’Olivier Baumont
Boris Tishchenko chambriste



Bon anniversaire au Concert d’Astrée !





Les orchestres sur instruments d’époque (au sens large) ne cessent, ces dernières années, de fêter leur anniversaire. En 2017, Le Concert Spirituel fêtait ainsi en grande pompe ses 30 ans, précédant Les Arts Florissants, qui célébraient en 2019 leur quarantième anniversaire, avant que Les Talens lyriques ne fêtent en 2021 leurs 30 ans, précédant récemment Les Siècles qui célébraient leurs 20 ans en 2022. Voici maintenant le tour de se souvenir du Concert d’Astrée, qui a fêté ses 20 ans en 2020. L’ensemble, créé par Emmanuelle Haïm, s’est depuis longtemps affirmé comme un modèle du genre, signant sous la battue énergique et toujours enthousiaste de sa rousse cheffe nombre de concerts ou de productions d’opéras mémorables, sans compter plusieurs disques également devenus des références. Pour célébrer cette jeune vingtaine d’années, le double album « 20 ans : une nouvelle fête baroque » propose des extraits de deux concerts festifs qui ont été respectivement donnés à l’Opéra d’Etat Unter den Linden de Berlin et au Théâtre des Champs‑Elysées à Paris les 8 et 12 novembre 2021. Au programme, à chaque fois, point d’œuvre intégrale mais des extraits de divers opéras des compositeurs emblématiques ayant accompagné le Concert d’Astrée depuis sa création : Rameau, Campra, Purcell, Vivaldi et bien sûr Händel.
Avouons‑le tout de suite : que nous aurions aimé être présent à ces deux concerts ! Saluons tout d’abord l’audace d’Emmanuelle Haïm, qui a su trouver des airs tirés certes de pages majeures du répertoire baroque mais qui a également su puiser, pour une bonne partie d’entre eux, dans des opéras très peu joués, pour ne pas dire totalement confidentiels : car qui est aujourd’hui familier de Naïs de Rameau, d’Idoménée de Campra, d’Aci, Galatea e Polifemo ou de Poro, re dell’Indie de Händel ? Au‑delà, on est tout bonnement transporté, page après page, extrait après extrait par la « brochette » de chanteurs alignés pour ces deux soirées de gala où l’on retrouve une bonne partie des vedettes du répertoire lyrique baroque d’aujourd’hui. Si certains extraits sont, sans grande surprise, triomphalement salués (les prestations de Lea Desandre, de Natalie Dessay ou le brillant « Sibilar gli angui d’Aletto » de Rinaldo, superbement interprété par le fougueux Jarrett Ott), le public a également su saluer à leur juste valeur certaines pages plus confidentielles mais chantées ici avec un art qui confine à la perfection. Sans multiplier les exemples, citons le toujours parfait Tassis Christoyannis dans ce poignant extrait d’Idoménée de Campra, Eva Zaïcik encore dans Idoménée, ou l’air chanté par Michael Spyres, issu d’Il trionfo del Tempo e del Disinganno, accompagné tout en sobriété par l’orchestre, ou encore cet extrait de Theodora chanté par une Emőke Baráth à la sensibilité à fleur de peau. L’ensemble ne serait évidemment rien sans un Concert d’Astrée de haute volée, dirigé à la fois par Sir Simon Rattle pour la seule suite des Boréades et, bien entendu, par une Emmanuelle Haïm qui sait, comme toujours, alterner fougue et douce attention afin de soutenir au mieux ses chanteurs, l’orchestre brillant tant par ses individualités (David Plantier en tête comme violoniste solo) que par une dynamique d’ensemble qui font que ce double disque ravira tout amateur d’opéra baroque. Décidément, oui : on aurait aimé être là (Erato 0190296278426) ! SGa




L’invitation au voyage de Denis Levaillant





Comme dans une précédente anthologie parue voici un peu plus de dix ans, Denis Levaillant (né en 1952) regroupe en un beau livre deux albums, sous le titre « Le Voyage immobile ». Voyage dans un fauteuil, bien sûr, mais aussi parcours parmi trois décennies de création, au travers d’un « voyage tsigane » partant d’Inde du Nord pour aller jusqu’en Andalousie, dont les cordes sont le fil conducteur : alto solo avec l’impressionnant Un mystérieux chemin (2017), première étape du voyage, sous l’archet de Pierre Lenert, et violoncelle solo avec Armenian Gypsy (2008) par Jean‑Philippe Audin mais aussi deux trios à cordes, le Premier « L’Intime » (2015), par le Trio Vuillaume, et le Second « Trois derviches » (2020) par Sébastien Surel, Pierre Lenert et Alexis Descharmes. Le genre roi de la musique de chambre est aussi de la fête, car les trois Quatuors sont au programme : le Premier « Les Heures défaites » (1987) par le Quatuor Joachim, le Deuxième « Le Clair, l’obscur... » (1997) par le Quatuor Arpeggione et le Troisième « Voyage tsigane » (2004) par le Quatuor Varèse. Et forcément, quand on se rapproche du sud de l’Espagne, l’accordéon, en l’occurrence celui d’Olivier Innocenti, fait son apparition, en solo dans une Danse nocturne (2019) de plus en plus caliente et dans les cinq pièces de L’Andalouse (2004), avec le Quatuor Amôn. Pas de couleur locale ni de citations, car la musique joue davantage sur les climats, sur l’esprit, d’autant que le voyage passe visiblement aussi par la densité et l’expression du postromantisme germanique ou par des caractéristiques d’écriture empruntées à de grandes figures de la Mitteleuropa (Janácek, Ligeti). Stimulant et poétique à la fois (DLM Editions DLM 3422). LPL




Les Casadesus : quelle famille ! (1)





Robert, Jean‑Claude, Gisèle : certains Casadesus sont bien connus. En réalité, il s’agit d’une immense famille au destin remarquable, déjà depuis Luis (1850‑1919), originaire de Catalogne et dont même la mère, Francesca, était comédienne. L’un de leurs descendants, Frédérick (né en 1959), retrace, dans Les Casadesus, l’histoire sur plusieurs générations de ce clan dont de nombreux membres ont marqué, et marquent encore, l’histoire de la musique et du théâtre en France, certains sous des noms évidemment différents du fait des mariages et des unions. L’auteur dresse le portrait de tous ces personnages d’une plume passionnée et alerte, non sans quelque maniérisme et coquetteries langagières. Il a néanmoins le mérite de ne pas passer sous silence la personnalité déplaisante de tel ou tel Casadesus, surtout durant la période troublée de l’Occupation. Il ne s’attarde pas nécessairement sur les plus célèbres, dressant aussi, non sans une pudique émotion, la trajectoire de celles et ceux dont la vie fut tragiquement courte. Ce livre permet de prendre conscience de l’importance insoupçonnée de certains Casadesus, comme Henri, qui mériterait à lui seul une biographie. Il manque dans cet ouvrage instructif et plaisant un arbre généalogique traditionnel, avec les différents embranchements, pour mieux s’y retrouver, au lieu d’une simple liste génération par génération, et un cahier central de photographies des Casadesus les plus longuement évoqués (Les Editions du Cerf, 224 pages, 20 euros). SF




Les Casadesus : quelle famille ! (2)





Quelqu’un qui écrit une pièce pour saxophone soprano, piano préparé et marimba éveille nécessairement la curiosité : fille du compositeur Dominique Probst et nièce de Jean‑Claude Casadesus, Tatiana Probst (née en 1987) est pianiste, soprano et compositrice. Ladite pièce, The Matter of Time (2012), inspirée par une sculpture de Richard Serra, donne son titre (« The Matter of Time Project ») à un album présentant six autres de ses œuvres. Elève de Michel Merlet, elle fait preuve d’un éclectisme surprenant, tant il semble y avoir peu en commun entre la cavalcade rageuse et déjantée du saxophone (Carmen Lefrançois), du piano (Alvise Sinivia) et du marimba (Vassilena Serafimova) et le caractère très « musique française » d’Ainsi un nouveau jour (2016), « suite fantasmée » d’Ainsi la nuit de Dutilleux (par le Quatuor Rosamonde), ou de Les Ans volés (2017), mélodie dont elle a également signé le texte et qu’elle chante elle‑même (avec l’Orchestre Pasdeloup dirigé par Julien Masmondet). De même, le délicat pastiche de Wotan’s Träumerei (2012) pour piano (Guillaume Vincent) a peu à voir avec des pages plus ambitieuses comme 3 Mots‑Songe (2018) pour piano (Philippe Hattat), violon (Iris Scialom) et violoncelle (Marc‑Antoine Novel). Et il y a du jazz dans D’ombre et de lumière (2016) pour piano à quatre mains (Philippe Hattat), précédé d’un poème lu par Nicole Garcia, ou même dans Le Serment d’Hippocrène (2019) pour violon (Laurent Korcia) et piano (Guillaume Vincent), évoquant la fondation éponyme et précédé d’un texte dit par Zita Hanrot. C’est la parole qui conclut, avec un Exorde lu dans le cadre du cercle intime de Tatiana Probst : sa sœur (Barbara Probst), sa mère (Catherine Chevallier), sa grand‑mère (Gisèle Casadesus) et « une toute jeune amie » (Adélaïde Lafarge), tant il est vrai, décidément, que dans la famille Casadesus, la musique et les mots sont intimement associés (Continuo Classics CC777.742). LPL




Jean‑François Novelli se souvient





Comme beaucoup d’enregistrements paraissant cette année, « Vous souvenez‑vous de moi ? », réalisé par Jean‑François Novelli, est né pendant les confinements de 2020. Lisant l’ouvrage Musique ancienne de la claveciniste Wanda Landowska, il a eu l’idée de fouiller le répertoire de mélodies françaises du début du XXe siècle. Etendant ses recherches, il a ajouté au programme des compositeurs moins connus, tels Eugène Sauzay, Louis Pitte ou Arthur Metzner, et l’a prolongé avec des contemporains comme la chanteuse Juliette, Xavier Béraud et le jazzman Edouard Ferlet. On a pu apprécier récemment dans O mon bel inconnu au Théâtre de l’Athénée le ténor français jouant avec brio deux rôles secondaires de cette opérette. Il renoue dans ce récital largement avec Reynaldo Hahn par quatre mélodies (Etudes antiques tirées des Poèmes antiques de Charles Leconte de Lisle) complétées par l’Hymne à Apollon de Fauré qui constituent « l’attachement à l’antique » du programme. Fauré encore avec Raoul Laparra et Saint‑Saëns illustrent un « à la manière de » des XVIIe et XVIIIe siècles avec Verlaine, La Fontaine et François Coppée comme poètes. Une place particulière est faite aux poètes anciens comme Marot, Charles d’Orléans, du Bellay et Ronsard mis en musique par des compositeurs aussi divers que Sauzay, Pitte, Ravel et Poulenc. La partie moderne du programme est très distrayante ; on sent que les interprètes se sont amusés à interpréter ces trois chansons humoristiques composées pour eux. L’enregistrement a été réalisé dans le chai d’un vignoble de Bourgogne : c’est le gros point faible de cette réalisation car l’équilibre entre voix et piano, malgré la belle versatilité de Maude Gratton jouant sur des pianos Erard, est sacrifié et la matité du son ne met jamais en valeur la voix de Jean‑François Novelli, dont la diction est exemplaire mais le timbre sonne bien monotone. Le livret rédigé par le chanteur est magnifiquement réalisé, documenté et illustré, complétant parfaitement ce passionnant voyage dans le chant français (Klarthe KLA156). OB




Le sortilège de Fiona Monbet





Axone de Michèle Pierre (née en 1990) donne son titre à un album où la violoncelliste donne également la voix, « comme une corde en plus sur l’instrument ». Cette pièce, de même que Dorothy de la Coréenne Seongmi Kim (née en 1984), est de celles, incantatoires et planantes, auxquelles on adhère entièrement... ou qui suscitent l’ennui, quand ce n’est pas l’éclat de rire ou l’irritation, d’autant que le timbre de la voix n’est pas franchement agréable. Avec l’œuvre la plus développée (23 minutes) de ce court programme, Geasa de Fiona Monbet (née en 1989), « sortilège [gaélique] jeté principalement par les femmes contre quiconque n’exécutera pas leur volonté », le parti pris de liberté se conjugue avec quelque chose de plus construit : même si le langage n’innove guère, entre souvenirs de Kodály, gigue irlandaise et pop (la notice évoque la Norvégienne Aurora), cette proposition est défendue de façon spectaculaire et convaincante par Michèle Pierre (Le Ponton des arts MC229). LPL




Gaubert, flûtiste et compositeur





Durant les dernières années, plusieurs enregistrements (voir ici, ici et ici) ont contribué à lever le voile sur la musique de Philippe Gaubert (1879‑1941) : chef dont les débuts de l’industrie du disque ont permis de documenter la réputation, il était également un brillant flûtiste, élève de Taffanel, ce dont témoigne abondamment son activité de compositeur. L’album de Nolwenn Bargin, deuxième flûtiste solo au Collège de musique de Winterthur, témoigne de ce tropisme pour son instrument. En ce début de siècle, Gaubert, jusque dans le titre de ses œuvres, suit la trace de Saint‑Saëns (Tarantelle), Fauré (Sicilienne, Fantaisie, Ballade, Berceuse) ou du premier Debussy (Médailles antiques, Sur l’eau) : musique on ne peut plus française, un rien indolente et émolliente, délicieusement agréable à l’oreille. Grâce à son ensemble Chant du Vent, la flûtiste franco‑suisse peut se présenter dans diverses combinaisons, à commencer par le piano (Maki Wiederkehr), seul ou bien associé au violon (Olivier Blache) pour les deux Médailles antiques, au violoncelle (Flurin Cuonz) pour les Trois Aquarelles ou au hautbois (Maria Sournatcheva) pour la Tarantelle, mais aussi avec une seconde flûte (Héléna Macherel) et une harpe (Julie Palloc) pour le Divertissement grec (Claves CD 3059). SC




Ravel : à vos Cahiers !





Edités par L’Harmattan, les Cahiers Maurice Ravel constituent une source d’informations assez pointues destinée avant tout aux musicologues désireux de rester au fait des dernières recherches. Le mélomane ordinaire peut aussi en tirer profit en puisant dans ce qui l’intéresse le plus. Chaque numéro comporte, en effet, une série de contributions assez diversifiées de différents auteurs. Dans le vingt‑troisième, nous retenons, outre l’entretien avec George Benjamin, qui s’exprime sur sa filiation avec le compositeur, et la réflexion de Philippe Albéra sur la modernité du langage ravélien, la contribution de François Dru sur la correspondance avec Koussevitzky – trente‑cinq documents déposés à la Library of Congress de Washington – et celle de Thomas Thisselin sur l’édition de l’orchestration des Tableaux d’une exposition. Les férus de musique et de poésie se pencheront avec quelque intérêt sur l’étude de Gérard Bégni sur les Trois Poèmes de Stéphane Mallarmé, riche d’un parallélisme éclairant avec les Poèmes hindous de Delage et les Poésies de la lyrique japonaise de Stravinski. Il faut plutôt être musicien pour lire le texte, complété par de nombreux exemples musicaux, de Jean‑François Monnard intitulé « De l’hypothèse à la certitude » et vouloir vraiment, mais vraiment, tout savoir pour attaquer celui de Frédéric Ducros‑Malmezet sur les ventes publiques et privées de biens ayant appartenu à Ravel. La lecture de ce cahier sans doute pas essentiel mais utile et respectable par son sérieux offre un agrément variable et relatif de par le caractère académique, voire fastidieux, de certains textes. Pour approfondir ses connaissances sur Ravel, il vaut mieux se reporter d’abord et avant tout à des ouvrages de référence, à la réputation bien établie (188 pages, 20,50 euros). SF




Les débuts au disque de John Frandsen





L’éditeur Danacord est fier de ses gloires nationales : après de très nombreux albums consacrés au « Great Danish Pianist », Victor Schiøler, et, plus encore, au « Legacy » du chef Thomas Jensen, voici un album de deux disques qui permet de partir à la découverte des premiers enregistrements (1951‑1958) réalisés par « The Danish Star Conductor », John Frandsen (1918‑1996) à la tête de l’Orchestre royal danois (celui du Théâtre royal) et, marginalement, de l’Orchestre de la Radio d’Etat. Après une parfaite Ouverture des Noces de Figaro, qui ne surprend pas de la part de celui qui fut chef principal au Théâtre Royal de 1947 à 1980, vient une Quatrième Symphonie de Brahms tout à fait réussie dans son optique traditionnelle généreusement romantique et volontiers subjective mais souffrant de scories instrumentales et d’une prise de son précaire et déséquilibrée, avec des cors trop en avant. Le tempérament du chef danois s’accorde parfaitement avec la fougue de la pianiste d’origine australienne Eileen Joyce (1908‑1991), deux ans avant qu’elle ne mette fin à sa carrière, dans l’un de ses chevaux de bataille, le Concerto de Grieg. Hormis une lumineuse Cinquième de Schubert, le second disque se concentre sur les compositeurs danois. Le panache de Frandsen réussit aux ouvertures romantiques Echos d’Ossian (1840) de Niels Gade (1817‑1890) et Hakon Jarl (1844) de J.P.E. Hartmann (1805‑1900), et son sens dramatique soutient l’intérêt dans Evolution (1939), première des deux fantaisies symphoniques de Finn Høffding (1899‑1997). Trois miniatures concluent : deux plaisantes pièces de Svend Erik Tarp (1908‑1994) – La Bataille de Jéricho (1949) et Pour mon théâtre de marionnettes (1949), seconde de ses ouvertures de comédie – ainsi qu’une Danse torgut (1939) fort colorée de Knudåge Riisager (1897‑1974). Mais il ne s’agit là que d’une partie des enregistrements réalisés par Frandsen à cette époque et, connaissant la persévérance de l’éditeur, on ne doute pas de les voir prochainement à son catalogue (DACOCD 940). SC




Survol de la musique des années 1920





Sociologue, auteur d’ouvrages sur le jazz noir américain des années 1950 et 1960, Roland Guillon (né en 1942) a rédigé un Essai sur la musique des années 1920 : un sujet d’une complexité colossale, abordé en seulement... 84 pages. Autant dire que cet auteur animé de bonnes intentions reste en surface. Il consacre l’essentiel des pages à dresser un panorama de la musique de cette décennie, sans omettre l’essentiel, et formule ensuite des enseignements tout à fait pertinents, mais assez attendus, en mettant en regard création musicale et contexte historique et social. Ce qui caractérise cette décennie, c’est la diversité, de langages, de formes, de genres, de représentations. N’est‑ce pas enfoncer des portes ouvertes ? Le chercheur oppose ainsi un peu trop simplement l’hétérogénéité des années 1920 à la relative homogénéité des époques baroque, classique, romantique. L’auteur se plie toutefois avec sérieux à l’exercice de l’essai musical. L’avant‑propos expose d’ailleurs bien la réflexion menée, le point de vue adopté et le but recherché. Mais l’éditeur – qui brasse, il est vrai, des domaines divers et variés – aurait finalement pu se contenter, de la part cet auteur déjà bien représenté dans son catalogue, d’une « simple » introduction, sans recours abusif à la première personne du singulier (L’Harmattan, 84 pages, 11,50 euros). SF




Le clavecin proustien d’Olivier Baumont





Jusqu’où les riches et nombreuses célébrations du centième anniversaire de la mort de Proust iront‑elles ? Dans le domaine musical, les prétextes ne manquent pas, de Reynaldo Hahn à la Sonate de Vinteuil, avec tout récemment encore au disque « Marcel Proust, une vie en musiques ». Facile, certes, avec un mélomane aussi averti que le créateur de La Recherche. L’originalité de la démarche d’Olivier Baumont (né en 1960) n’en est que plus louable, même si elle ne surprend pas de la part de ce musicien dont la culture et la curiosité ne sont plus à prouver : « Un clavecin pour Marcel Proust » constitue en effet non seulement un hommage – le claveciniste insiste sur le pour – mais surtout un beau tour de force, construit autour de figures proustiennes, réelles ou de fiction – Albertine, Morel, Hahn, Diémer, le narrateur lui‑même mais aussi le compositeur Léon Delafosse (1874‑1955), un des modèles du personnage de Morel. Si l’on n’est guère surpris de trouver Champion de La Chapelle (Allemande et deux variations attribuées à Sweelinck), Couperin (« Les Baricades mistérieuses », « Les Ombres errantes »), Bach (Gavottes de la Sixième Suite anglaise, Prélude et Fugue en ré mineur du Premier Livre du Clavier bien tempéré), Rameau (cinq extraits des Indes galantes, Gavotte de Dardanus transcrite par Balbastre), Scarlatti (Sonates K. 55 et K. 144), il fallait néanmoins penser à Leontzi Honauer, compositeur strasbourgeois du XVIIIe, dont l’Andante de la Sonate V pour violon et clavecin (avec Pierre‑Eric Nimylowycz), de fait, établit une correspondance pertinente avec Fragonard. L’étonnement commence avec D’Anne jouant de l’espinette de Ravel (avec la soprano Ingrid Perruche et Nicolas Mackowiak pour offrir une troisième main au clavecin !) et le premier mouvement de la Sonatine pour piano de Hahn, même si le caractère archaïsant de ces musiques se prête bien à une adaptation instrumentale. Mais Baumont a même déniché des pièces originales pour clavecin contemporaines de Proust, comme le « Menuet d’amour » du drame musical Thérèse de Massenet et la Toccata d’Eugène Anthiome (1836‑1916), pastiche tout à fait remarquable et « cellule génératrice » de tout ce programme, qui, pour rendre justice à la diversité des époques, fait appel à trois instruments, un muselaar (virginal) d’Alain Anselm (1974), un clavecin von Nagel (1999) d’après Nicolas Blanchet et un Pleyel (1929). Tout cela est bon non seulement pour les oreilles mais pour l’esprit, et donc tout à fait recommandable (L’Encelade ECL 2204). SC




Boris Tishchenko chambriste





La voix de Boris Tishchenko (1939‑2010), l’un des élèves de Chostakovitch, commence à se faire entendre en France. Au sein d’un catalogue assez fourni (environ cent cinquante œuvres), la musique de chambre tient une place importante, à commencer par six quatuors à cordes. Le Quatuor Tchalik a choisi le Premier (1957), en trois brefs mouvements où, quand le climat n’est pas sombre, c’est seulement pour laisser place à l’ironie. Plus développé, dans un style plus décanté, le Cinquième (1984), malgré le thème guilleret à la Dvorák en ut majeur qui parcourt son premier mouvement, ne doit pas abuser davantage quant à l’état d’esprit du compositeur. La fratrie est rejointe par l’aîné, Dania Tchalik (né en 1978), dans le Quintette avec piano (1985), un quart d’heure d’un seul tenant et d’ampleur symphonique, qui évoque les cauchemars d’un Schnittke (Alkonost Classic ALK008). SC





Face-à-face


Bruch : Premier Concerto pour violon


          
Comme le Premier Concerto pour piano de Tchaïkovski, celui‑ci a éclipsé les deux suivants. Mais comment s’en étonner ? Vingt ans après celui de Mendelssohn et dix ans avant celui de Brahms (1866), il s’est imposé par son irrésistible inspiration lyrique et mélodique. Une réédition et une nouveauté témoignent d’une discographie à la hauteur de sa célébrité.
L’enregistrement réalisé en juillet 2012 par Arabella Steinbacher (née en 1981) satisfera les tenants d’un violon apollinien, toujours élégant, fin, intimiste et parfois même presque fragile. L’Orchestre Gulbenkian sonne un peu trop compact mais il est fermement dirigé par Lawrence Foster, qui ne joue pas davantage les utilités dans le Poème de Chausson et dans le Concerto de Korngold, où la luminosité de la violoniste allemande fait merveille (SACD Pentatone PTC 5186 503).
Beaucoup plus extraverti, puissant et fougueux, comme dans son enregistrement des Sonates d’Ysaÿe chez le même éditeur, pas avare de gros son et un peu moins précis, Kerson Leong (né en 1997) cultive le versant dionysiaque de l’œuvre, ce qui se défend aussi. En tout cas, l’Orchestre Philharmonia, dirigé par Patrick Hahn, fait corps avec cette approche. Le violoniste canadien complète avec le plus rare et plus tardif In memoriam du même Bruch et, surtout, le Concerto de Britten, dont il sert la versatilité expressive avec une remarquable présence de tous les instants (Alpha 946). SC




Franck : Sonate pour violon et piano


          
Bicentenaire du compositeur ou pas, l’œuvre, emblématique d’une époque où la musique de chambre, en France, s’épanouit spectaculairement (1886), demeure une figure imposée du répertoire des violonistes, tant au disque qu’au concert. En voici donc deux nouveaux enregistrements, au couplage fort différent.
Eric Lacrouts (né en 1976), violon solo à l’Opéra national de Paris depuis déjà vingt ans, aborde la partition avec réserve, voire prudence. On pourra certes louer sa sérénité ou sa volonté de laisser le texte respirer, mais à force de refuser l’obstacle, cette interprétation demeure trop sur son quant‑à‑soi. De façon un peu contre-intuitive, on trouvera davantage d’engagement, de variété et d’élan dans les deux Sonates de Fauré, remarquablement accompagnées Jean‑Baptiste Fonlupt (Polymnie POL 212 165).
On trouvera moins de séduction mais davantage de flamme chez Adam Wagner, qui fut durant trente ans premier violon solo de l’Orchestre symphonique philharmonique de Silésie (Katowice), même si l’on peut regretter quelques maniérismes, comme cette tendance à ralentir ou à glisser d’une note à l’autre. En retrait, Dariusz Noras pâtit parfois de la sonorité de son instrument. Pour débuter cet album, les deux musiciens polonais rendent un hommage à leur compatriote Zygmunt Noskowski (1846‑1909), l’un des maîtres de Szymanowski, avec sa Sonate (avant 1875) en trois mouvements, œuvre de ses années d’études berlinoises qui traduit une forte influence de Schumann, comprend un vaste Molto andante à variations et se conclut sur un vigoureux Prestissimo (DUX 1861). SC




Tchaïkovski/Pletnev : Casse-Noisette


          
En 1978, Mikhaïl Pletnev (né en 1957) a arrangé sept extraits du ballet de Tchaïkovski (1892), qui ne recoupent que partiellement la suite d’orchestre universellement jouée – ainsi, point ici de « Valse des fleurs », mais on trouvera en revanche le grandiose Andante maestoso du Pas de deux du second acte. Cette transcription n’a pas tardé à s’imposer au répertoire, permettant tout particulièrement aux jeunes pianistes de mettre en valeur leur virtuosité. Deux d’entre eux viennent même de l’enregistrer pour le même éditeur, Ars Produktion.
Ivan Bessonov (né en 2002) souffre d’avoir été enregistré d’un peu loin dans un lieu généreux en réverbération. On sent toutefois une véritable personnalité et une évidente envie de jouer même si l’enthousiasme le conduit parfois à des excès de décibels, tendance qu’on retrouve dans la Septième Sonate de Prokofiev. En revanche, les cinq premières des neuf Etudes-Tableaux de l’Opus 39 de Rachmaninov révèlent un piano somptueux et inspiré. L’interprète conclut avec ses Cinq Pièces pour les enfants (2020), miniatures poétiques à défaut d’être innovantes (ARS 38 321).
Bénéficiant d’une meilleure prise de son, Anastassiya Dranchuk (née en 1989) assume des choix plus originaux, voire parfois déroutants. Dans cet album intitulé (en français) « Rites de passage » (« chacune des œuvres représente une transition qui transcende le familier et dont quelque chose de nouveau est né dans le drame de la victoire »), la pianiste germano-kazakhe a ensuite bien du mérite à s’attaquer à cinq des dix mouvements de la Sonate de Troie (2018) de Fazil Say, consternante de naïveté descriptive et bavarde. On se réjouit en revanche de l’entendre dans la transcription de Marguerite au rouet de Schubert par Liszt, animée par un puissant sens dramatique, et dans la Première Méphisto-Valse de Liszt, diabolique à souhait (SACD ARS 38 340). SC




Mahler : Neuvième Symphonie


          
L’ultime symphonie achevée par le compositeur (1909), à nulle autre pareille, est à la fois fin d’une vie et fin d’un monde, offrant des contrastes vertigineux entre apothéose postromantique et modernisme viennois, humour grinçant et émotion insoutenable.
Davantage connu comme fondateur du quatuor à cordes éponyme, András Keller (né en 1960) est depuis 2007 le directeur artistique et musical du Concerto Budapest. Sans pousser l’œuvre ni l’auditeur dans leurs derniers retranchements, l’interprétation ne manque pourtant ni d’engagement ni de générosité, avec une pâte instrumentale épaisse, impression sans doute accentuée par une prise de son assez distante (SACD Tacet S 254).
Osmo Vänskä (né en 1953) poursuit avec l’Orchestre du Minnesota dont il a été le music director de 2003 à 2022, une intégrale mahlérienne à laquelle ne manquent désormais que les Troisième et Huitième. Mise en valeur par une prise de son magnifique, la formation américaine dispense un grand luxe de détails, de belles couleurs et de riches nuances au service d’une expression flamboyante. Virtuose, un peu superficiel, mais l’ennui ne s’installe jamais et du caractère (SACD Bis BIS‑2476). SC




Bartók : Concerto pour orchestre


          
S’il n’a pas été le premier à donner ses lettres de noblesse au genre (Hindemith et Kodály, notamment, l’ont précédé) et s’il a été suivi par bon nombre d’autres musiciens (à commencer par Lutoslawski), le compositeur hongrois est assurément celui dont l’œuvre, typique de son ultime période américaine (1943), est demeurée la plus célèbre. Deux cheffes d’orchestre viennent ainsi de l’enregistrer.
Susanna Mälkki (née en 1969) contrôle fermement l’Orchestre philharmonique d’Helsinki, dont elle est la cheffe principale depuis 2016. Trop fermement, de telle sorte que l’étincelle jaillit rarement et qu’hormis quelques incartades, l’impression dominante est celle d’une réalisation plus impeccable qu’inspirée. La Musique pour cordes, percussion et célesta, pourtant si différente, est abordée pareillement, avec sérieux, parfois même vigueur, mais sans enthousiasme ni poésie (SACD Bis BIS‑2378).
Karina Canellakis (née en 1981) déçoit à la tête de l’Orchestre philharmonique de la Radio néerlandaise, dont elle est la chef‑dirigent depuis 2019 : bien que réalisé en public, l’enregistrement manque bien trop souvent de flamme et suscite l’ennui, la direction comme l’orchestre paraissant bien ternes – un comble pour une œuvre virtuose qui permet généralement aux musiciens de se mettre spectaculairement en valeur. En complément, les Quatre Pièces opus 12 (1912) présentent bien plus d’intérêt, tant il est précieux d’entendre ces trop rares pages, contemporaines du Château de Barbe‑Bleue dont on retrouve la chatoyante orchestration et le climat pesant. Et là, l’investissement des interprètes est autrement plus évident (Pentatone PTC 5187 027). SC





ConcertoNet a également reçu




Duo Andranian : Philidor
On connaissait le joueur d’échecs et, plus récemment, on a redécouvert le maître de l’opéra‑comique, élève de Campra, tant au disque qu’à la scène. La curiosité était donc grande de pouvoir accéder à sa seule œuvre instrumentale, L’Art de la modulation (1755), recueil de six brefs quatuors en trois mouvements pour hautbois (ou violon ou flûte), deux violons et basse. La surprise est à peine moins grande de l’entendre enregistré (en public) dans un arrangement pour deux pianos « modernes ». Et la déception guère moins importante face à cette musique qui ne sort que trop rarement de son cadre « galant », hormis pour de rares moments plus expressifs ou fugatos de bonne tenue, et une prise de son très médiocre qui suscite de bizarres effets d’écho (Polymnie POL 213 166). LPL


Maria Milstein : Prokofiev
Dans ce disque bien court, la violoniste russe (née en 1985) privilégie la finesse de la sonorité, la subtilité et la poésie des deux concertos, au détriment de la puissance et de la dimension motorique du propos. Avec une expression quelque peu bridée, elle tend à gommer les aspérités de cette musique qui gagnerait pourtant à davantage de vigueur et d’âpreté (Scherzo du Premier Concerto) mais aussi de rondeur (Andante assai du Second). Phion, Orchestre de Gueldre et d’Outre‑Ijssel (centre des Pays‑Bas), sous la direction d’Otto Tausk (né en 1970), qui en fut le chefdirigent jusqu’en 2022, soutient pleinement la démarche de la soliste, dans un partenariat de grande qualité (Channel Classics CSS45223). LPL


Isabelle Faust : Dvorák
La réédition de cet album de la violoniste allemande (née en 1972) est plus qu’opportune et montre à quel point elle est une musicienne complète : soliste rigoureuse (mais pas austère), intègre (mais pas terne) et précise (mais pas sèche) du Concerto, avec le Philharmonia de Prague dirigé avec un soin tout particulier par son fondateur, Jirí Bĕlohlávek (1946‑2017) ; chambriste dans le Troisième Trio, auquel, avec Alexander Melnikov (né en 1973) et Jean‑Guihen Queyras (né en 1967), elle confère une splendeur brahmsienne (Harmonia mundi HMM 931833). SC


René Jacobs : Mozart
La réédition de ces deux enregistrements, témoignages de concerts salués dans nos colonnes en 2009 et en 2014, est bienvenue. Dans L’Enlèvement au sérail comme dans La Flûte enchantée, le sens dramatique du chef flamand ne se dément jamais, quitte à parfois en faire trop, avec ses ruptures, son pianoforte envahissant (alors même que par définition, il n’y a pas de récitatifs dans un Singspiel) et ses effets spéciaux, mais les plateaux vocaux sont globalement satisfaisants et l’Académie de musique ancienne de Berlin sert à merveille ces versions stimulantes et pleines de jeunesse (coffret de cinq disques Harmonia mundi HMX 2904041.45). SC


Rachel Willis-Sørensen : Strauss
Le soprano américain se voit offrir un écrin de luxe pour son deuxième album chez Sony. Le Gewandhausorchester dirigé par Andris Nelsons pour les deux œuvres tardives que sont les Quatre derniers lieder et la scène finale de Capriccio, c’est plus que luxueux ! Et de fait, le luxe sonore déployé par la phalange allemande est constamment miraculeux. Mais Rachel Willis-Sørensen aurait dû s’inspirer de l’interrogation de la Comtesse Madeleine qui, dans Capriccio, se demande si les mots doivent passer avant la musique. On ne comprend pas grand‑chose des poèmes de Hermann Hesse et Joseph von Eichendorff. La voix est belle, somptueuse de texture et riche de couleurs mais pas exempte de vibrato et la technique vocale ne permet pas toujours de vaincre les nombreux pièges posés par ces lieder. Si la scène finale de Capriccio la voit plus à l’aise et concernée aussi par le texte, de trop nombreuses références du passé empêchent de s’extasier devant cet enregistrement (19439968352). OB


Christian Gerhaher : Mahler
Double défi : la version pour deux voix d’hommes du Chant de la terre et l’accompagnement réduit au piano. Mais ce défi n’est pas relevé, à moins qu’on ne soit davantage intéressé par la performance de Gerold Huber, qui s’efforce au maximum de faire oublier l’orchestre. Car le chant a capitulé, tant le baryton allemand et son partenaire, le ténor Piotr Beczala, apparaissent trop souvent en difficulté et s’attachent davantage à livrer une narration qui, pour être certes pleinement engagée, n’en demeure pas moins vocalement frustrante (Sony 9570219658). LPL


Maya Beiser : Bach
Précédée d’une flatteuse réputation d’interprète de la musique de notre temps, la violoncelliste américaine (née en 1963) s’abandonne à un grand n’importe quoi dans les six Suites. Sous le haut patronage de Merleau‑Ponty, elle « déconstruit et décontextualise, expérimente et explore des sons, des réverbérations, des harmoniques ». Résultat : l’instrument est constamment perdu dans le brouillard et l’écho, produisant des effets psychédéliques totalement hors sujet (album de deux disques Islandia Music Records IMR012). LPL


Pablo Heras-Casado : Schubert
Pourtant si différentes, la Cinquième comme l’Inachevée réussissent au chef espagnol (né en 1977) : le parti pris est novateur sans être iconoclaste, le geste net mais pas trop accentué, le tempo vif mais pas précipité, la sensibilité dramatique constante mais pas exagérée, tandis que l’Orchestre baroque de Fribourg, valorisé par l’acoustique du Festpielhaus de Baden‑Baden, confirme son rang parmi les meilleures phalanges sur instruments « anciens » (Harmonia Mundi HMM 902694). SC



La rédaction de ConcertoNet

 

 

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