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Entretien avec Juan Jesús Rodríguez
08/17/2021



J. J. Rodríguez (© Gastón Ríos)


«C’est pour l’art que je me bats»


Philippe Manoli a rencontré le baryton espagnol Juan Jesús Rodríguez (né en 1969) à la fin de juin 2021, en marge de la production nancéenne de Rigoletto.


Avant toute chose, je voudrais vous demander comment vous avez vécu le premier confinement de 2020, l’impossibilité de chanter, les annulations.
Sincèrement, pour moi, passer un an et demi à la maison avec ma famille, c’était un cadeau! Passer du temps avec ma femme et mes filles m’a fait beaucoup de bien. J’ai pu me ressourcer avec mes amis, avec mes forêts, j’adore mes forêts, c’est le cœur de la vie.


D’autres chanteurs l’ont vécu différemment.
Bien sûr, mais cela a été une excellente expérience pour moi. Evidemment, j’ai gagné moins d’argent, mais vous savez, le temps, la vie passent vite. J’ai passé précédemment un an et demi loin de chez moi, entre Zurich, Marseille, Berlin, Londres, alors cela m’a fait du bien de souffler un peu.


Vous venez juste de chanter la première de Rigoletto à Nancy: comment s’est-elle déroulée?
Ah, très bien! J’ai juste eu un problème lié à un courant d’air dans l’opéra: au deuxième acte, j’ai commencé à me racler la gorge. Au moment de « Cortigiani», j’ai éprouvé cette difficulté; j’en ai parlé plus tard à l’intendant, et il a vite trouvé une solution, car la fin de la série est très resserrée, avec un seul jour de repos entre les représentations, ce qui est trop peu pour un rôle si lourd.


Et comment abordez-vous cette production nouvelle?
Il nous a fallu deux semaines pour mettre un certain nombre de choses au point (nous avions cinq semaines de répétitions), mais j’ai trouvé l’idée de la danseuse qui représente la mère de Gilda vraiment magnifique, et finalement je crois que la mise en scène fonctionne très bien. Je suis amoureux de ce rôle et j’aime le jouer de façon plus classique. Mais tant que vous pouvez communiquer le sens profond de cette histoire, de cette musique, au travers des mots du livret, alors, ça me convient, et c’est le cas ici.


Cela vous est-il arrivé de vous retrouver en difficulté, en désaccord avec une production? Car aujourd’hui les transpositions sont très fréquentes, et pas toujours compréhensibles...
Oui, à Stuttgart, cela m’est arrivé. Ils voulaient le faire d’une façon très modernisée. En tant qu’artiste, je ne peux pas défendre un rôle si je ne crois pas à la conception défendue par la mise en scène. Si les mots n’ont plus de sens par rapport à ce qu’on montre, c’est impossible.


Et dans cette production nancéenne, vous avez de remarquables partenaires, comme Rocío Pérez dans le rôle de Gilda, qui non seulement chante magnifiquement, mais semble réellement avoir 15 ans, on croit voir une adolescente, et par ailleurs elle danse sur des pointes, c’est assez bluffant.
Ah, elle est extraordinaire, en effet. Sa voix est fantastique. Et on la prendrait pour ma fille, en effet. C’est pour cela que la fin de l’opéra est très compliquée émotionnellement, vous savez: ma femme est danseuse, ma fille aussi, alors je me retrouve dans une situation très proche de la réalité, c’est plus qu’émouvant, c’en est presque dangereux.


Nous l’avons sans doute ressenti: c’était extrêmement émouvant pour nous.
C’est parfait pour le public, et c’est mon travail de l’émouvoir, d’utiliser toutes les ressources pour le faire, mais c’est très difficile de garder le contrôle de mes émotions dans ce cas de figure.


J’imagine... Quels sont vos prochains engagements après cette production?
Je reprends Rigoletto au Festival de Bregenz tout l’été, puis à l’automne je chante à Madrid une zarzuela, Los gavilanes de Guerrero au Teatro de la Zarzuela, puis nous reprenons cette production de Rigoletto par Richard Brunel à Luxembourg en novembre.


Vous savez, durant cette période de pandémie, les théâtres espagnols ont été considérés ici comme un eldorado, car ils sont parmi les seuls au monde à être restés ouverts. Beaucoup de gens en France pensaient qu’il aurait été possible de faire de même, bien que cela n’ait pas été autorisé.
Et la situation était maîtrisée: j’ai chanté au Teatro de la Zarzuela et Rocío Pérez a chanté au Teatro Real durant cette période. Les opéras étaient très sûrs: tests PCR tous les jours pour les artistes, c’était un exemple pour les autres opéras. Même à La Corogne où je suis allé chanter, l’avion pour y aller était plein, mais le théâtre ne pouvait accueillir que deux cents spectateurs distanciés. L’Espagne n’a pas été épargnée par la pandémie, au contraire, mais elle a voulu montrer qu’il ne fallait pas tout arrêter, qu’il fallait vivre, mais avec prudence. Aucun cas positif n’a été détecté à Madrid, cela veut donc dire que c’était possible.


Et il me semble que ce Rigoletto, pour une reprise d’activité à Nancy, après tant de mois de fermeture, c’est une jouvence.
Oui, le public de la première a été très enthousiaste, à la fin de l’œuvre, et nous a bien récompensés. Le public, peut-être comme beaucoup de publics du nord, a mis du temps à s’échauffer, mais à la fin de l’opéra il s’est beaucoup extériorisé.


J’imagine que l’acoustique de l’Opéra national de Lorraine vous a aidé.
Oui, vraiment, elle est excellente et cela aide beaucoup. Naturellement, je m’adapte à l’acoustique des lieux. Je chante souvent dans de très grands théâtres, et on y chante différemment. Ici, on peut beaucoup plus nuancer, pas besoin de trop donner de la voix, on peut dresser un portrait plus fin du personnage.


Connaissiez-vous l’Opéra de Nancy?
Non, pas du tout, je ne suis pas ici en terre de connaissance. Ce n’est pas mon circuit habituel. Ce sont plutôt des connexions entre agents et directeurs qui m’y ont mené. Et bien que j’adore chanter, je ne veux pas être coupé trop longtemps de ma famille. A 52 ans, le temps compte de façon différente. Un mois et demi de temps pour une production concernant un rôle que j’ai beaucoup chanté, c’est trop, et c’est fatigant. Je peux comprendre: c’est le premier Rigoletto pour le metteur en scène, pour le chef d’orchestre, l’excellent Alexander Joel, pour Rocío Pérez aussi. Mais pour moi qui en ai déjà fait beaucoup, c’est trop long. Et je vais passer deux mois à Bregenz...


Ce n’est pas une sorte de lassitude du métier?
Oh, non, pas du tout, c’est une question de priorités. Je donne toujours le meilleur de moi-même pour le public, où que je sois. Mais il faut gérer la fatigue aussi. Vous savez, j’avais décidé de ne pas chanter, de «marquer» à la générale, car le calendrier était trop difficile: j’avais déjà chanté à pleine voix la pré-générale, et il y a cinq représentations très, trop rapprochées, avec un seul jour de repos entre elles. Mais quand j’ai vu le public de la générale, je n’ai pas pu m’empêcher de chanter.


Vous avez sans doute vu parmi le public de la générale des élèves très jeunes, peut-être âgés de 7 ou 8 ans: qu’en pensez-vous?
Un Rigoletto intégral est sans doute trop long pour eux. Des versions raccourcies pour enfants sont peut-être plus appropriées.


Mais existe-t-il en Espagne des liens entre écoles et opéras comme ici? On n’en fait sans doute jamais assez sur ce plan, et la nomination de Gustavo Dudamel comme directeur musical de l’Opéra national de Paris (OnP) est peut-être un signal fort dans cette direction en France: il est issu du fameux «Sistema» du Venezuela, qui a formé à la musique classique des centaines de milliers de jeunes Vénézuéliens issus de milieux peu favorisés.
Il y a quelques années cela s’est fait, mais pas de façon généralisée en Espagne, et c’est bien dommage.


Cela se fait beaucoup en France, avec les parcours opéra. C’est dans le cahier des charges de chaque maison d’opéra.
La découverte de voix sans amplification est un moment fort pour les enfants. Il est important de leur faire découvrir aussi tous les métiers qui gravitent autour d’une production. Ils peuvent y trouver une voie.


Au sujet de la voix justement, j’ai lu quelque part que vous étiez impressionné par les vendeurs de poissons capable de faire la criée pendant des heures sans abîmer leur voix. Est-ce parce qu’ils ont développé une technique?
Il est impossible de chanter plusieurs heures durant en criant à l’opéra. Bien sûr. Il faut une technique sûre. La voix doit passer l’orchestre et le chœur sans forcer. Vous savez, j’ai eu un professeur d’expression corporelle qui m’a expliqué ceci: il a dessiné une ligne droite, et au-dessus il a dessiné un cygne. Il m’a dit que le public devait voir le cygne, qui représente l’élégance de notre gestuelle, et pas les battements de ses pattes sous l’eau, qui sont la technique. On arrive à maturité quand on n’a plus à penser à la technique ou à tel ou tel conseil, quand tout cela est suffisamment intégré au point de devenir naturel.


Mais vous n’avez plus de professeur. Beaucoup de chanteurs continuent à dire qu’il n’est pas sain de rester sans oreille extérieure, sans un professeur qui vous suit durant toute une carrière. Ce n’est pas votre point de vue?
Non, ce n’est pas mon point de vue. Il faut se connaître soi-même, être l’expert de soi-même. Vous pouvez trouver des éléments qui vous aident sur le plan technique, peut-être avec des enregistrements, mais vous devez rester votre première autorité, pour que ça fonctionne. De mon côté, je recherche des choses chez les barytons du passé, bien sûr. Mais je me les approprie. Il faut rester celui qui décide.


Ce qui n’est pas évident dans un milieu où nombreux sont les gens qui vous conseillent de faire ceci ou cela...
Chacun doit trouver sa voie pour sa voix. Personnellement j’adore le baryton américain Cornell MacNeil (1922-2011). J’apprends beaucoup de lui, mais nous sommes très différents, je ne peux pas chanter comme il le faisait. Mais de lui, de Bastianini, de Stracciari, de Tagliabue, j’apprends beaucoup de détails importants sur des manières de faire. Ainsi il ne faut pas selon moi avoir un maître mais des quantités dans votre parcours.
Par ailleurs il y a des invariants à comprendre. Quand je fais des classes de maître, par exemple, souvent je vois des chanteurs dotés de grandes voix. Alors je leur dis de sentir l’espace, et de trouver une façon souple et douce de chanter, car quand vous chantez en force, vous perdez votre force. En chantant legato, morbido comme disent les Italiens, vous y arrivez, avec des voix différentes au départ. Je suis assez sollicité pour des classes de maître, mais vous savez, au bout de deux ou trois par élève, c’est suffisant. Pas besoin que cela dure trois ans...


Je crois que vous n’êtes pas d’accord non plus avec l’idée répandue de faire chanter beaucoup de Mozart en début de carrière aux jeunes.
Non, c’est une idée reçue. J’ai fait mes débuts en Don Giovanni à 50 ans. Mozart est si beau, mais si difficile à chanter! Et assez dangereux. Car si vous ne l’abordez pas de la bonne manière, vous pourrez le chanter deux ou trois ans, mais après... Vous savez, quand de jeunes barytons viennent me voir pour une classe de maître, la plupart du temps, ils me chantent l’air du Comte des Noces de Figaro, «Hai già vinta la causa». Un air qu’on m’a fait chanter au conservatoire, étant très jeune. Au début, ça a l’air facile, presque parlato, mais bien sûr, la fin c’est une autre histoire, avec la vocalise et le trille surtout. Et si vous leur demandez de chanter du bel canto, «Bella sicome un angelo» de Malatesta dans Don Pasquale par exemple, ils ne le peuvent pas. Ils ne maîtrisent pas assez le legato. Ils ne maîtrisent rien, d’ailleurs, car le legato, c’est la base même du chant, du fait du contrôle de la respiration. Et cela, ils ne l’apprennent pas avec Mozart. Ils l’apprennent avec le bel canto, et même avec le bel canto tardif de Verdi, si vous avez la voix pour Verdi bien sûr, vous apprenez beaucoup. Avec les mélodies de Puccini ou Verdi, vous apprenez beaucoup aussi, comme avec Malatesta ou Belcore ou Riccardo des Puritains.


Tant que nous sommes à parler des rôles de baryton, qu’en est-il de Scarpia? Plusieurs fois vous avez dit que c’était trop tôt pour vous. Et maintenant?
Eh bien... je l’ai refusé: on me l’a proposé à Rome il y a deux ans. Mais je pense que ce n’est pas un rôle pour moi. Peut-être dans dix ans, si je le sens. Mais vous savez, l’orchestre de Puccini n’est pas l’orchestre de Verdi. Il est tellement plus étoffé. Et la tessiture est différente: pour moi c’est un baryton-basse. Et je ne peux pas briller dans ces notes-là avec cet orchestre-là. Il faut faire des choix, en toute connaissance de soi.


C’est tellement difficile!
Oui, mais on est obligé, car c’est fondamental dans notre métier.


Justement, vous propose-t-on souvent des rôles qui ne sont pas pour vous, que vous devez absolument refuser?
Oh, oui. Souvent. C’est un combat pour moi. Mais tout notre métier est un combat permanent. Ce n’est pas moi que je défends ainsi, c’est l’œuvre, c’est la manière convenable de l’apporter au public, de lui apporter les émotions véhiculées par l’œuvre. C’est mon travail de faire en sorte que cela fonctionne. Si vous ne m’aidez pas pour aller dans ce sens, on va avoir un problème. Si vous me convainquez d’emprunter telle ou telle voie pour le faire, cela me conviendra. Sinon je devrai défendre l’œuvre, et cela n’ira pas. Si je ne suis pas convaincu par ce qu’on me fait faire, le public n’aura pas son lot d’émotions, l’œuvre ne sera pas servie. Si on fait telle ou telle chose sur commande, le public s’en aperçoit, on ne peut guère tricher, et sans sincérité, on ne touche pas le public.


Vous est-il même arrivé de refuser de faire ce qu’on veut vous imposer, ou de quitter une production?
Oui. Car c’est toujours un combat. C’est pour l’art que je me bats, c’est l’art que je défends. Il ne s’agit surtout pas d’avoir l’esprit fermé pourtant. Je suis toujours ouvert à beaucoup de propositions. Mais si quelqu’un vous demande de faire quelque chose qui heurte l’œuvre, ça n’ira pas.


Mais le problème est que bien souvent on vous engage pour quelque chose, sans que vous sachiez ce que cela sera.
Oui, c’est ainsi que le métier fonctionne. Par exemple, pour ce Rigoletto de Nancy, je ne savais rien, ni le nombre de représentations, ni le nombre de jours de repos, ni la teneur de la mise en scène. Rien.


C’est bien difficile pour les chanteurs de travailler ainsi!
Extrêmement difficile. Nous sommes le dernier maillon de la chaîne dans la production d’opéra. La dernière roue du carrosse, si vous voulez. C’est assez problématique, mais c’est ainsi. D’autant plus problématique qu’on perd beaucoup trop d’énergie dans ces combats-là, alors qu’il nous en faut énormément pour chanter. Il y a tellement de luttes de pouvoir entre le chef d’orchestre, le metteur en scène, les chanteurs, que tous y perdent trop souvent. Pourtant, si on arrive à faire de ces gens réunis une vraie équipe, alors on va loin.


J’aimerais aborder la question des enregistrements. Votre voix par exemple est assez différente en salle par rapport aux enregistrements. J’imagine que cela vous nuit, puisqu’aujourd’hui tant de réputations se font sur des enregistrements trouvables sur internet.
Vous avez raison, hélas. Par exemple je suis allé à Naples pour un Trouvère avec Nicola Luisotti, il ne connaissait ma voix que par YouTube, et il n’était pas très convaincu. Quand je suis arrivé, il a beaucoup apprécié mon chant, et a admis que c’était tout autre chose que ce qu’il avait entendu en enregistrement. Je suis conscient que ma voix est mal reconnue en enregistrement, et je ne fais donc pas de promotion par les réseaux sociaux, etc.


C’est une maladie de notre temps, l’aspect virtuel des choses est devenu un peu dominant.
Bien sûr, alors que la magie de l’opéra ne fonctionne qu’en salle. Sans rien entre nous et le public, sans technologie qui nous sépare de la vie, de la nature, du réel.


Et c’est peut-être une des raisons pour lesquelles certaines carrières ont un succès plus ou moins mérité, alors que d’un autre côté certains grands artistes sont sous-estimés.
C’est plutôt un problème d’agents. Vous ne pouvez chanter dans certains lieux de prestige comme l’Opéra de Paris si vous n’avez pas l’agent qui peut vous y mener. Par exemple, quand j’ai chanté à Marseille, les critiques étaient élogieuses, et allaient jusqu’à demander pourquoi un baryton comme moi ne chantait pas à Paris. Tout simplement parce que mon agent était au plus mal avec le directeur de l’OnP. C’est la seule raison.


Voilà pourquoi vous avez pu chanter au MET, mais pas à Paris.
Et à Covent Garden, Berlin, etc. Mais je vais changer d’agent, et j’espère que cela ira mieux. Il faut que j’arrive à toucher le public, et pour cela il faut que je puisse me produire. Les gens ont besoin de partager des émotions, rire ou pleurer. J’y pense à chaque fois que je me prépare à chanter. Si vous arrivez à toucher vraiment ne serait-ce qu’une seule personne dans le public, c’est fantastique. C’est ce qui rend notre métier merveilleux. Le reste n’a que peu d’importance. Etre le plus reconnu, chanter au MET, tout cela n’a guère d’importance. L’important est de toucher le public, ce qui revient à changer un petit bout du monde par l’effet de notre art.


Vous savez, quand je vous ai vu sur scène lors de la générale avec votre genouillère, un instant je me suis demandé si vous étiez réellement blessé, ou si c’était une idée de la production. Vous incarnez tellement le rôle, que l’on va jusqu’à se demander jusqu’où on est dans la réalité, et où commence l’art. Car vous êtes très costaud, mais avec cette genouillère vous êtes à la fois fort et vulnérable, ce qui est le fond même du personnage. C’est assez impressionnant. Car avec presque rien vous faites l’essentiel.
C’est bien ce que j’ai essayé de faire!


Vous me disiez en début d’entretien qu’Alexander Joël dirigeait ici son premier Rigoletto. C’est à peine croyable, car sa direction m’a paru d’une maturité et d’une plénitude rares.
Oui, parfaitement, il a fait un travail merveilleux. Par exemple, hier, je discutais avec lui, lui demandant pourquoi il ne jouait pas dans les plus grands théâtres. Il m’a répondu qu’il avait joué à Covent Garden, mais que son agent ne réussissait pas à lui faire avoir des contrats fréquents dans les grandes maisons. Et pourtant, il fait partie, lui ai-je dit, des deux ou trois plus grands chefs avec lesquels j’ai travaillé. Et j’ai travaillé avec Lorin Maazel, Zubin Mehta, beaucoup de grands chefs célèbres. Alexander Joel est un vrai chef d’opéra, comme il y en a très peu. Il fait attention aux chanteurs, il est toujours avec vous, mais il ne perd pas de vue l’ensemble. On se sent très en confiance avec lui.


J’ai remarqué qu’il ne saluait pas le public au début de l’opéra, peut-être par timidité. C’est rare. Mais j’ai surtout remarqué que vous êtes le seul à ne pas saluer le public seul, à ne pas prendre de saluts pour vous-même, mais uniquement en tenant les mains de l’équipe. Est-ce toujours ainsi?
Oui, parce que notre travail est un travail d’équipe. Je fais toujours ainsi. Je ne saurais faire autrement.


[Propos recueillis par Philippe Manoli]

 

 

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