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Le mois du mélomane professionnel 10/01/2018
Ces mois de vacances m’ont fait du bien, beaucoup de bien. Je reprends le collier avec courage et énergie. Je change aussi ma photo pour mieux correspondre à la réalité d’aujourd’hui.
Mes oreilles et mes yeux n’ont pas chômé pendant tout ce temps. Je vais vous raconter quelques événements qui m’ont particulièrement marqué.
D’abord, un Nabucco à Vérone sous la baguette de l’Israélien Daniel Oren et la mise en scène d’Arnaud Bernard, avec un changement total d’époque qui ne m’a nullement gêné puisque fait avec intelligence et cohérence parfaite. Il s’agissait de déplacer l’action dans l’espace de Jérusalem à Milan et dans le temps, du Ve siècle avant notre ère à notre XIXe. Les Juifs sont devenus Italiens et les Babyloniens, Autrichiens. Très réussi, surtout quand on pense que le «Va pensiero» d’alors a été pensé par Verdi pour son temps et pour la lutte pour le devenir de l’Italie. Pas de critique. Ce fut tout bon.
Deux Flûte enchantée, une à Salzbourg en août et une à Bruxelles la semaine dernière. Je les mentionne mais je ne peux pas en parler vraiment car à Salzbourg, la mise en scène m’a fait fuir après 10 minutes et à la Monnaie, après 5. J’aurais dû me méfier de la mise en scène de Romeo Castellucci à la Monnaie après le «massacre» du Moïse et Aaron à la Bastille. Comment osent-ils? Et comment les opéras acceptent-ils? Et comment les publics permettent-ils cela?
J’ai profité de ma liberté pour regarder des documentaires. Deux, sur des violonistes magnifiques, Janine Jansen et Julia Fischer. Belles et excellentes musiciennes. Et Fischer, en plus, excellente pianiste. J’ai revu le concert de Francfort, où elle jouait en première partie le Troisième Concerto pour violon de Saint-Saëns et, en seconde partie, le Concerto pour piano de Grieg. Génial. Puisque je suis chez les femmes violonistes, une découverte, le Premier de Paganini par Sarah Chang avec Zubin Mehta. Une merveille. Et puisque je suis chez Paganini, un documentaire passionnant sur un concert à Maastricht où Shlomo Mintz, accompagné par l’Orchestre du Limbourg sous la direction de Yoel Levi, a joué Paganini sur le Guarneri del Jesu «Il Cannone», que le grand violoniste a légué à sa ville de Gênes. Un vrai thriller avec tout ce qu’il fallait comme intervention des polices pour la sécurité de l’instrument. Comme une relique religieuse.
Là, nous arrivons à septembre. Une belle rentrée. Surtout, plein d’opéras. Une Carmen (un de mes opéras préférés) à Liège sous la direction d’une femme, Speranza Scappucci, et dans une mise en scène de Henning Brockhaus avec une Carmen, Nino Surguladze, qui avait tout du personnage avec, en plus, une belle voix de mezzo et même de beaux mouvements de danse (deuxième acte chez Lillas Pastia). Je reste en Belgique où j’ai repris mes habitudes à l’Opéra des Flandres. Cette fois-ci, c’était à Gand pour y voir Lohengrin sous la direction d’Alejo Pérez et dans la mise en scène de David Alden. Le hasard a fait qu’en rentrant à Paris, je suis tombé, sur YouTube, sur le Lohengrin de Bayreuth de cet été. Je ne veux pas faire des comparaisons entre l’Elsa de Gand, Liene Kinca, prise de rôle, et Anja Harteros de Bayreuth, ou bien entre l’Ortrud de Gand, Iréne Theorin, prise de rôle, et Waltraud Meier de Bayreuth, mais je peux affirmer que le spectacle de Gand fut bien supérieur à celui de Bayreuth, surtout que le Telramund de Gand, Craig Colclough, prise de rôle aussi, était exceptionnel.
Pour terminer, je n’ai pas résisté au plaisir de voir, pas plus tard qu’hier, et pour la quatrième fois, le Tristan et Isolde de Peter Sellars et du vidéaste Viola. Je ne sais si vous remarquez que je fais la paix avec l’opéra. J’ai l’impression qu’il y a quand même une amélioration dans les mises en scène par rapport à ce qui me faisait fuir l’opéra depuis quelques années. C’est rassurant.
L’automne est là et, pour mon prochain éditorial, ce sera déjà le temps de la Toussaint. Les feuilles de mes arbres du Luxembourg seront déjà en train de tomber. Ainsi va le temps.
Benjamin Duvshani
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