About us / Contact

The Classical Music Network

Editorials

Europe : Paris, Londn, Zurich, Geneva, Strasbourg, Bruxelles, Gent
America : New York, San Francisco, Montreal                       WORLD


Newsletter
Your email :

 

Back

Entretien avec Kresimir Spicer
10/06/2015


Applaudi par le public parisien dans Orlando paladino de Haydn au Châtelet, La Didone de Cavalli au Théâtre des Champs Elysées ou encore David et Jonathas de Charpentier, Kresimir Spicer compte parmi les meilleurs ténors de sa génération. Il est à l’affiche de l’ouverture de la saison lyrique avenue Montaigne dans Theodora, un des plus fascinants oratorios de Haendel dirigé par l’incontournable William Christie et dans lequel Stephen Langridge se mesure à l’aura désormais légendaire de la mise en scène de Peter Sellars. A quelques jours d’endosser pour la première fois le rôle de Septime, il a accepté de nous rencontrer et parler un peu de sa – déjà – riche carrière.


                  
K. Spicer (© Balmer & Dixon)


Vous abordez pour la première fois Theodora. Qu’est-ce qui vous attire dans le personnage de Septimus?
Contrairement aux autres personnages, qui ont le caractère – et le destin – fixés dès le début, Septimus est le seul à manifester des hésitations, ce qui le rend à la fois plus «humain» et plus proche de nous. On a d’ailleurs travaillé cet aspect-là avec le metteur en scène. J’ai approfondi avec lui le personnage, et c’est une démarche que j’apprécie.


Justement, après Lucio Silla et Idoménée, vous vous semblez vous intéresser à des rôles dramatiquement complexes...
Oui, en effet. Bien sûr, la vocalité est importante, mais la simple virtuosité, sans profondeur expressive ne me passionne pas. C’est d’ailleurs pour cela que je fais peu de bel canto. J’aime qu’il y ait une richesse psychologique lorsque j’incarne un rôle sur scène.


On vous a souvent vu dans le répertoire baroque en France. Est-ce un choix? N’avez-vous pas peur d’être «étiqueté»?
C’est amusant car chez moi, en Croatie, et en Europe centrale, on me connaît d’ailleurs pour la musique postromantique et le XXe siècle. Il y a toujours des gens qui veulent vous mettre dans des cases, c’est vrai. En même temps, les rôles que j’aborde, je les choisis aussi en fonction de l’écriture et de l’évolution de ma voix.


Certains en effet se sont parfois brûlé les ailes...
Je suis vigilant à cela. Il m’est arrivé que l’on me propose des choses, que j’ai refusées car je sentais que c’était prématuré.


Avez-vous des projets, justement, hors du baroque?
Il y en a un qui n’a pas pu se faire pour des raisons d’agenda, à Zagreb, c’était Parsifal. Les conditions étaient d’ailleurs idéales pour le rôder, sachant que là-bas, je ne suis pas identifié «baroqueux» comme ici.


Plutôt Parsifal que Lohengrin?
Oui, car dans Lohengrin, on a un orchestre plus puissant à affronter. En fait, Parsifal est certes central, mais confortable pour ma tessiture, moins héroïque en un sens que Lohengrin. Et je préfère cela à Erik pour mon premier Wagner. Mon agent m’en a déjà parlé, mais le personnage est vraiment réduit. Cela étant, je sais bien qu’il faut commencer quelque part, et peut-être ce sera par Le Vaisseau fantôme.


Revenons à la mise en scène. Que vous inspirent les adaptations et les coupures qui sont parfois réalisées dans les œuvres?
Je ne pense pas que ce soit nécessaire. On doit respecter le texte, sinon ça finit par ne plus avoir de sens. Pour autant, je sais bien qu’il faut parfois couper pour des questions d’équilibre ou d’efficacité théâtrale, mais il ne faut pas faire dire à l’œuvre des choses qui lui sont contraires ou en ajouter qui n’y sont pas. Cela étant, ici il y a quelques coupures, et dans Lucio Silla par exemple, Marc Minkowski avait voulu ajouter un dernier air, car la construction du personnage semblait sinon bancale. Dans cet opéra de jeunesse, Mozart avait été bridé par la médiocrité de l’interprète qui a créé le rôle. En fait il faut écouter le texte et la musique, et par exemple, mon dernier air, s’il est fade pour ce qui est des paroles, l’introduction orchestrale est si inouïe, qu’on a été d’accord avec William Christie que l’on ne pouvait pas s’en priver, et la mise en scène s’adapte ainsi. C’est un travail d’équipe.


[Propos recueillis par Gilles Charlassier]

 

 

Copyright ©ConcertoNet.com