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CD, DVD et livres: l’actualité d’octobre
10/15/2014



Les chroniques du mois



Must de ConcertoNet


   K. Böhm dirige Elektra à Vienne




 Sélectionnés par la rédaction


   Œuvres chorales de Birtwistle


   «The Richard Strauss Collection»


   Carlo, Re d’Alemagna d’A. Scarlatti




 Oui !

Nelson Freire interprète six concertos
Bernard Haitink dirige Haydn
Capriccio à Vienne (2013)
Sviatoslav Richter interprète Scriabine
Le duo Pestova/Meyer interprète Cage
Guennadi Rojdestvenski dirige Prokofiev



Pourquoi pas?

Elektra à Salzbourg (2010)
Annie Fischer interprète Beethoven, Liszt et Mozart
Paul Badura-Skoda interprète Beethoven
Lulu à La Monnaie (2012)
Nelson Freire interprète Beethoven
Giuseppe Sinopoli dirige à Dresde (1998)
Catherine Manoukian et Gunilla Süssmann interprètent Brahms
Tatiana Nikolaïeva interprète Chostakovitch
Dora Deliyska interprète Schubert et Beethoven
La pianiste Serena Wang



Pas la peine

Wilhem Latchoumia interprète Wagner
O. Chauzu interprète Beethoven
Le chant straussien en images (1961-1970)
Pierre-Laurent Aimard interprète Bach
Clemens Krauss dirige Haydn
Salomé à Bologne (2011)
Janina Fialkowska interprète Chopin
Einav Yarden interprète Beethoven et Stravinski
Pierre Boulez dirige à Moscou




Le match du mois


           

La Création de Haydn: C. Krauss vs. B. Haitink





En bref


Cage à deux pianos: fin du cycle
Prokofiev: la référence Rojdestvenski
Un Capriccio viennois plutôt qu’une Salomé bolognaise
Richter et Nikolaïeva, monstres sacrés du piano russe
Piano au féminin: le toucher rempli de promesses de Dora Deliyska, Serena Wang et Einav Yarden
Le Chopin de Fialkowska: Mazurkas aristocrates
Boulez dirige à Moscou
Brahms et le souffle du Grand Nord



Cage à deux pianos: fin du cycle





Dans la collection «American Classics» de Naxos, Xenia Pestova (née en 1979) et Pascal Meyer> (né en 1979) présentent le troisième et dernier volume d’un ensemble qui illustre le cheminement de la pensée et des préoccupations musicales de John Cage au fil des ans, au travers du duo de piano, après le premier, explorant l’art des sons jusqu’aux contraintes du piano jouet, le deuxième, confrontant deux périodes très différentes du compositeur américain. Les pièces majeures de cet album font appel à la créativité, à la qualité d’écoute et à l’interdépendance des interprètes, et proposent une multiplicité de choix soumise à la gestion du temps (la durée d’un évènement sonore) comme élément structurel. Winter Music (1956-1957) a toutes les apparences d’une partition rigoureusement bâtie, aux accords attaca expressifs et aux allures légèrement d’avant-garde, mais l’envergure des principes d’indétermination mis en œuvre ne peut aboutir à deux exécutions identiques. La partition est écrite pour un nombre de pianos indéterminé entre un et vingt. Libre du choix des intensités et des durées et même de la composition exacte des accords sur le nombre de notes proposées, chaque interprète peut jouer entre une et vingt des vingt pages de sa partie. La page devient l’unité de temps. Le fait même que la cohérence reste toujours totale ajoute à la fascination que l’on peut éprouver devant les procédés imaginatifs du compositeur et la souplesse attentive des interprètes. La structure de Two2 (1989) est celle du renga, forme de poème japonais de trente-six strophes ou tankas dont Cage fait des événements de cinq mesures au nombre de sons ou d’agrégats fixes (5-7-5-7-7), le temps structurel étant la mesure, chacune à durée indéterminée. A l’esprit un rien zen, l’interprétation poétique, aérée et lumineuse du duo Pestova/Meyer témoigne de leur sens aiguisé du phrasé et de leurs qualités d’entente, de musicalité, d’expressivité et d’écoute. Les deux pianistes terminent leur programme par un bref morceau entièrement noté écrit pour Merce Cunningham en 1945. Le délicat Experiences n° 1 évoque sur un mode pentatonique un calme tout oriental encore sous l’influence de Satie, que Cage tenait en haute estime. Pour ce duo engageant formé en 2003, ce nouveau programme est une troisième réussite (8.559728). CL




Prokofiev: la référence Rojdestvenski





Ces enregistrements, salués dès leur parution chez Le Chant du monde, sont très connus mais l’intégrale des Symphonies de Prokofiev réalisée entre 1965 et 1967 sous la direction de Guennadi Rojdestvenski (né en 1931) méritait pleinement une réédition, même si ce triple album à prix moyen se contente d’une brève notice (en anglais et en russe). Insurpassable dans les terrifiantes Deuxième et Troisième, le chef russe, dans les autres symphonies, fait jeu égal avec les plus grands, parvenant même à magnifier la malaimée Quatrième (ici dans sa seconde version de 1947) et à dénicher une noirceur insoupçonnée dans la négligée Septième. Bien que virtuose, l’Orchestre symphonique de la Radio de Moscou, où Rojdestvenski avait succédé en 1961 à Alexandre Gaouk, n’est pas Berlin ou Vienne mais c’est sans doute mieux ainsi, car la musique gagne à ces couleurs formidablement typées, d’autant qu’il le galvanise, le fait chanter, hurler comme personne: des témoignages entiers, brûlants, intenses, comme saisis sur le vif, qui rendent justice aussi bien au lyrisme qu’au drame, à l’humour, à la générosité ou à l’ironie (Melodia MEL CD 10 01797). SC




Un Capriccio viennois plutôt qu’une Salomé bolognaise


        


Le cent cinquantième anniversaire de la naissance de Richard Strauss est l’occasion – ou le prétexte – à de multiples publications en DVD. Ainsi de cette Salomé bolognaise de janvier 2010 – filmée de manière plutôt paresseuse par la RAI (.. excepté l’apparente passion du réalisateur pour les gros plans sur les aisselles du prophète dénudé). En homme de théâtre, le metteur en scène italien Gabriele Lavia restitue intelligemment l’action – la transposant au passage dans une sorte de caserne militaire prussienne (et recourant à une loupe géante pour organiser le strip-tease intégral de la princesse de Judée) – mais n’apporte rien qui mérite de passer à la postérité. On mentionnera une Salomé (blonde) chantée honorablement (malgré des aigus hésitants et une tendance à l’essoufflement) par Erika Sunnegardh, qui domine aisément le Jochanaan endurant mais monochrome de Mark S. Doss. Si l’on oubliera un Narraboth ridiculement belcantiste (Mark Milhofer), le couple tétrarqual (Robert Brubaker, Dalia Schaechter) en impose. Quant à la direction de Nicola Luisotti à la tête de l’Orchestre du Teatro comunale, elle file sans écorcher (Arthaus Musik DVD 101 699 ou Blu-ray 108 096). Filmé en 2013 au Staatsoper de Vienne, Capriccio offre, lui, le bonheur de retrouver la Comtesse de référence de Renée Fleming dans une prestation de grande classe – moins attachante néanmoins qu’à New York en 2011 et surtout à Paris en 2004 (ce dernier DVD demeurant la référence en vidéo). Christoph Eschenbach déploie des trésors de beauté à la tête de l’Orchestre de l’Opéra de Vienne. Et si le vétéran Kurt Rydl est un La Roche vocalement fatigué mais scéniquement crédible, le reste de la distribution est de bonne tenue (Skovhus, Schade, Kirchschlager, Eiche). Jouant sur des plateaux tournants et des perspectives en miroir, la mise en scène de Marco Arturo Marelli – pour adroite qu’elle soit – a un air de déjà-vu. Une routine de luxe, en somme – typiquement viennoise (C Major A04050006). GdH




Richter et Nikolaïeva, monstres sacrés du piano russe


        


A l’image de ces deux albums, les archives soviétiques sont une inépuisable caverne d’Ali Baba. Les pépites laissées par Sviatoslav Richter (1915-1997) figurent parmi les plus beaux joyaux. Ces témoignages scriabiniens en sont un superbe exemple. Comme Sofronitsky et Horowitz, Richter parvient à équilibrer douleur et extase, violence et abandon, avec un génie qu’il serait vain de décrypter mais dans l’opium duquel on s’abandonne sans retenue. Moins dans la Sixième Sonate que dans la vingtaine d’Etudes et de Préludes de Scriabine – tous issus de concerts mosrcovites du début des années 1950. A thésauriser, malgré un son toujours aussi réverbéré (Andromeda ANDRCD 5134). La réédition des vingt-quatre Préludes et Fugues de Chostakovitch interprétés par la dédicataire et créatrice de l’œuvre, Tatiana Nikolaïeva (1924-1993), ont eux aussi valeur de modèle. Ils demeurent un témoignage précieux de l’art d’interpréter le compositeur. Soulignons néanmoins que cette version de 1987 – qui n’a jamais été la meilleure de la pianiste russe (l’album Hyperion reste préférable) – a un peu vieilli. Quoiqu’exemplaire d’éloquence et de précision, la raideur du toucher fait trop le vide autour du clavier. La discographie s’est, du reste, beaucoup enrichie (voir, par exemple, David Jalbert, Jenny Lin ou Olli Mustonen) et est désormais dominée par le coup de maître de Vladimir Ashkenazy (Decca) à la fin des années 1990 (triple album Melodia MEL CD 10 02269). GdH




Piano au féminin: le toucher rempli de promesses de Dora Deliyska, Serena Wang et Einav Yarden


                     

         


Beaucoup de beau piano dans ces trois albums au féminin.
Celui de la pianiste bulgare Dora Deliyska (née en 1980) ose s’attaquer à deux monuments du répertoire. Le premier mouvement de la Dernière Sonate de Schubert impressionne par sa cohérence et son intensité sans temps morts, malgré un relâchement volontaire du poignet en fin de phrase et des ralentis qui – en l’absence de conception d’ensemble cohérente – agaceraient au plus haut point. Avec des aigus certes un peu ordinaires, mais des graves d’une densité rare – qui font chanter le Bösendorfer. Le reste ne se situe malheureusement pas au même niveau. La lenteur de l’Andante sostenuto souffre d’un toucher parfois un peu vide et gagnerait à s’appuyer sur un doigté moins tranchant. Deux défauts que l’on retrouve chacun, respectivement, dans l’Allegro ma non troppo (un peu somnolent) et le Scherzo (trop anguleux). L’interprétation de la Dernière Sonate de Beethoven est, elle aussi, inaboutie. Le Maestoso tarde à accrocher – peinant, du coup, à lancer l’Allegro con brio et appassionato, qui ne monte que trop lestement en puissance. L’Arietta est lestée par la même lenteur du démarrage, certaines variations faisant du surplace. Mais l’articulation est globalement de haute tenue et la construction très propre. Enfin, le Meeresstille de Schubert (un lied transcrit par Liszt) révèle une belle profondeur de toucher, même si l’on demande à éprouver le jugement de la notice («due to her many recordings of works by Franz Liszt, she is considered one of the most important Liszt interpreters of the young generation»). A noter: la version physique du disque est livrée avec un DVD d’une demi-heure contenant une interview de la pianiste ainsi que des œuvres de Liszt et du Beethoven (Gramola 99018).
Einav Yarden (née en 1978) propose également Beethoven dans un disque curieusement baptisé «Oscillations». Les Sixième et Dixième Sonates sont découpées avec minutie et charme, mais la légèreté du style – qui peut tout à fait convenir à ce répertoire – ne laisse finalement que peu d’empreinte parce que la pianiste israélienne surjoue la fantaisie et l’humour (ramenant Beethoven à Haydn) et manque de souffle. Les Bagatelles opus 119 – éclaircies et anonymisées – n’y résistent pas. Occupant l’autre versant de ces oscillations pianistiques, les Stravinsky (la Sonate et quelques pièces de petit format) sont autrement plus probants et collent mieux au style d’Einav Yarden (Challenge Classics CC72599).
Benjamine de l’étape (et de loin!), la Chinoise Serena Wang (née en 2004) enregistre une série de petites pièces regroupées sous l’étiquette: «Dances of the Dolls». Davantage qu’une référence à la Danses des poupées de Chostakovitch (dont elle livre une interprétation rafraîchissante), ce disque de 50 minutes est un hommage aux miniatures chinoises (de charmantes mélodies d’une ou deux minutes signées He Lu Ting, Dan Zhao Yi, Fu Gen Chen ou Tan Dun). On reste bluffé par la précocité des talents et l’on applaudit – dans les Villageoises (Poulenc) plutôt que dans un Rêve d’amour (Liszt) bien pâle, une timide Deuxième Sonate (Mozart) et une brumeuse Fantaisie-Impromptu (Chopin) – l’accomplissement technique comme la sensibilité du toucher de cette toute petite fille, que l’on espère voir mûrir sans s’abîmer dans le star system (Channel of China CCS 81014). GdH




Les Mazurkas aristocrates de Fialkowska





Alors qu’une tumeur l’a contrainte à l’arrêt de ses activités musicales au début des années 2000, Janina Fialkowska (née en 1951) revient à ses premières amours avec cette intégrale des Mazurkas de Chopin enregistrées à Québec en 2012 et 2013. La pianiste canadienne déploie un jeu musclé mais un legato asséché, presque aristocratique par moments – conforme à l’esthétique d’intériorité qu’elle applique à Chopin («contrairement à ses quasi-contemporains Schumann et Liszt, Chopin n’était pas porté à étaler ses pensées et ses émotions les plus intimes à la vue du grand public; cela aurait été contraire à sa nature sur le plan esthétique. Loin des conflits entre Florestan et Eusèbe, dépeints avec éloquence dans les compositions troublées de Schumann, et du dilemme faustien, omniprésent dans les épanchements de Liszt, Chopin portait ses sentiments tout contre son cœur et certainement pas à fleur de peau»). Les cinquante-cinq Mazurkas reposent sur un piano bien balancé, très porté sur l’articulation rythmique, mais souvent raide voire expéditif – en comparaison surtout de la référence affichée à Arthur Rubinstein (à qui Fialkowska doit le début de sa carrière, après le troisième prix remporté lors du tout premier concours Rubinstein de 1974). Comme pour ses albums consacrés aux Concertos ou aux Etudes, Impromptus et Sonates, voici donc un Chopin rigoureux et hautain – avare en tendresse (double album ATMA ACD2 2682). GdH




Boulez dirige à Moscou





En janvier 1967, Pierre Boulez (né en 1925) avait dirigé dans la grande salle du Conservatoire de Moscou son Orchestre symphonique de la BBC dans des œuvres de Berg, Stravinski et Webern ainsi que dans son propre Eclat. Vingt-trois ans plus tard, à la faveur de l’évolution de la situation politique, il revient avec l’Ensemble intercontemporain et comme Solti ou Rilling à la même époque, fait travailler l’Orchestre symphonique du Conservatoire de Moscou. Dans la même salle et chez le même éditeur qu’en 1967, l’enregistrement public, le 5 mars 1990, du concert qu’il donne à la tête de cette formation témoigne une nouvelle fois de son engagement auprès des jeunes musiciens mais a avant tout valeur documentaire, car les faiblesses, notamment chez les cuivres, sont trop nombreuses, les instruments paraissent de piètre qualité et la prise de son, dans une acoustique très mate, est assez déséquilibrée. Quant à Boulez, son programme est tellement boulézien – autour de la modernité au tout début du XXe siècle – qu’il a fait mieux, à de multiples reprises, dans chacune de ces trois œuvres: La Mer de Debussy, l’Opus 6 de Webern et Petrouchka (version de 1911) de Stravinski (Melodia MEL CD 10 02255). SC




Brahms et le souffle du Grand Nord





Alors que la discographie des Sonates pour violon et piano de Brahms vient à peine de s’enrichir de la superbe version de Corey Cerovsek et Paavali Jumppanen (lire ici), la violoniste canadienne Catherine Manoukian (née en 1981) et la pianiste norvégienne Gunilla Süssmann (née en 1977) viennent ajouter leur pierre à l’édifice – leur sculpture de glace, pourrait-on dire, tant le souffle du Grand Nord paraît polir les angles de ce Brahms-là. On salue la netteté des traits des deux partenaires et leur jeu sobre et clair, au service de la rythmique brahmsienne. Celle-ci brille tel un diamant – avec une propreté dans le coup d’archet qui rend l’architecture limpide. Le revers de la médaille se situe dans une insistance à marquer les accents – presque laborieuse par moments –, qui peut tourner à la brutalité, et dans un manque global de densité qui trouve probablement sa source dans une approche littérale de ces partitions. Au total, un Brahms net mais lisse, servi par une belle prise de son et complété par le rare Scherzo en ut mineur (WoO 2) de 1853 – seul rescapé d’une œuvre pour violon et piano jamais publiée (Berlin Classics 0300567BC). GdH



La rédaction de ConcertoNet

 

 

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