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CD, DVD et livres: l’actualité de novembre
11/15/2013


Les chroniques du mois




Must de ConcertoNet


Le Quatuor Ebène interprète Mendelssohn


Alexis Kossenko dirige Vivaldi




Sélectionné par la rédaction


Lang Lang interprète Prokofiev et Bartók


La fanciulla del West à Stockholm (2012)


Valentin Radutiu interprète Enesco






Oui!

Œuvres de Nguyen Thien Dao
Valery Gergiev dirige L’Or du Rhin
Wilhelm Furtwängler dirige Beethoven
Olivier Baumont interprète Telemann
Roger Norrington dirige Schubert
Thomas Dausgaard dirige Schubert
«Piano des Lumières» avec Edna Stern
Parsifal à La Monnaie (2011)
Paul et Huw Watkins interprètent Bax, Bowen et Ireland
Jean-Frédéric Neuburger interprète Ravel
Les frères Capuçon interprètent Saint-Saëns
Seize rééditions chez Naïve
Géza Anda interprète Beethoven
Anthologie du concours Reine Elisabeth (piano)
Le Quatuor Amadeus interprète Beethoven
Laurence Equilbey dirige Brahms
Tatjana Vassiljeva interprète Haydn




Pourquoi pas ?

John Tomlinson chante Britten, Chostakovitch et Wolf
Riccardo Muti dirige Otello à Chicago
Neeme Järvi dirige Wagner
Enregistrements wagnériens à Dresde (1945-1956)
L’ensemble Zefiro interprète Telemann
Paul Badura-Skoda interprète Mozart
Ophélie Gaillard interprète Brahms
Livre-disques «Charles Baudelaire, le musicien»
Macbeth à Glyndebourne (1972)
Carolin Widmann interprète Feldman




Pas la peine
Gemma Bertagnolli chante Telemann
Gerd Schaller dirige Schubert




Hélas!
Marin Alsop dirige Brahms







L’entretien du mois



Edna Stern







Le match du mois



Symphonies de Schubert: Dausgaard, Norrington ou Schaller?







En bref


Le Ravel de Neuburger: du très beau piano
D’outre-Manche, trois Sonates pour violoncelle et piano
La référence Naïve
Retour d’Erato avec les frères Capuçon
Haydn et Mozart garantis sans matière grasse
Ophélie Gaillard en retrait dans Brahms
Deux femmes pour le Requiem allemand
Le Reine Elisabeth: une deuxième rétrospective
Archives beethovéniennes (1): Géza Anda
Archives beethovéniennes (2): le Quatuor Amadeus
Le Parsifal hors norme de la Monnaie
Feldman: du temps et de la patience
Les musiques de Baudelaire, Baudelaire mis en musique
Paul Badura-Skoda se porte comme un charme
Un Macbeth pour collectionneurs et nostalgiques





Le Ravel de Neuburger: du très beau piano





Toujours fidèle à Mirare, Jean-Frédéric Neuburger (né en 1986) consacre son dernier disque à Ravel. Le pianiste livre un Gaspard de la nuit minutieusement élaboré. Plus cérébrale que sensuelle et intuitive, son interprétation se distingue par la netteté des traits, la clarté de l’élocution et la richesse des détails. Valorisée par l’acoustique de la Ferme de Villefavard, la sonorité s’avère particulièrement remarquable, constamment belle et riche en couleurs sur toute l’étendue de la dynamique – les forte sonnent impeccablement. Jouées à la pointe sèche, les Valses nobles et sentimentales témoignent d’une grande conscience de la forme et d’une capacité d’abstraction poussée. Cet album abouti, personnel et intellectuellement stimulant se referme sur un Tombeau de Couperin soigneusement découpé et d’un élan irrésistible (MIR 232). SF




D’outre-Manche, trois Sonates pour violoncelle et piano





Célèbre avant tout outre-Manche, le violoncelliste et chef d’orchestre Paul Watkins (né en 1970), autrefois premier violoncelle solo de l’Orchestre symphonique de la BBC et membre du Nash Ensemble, est actuellement membre du Quatuor Emerson, principal chef invité de l’Orchestre d’Ulster et directeur musical, depuis 2007, de l’Orchestre de chambre anglais. Son frère cadet Huw (né en 1976) est compositeur et pianiste. Quoi de plus naturel que de se produire ensemble en se consacrant aux sonates pour violoncelle et piano de compositeurs britanniques? Après un premier disque chez Nimbus (Bridge, Britten, Goehr, Watkins), voici le deuxième volume d’une série de sonates entreprise sous l’étiquette Chandos. Pour le premier volume, ils ont ouvert un large éventail comprenant les Sonates de Parry, Delius, Bantock et Foulds écrites entre 1883 et 1927. L’éventail se referme pour le deuxième sur trois compositeurs que cinq ans seulement séparent et sur trois Sonates en trois mouvements composées entre 1921 et 1923, chacune des trois l’unique de son auteur. John Ireland (1879-1962), Arnold Bax (1883-1953) et York Bowen (1884-1961) étaient des compositeurs très en vue dans l’entre-deux-guerres mais leur style doit encore beaucoup aux styles fin de siècle malgré quelques audaces et la fugitive mise en œuvre de modes plus traditionnels. Rhapsodique dans la fougue percussive comme dans l’épanchement des sentiments plus impressionniste, le flou chromatique de la Sonate en la majeur, opus 64 (1921) de York Bowen ne manque ni de charme ni d’allant. Impressionniste également mais tendue et concentrée, la Sonate en mi bémol majeur (1923) de Bax déploie une palette de couleurs et de climats sans cesse changeants, oscillant pour le principal entre onirisme celte et tourments aux rythmes effrénés. La Sonate en sol mineur (1923) d’Ireland est de haute tenue classique, une composition prenante, sans programme ou à programme intime, qui ne manque ni de ferveur ni d’élan, assez riche en traits et en développements inventifs pour avoir sa place dans le grand répertoire. Paul et Huw Watkins interprètent les trois Sonates avec beaucoup de musicalité, de clarté et de conviction. Leur entente semble absolue. Ils jouent d’un même élan, totalement complémentaires l’un de l’autre et l’on peut penser que la présence vive, l’urgence et la tension que l’on ressent à l’écoute des trois œuvres leur sont en partie attribuables (CHAN 10792). CL




La référence Naïve





A l’heure où les choix discographiques se multiplient – grâce à la dématérialisation, à l’exhumation d’enregistrements dont on ignorait l’existence même et à la multiplication des supports qui permettent tout autant d’entendre que de voir –, celui qui souhaite aujourd’hui découvrir une œuvre dans une version de référence se trouve bien souvent confronté à un choix délicat. Le lancement de «LA Collection Naïve» devrait permettre de l’aider en offrant désormais à tout un chacun la réédition de versions du plus haut niveau d’œuvres emblématique du répertoire, au surplus disponibles dans un habillage à la fois riche et original. Même si l’on peut préférer des couleurs parfois moins brillantes et un rythme moins endiablé donné à certains mouvements, les quatre Concertos Brandebourgeois de Bach (manquent à l’appel les Deuxième et Sixième) donnés ici par le Concerto Italiano dirigé par Rinaldo Alessandrini (qui tient également la partie de clavecin) est assez convaincante et n’a pas pris de ride depuis sa première parution en octobre 2005. La vélocité des musiciens est portée à un niveau difficilement surpassable et certains passages sont véritablement enthousiasmants, notamment le premier mouvement du Troisième (NC 40030). Issues toutes trois de l’intégrale des Symphonies «Londoniennes» enregistrée en concert au Konzerthaus de Vienne en juin 2009, les trois dernières symphonies de Haydn sont tout aussi convaincantes, servies avec ferveur par Marc Minkowski et ses Musiciens du Louvre-Grenoble. La verdeur de certains timbres, la clarté et la finesse de l’interprétation (le premier mouvement de la Cent troisième «Roulement de timbales»!) ainsi que les contrastes en termes de tempi et d’amplitude sonore sortent certains mouvements des sentiers battus et, sans qu’on y retrouve pour autant toujours l’élégance souveraine que savait conférer à ce répertoire un Jochum, renouvellent avec bonheur notre vision de ces superbes partitions (NC 40025). S’agissant de références, doit-on prendre la peine de dire un mot sur Les Quatre Saisons par Fabio Biondi et son Europa Galante qui, à chaque fois qu’ils donnent ce cycle aussi bien au disque (leur premier enregistrement date de 1991) qu’au concert, atteignent des sommets? On demeure confondu par le naturel des intonations, par l’évidence du phrasé et par le souffle qui emporte d’un trait ces partitions trop souvent traitées à la légère (NC 40018). Il en va évidemment de même pour le disque consacré de nouveau par Rinaldo Alessandrini à la musique sacrée de Vivaldi (Gloria et Dixit Dominus), qui rayonne comme rarement (NC 40017). Le Nisi Dominus chanté par Philippe Jaroussky sur un autre disque de musique sacrée du Prêtre roux est également de tout premier ordre même si l’on peut lui préférer, par exemple, la version encore plus poignante d’Andreas Scholl chez Decca (NC 40019). Mozart (Quintette pour clarinette, Trio des quilles), avec un Paul Meyer excellent en tout point (NC 40023), conclut l’aperçu de cette première livraison de seize titres, dont certains vont également au-delà du répertoire baroque et classique (voir ici) et qui devraient être suivis d’autres rééditions. SGa




Retour d’Erato avec les frères Capuçon





Gautier et Renaud Capuçon enregistrent de nouveau un disque ensemble mais cette fois pour Erato qui renaît en changeant la couleur de son logo, du vert au bordeaux. Le Troisième Concerto pour violon, La Muse et le Poète et le Premier Concerto pour violoncelle de Saint-Saëns bénéficient d’une interprétation très au point qui procure un vif plaisir d’écoute grâce à la sonorité somptueuse développée par les deux frères. Ceux-ci font preuve d’une élégance fougueuse et d’un goût très sûr – pas de manières ni d’effets de manche. Lionel Bringuier assure un accompagnement impeccable à la tête d’un Orchestre philharmonique de Radio France réactif et qui compte dans ses rangs des bois fins et expressifs. Si Erato continue à défendre la musique française de la sorte, comme il a su si bien le faire jadis, voilà qui annonce des lendemains qui chantent (50999 934134 2 8). SF




Haydn et Mozart garantis sans matière grasse





Clair, pondéré, svelte, le Haydn de Tatjana Vassiljeva (née en 1977) relève d’un classicisme ordonné et tranquille, bien que le propos avance vivement quand cela s’avère nécessaire, notamment dans les finales. La violoncelliste affine et assouplit les phrasés, cultive une belle sonorité et s’intègre parfaitement parmi les musiciens. Dans les deux Concertos, de même que dans la Vingt-neuvième Symphonie de Mozart, la discipline règne dans les rangs de l’Orchestre royal de chambre de Wallonie. Augustin Dumay propose un K. 201 élaboré dans les détails, parfaitement aéré et caractérisé par des tempi raisonnables et une dynamique impeccable. Dommage que le violoniste et la formation montoise, que Frank Braley dirigera dès l’année prochaine, n’aient pas enregistré davantage de disques durant les dix années de leur collaboration (Mirare MIR 220). SF




Ophélie Gaillard en retrait dans Brahms





Musicienne active sur tous les fronts, Ophélie Gaillard (née en 1974) se produit aussi bien seule ou avec son ensemble Pulcinella pour les œuvres baroques, que comme concertiste ou en formation de chambre dans le répertoire romantique, s’aventurant jusqu’à Britten et Florentz. Ce dernier récital se tourne exclusivement vers Brahms, figure romantique par excellence. Le pianiste Louis Schwizgebel-Wang (né en 1987) et le clarinettiste Fabio di Càsola (né en 1967), tous les deux suisses, s’associent à la violoncelliste pour les deux Sonates pour violoncelle et piano, et le plus rare Trio pour clarinette, violoncelle et piano, inspiré par le talentueux Richard Mühlfeld comme le Quintette et les deux Sonates pour clarinette et piano célébrissimes qui devaient suivre. C’est un beau programme auquel les trois musiciens apportent talent et sérieux mais, pour dominer ou égaler la pléthore de versions disponibles, à celle-ci il manque le souffle originel, la conviction profonde et la fraîcheur d’une création, comme si ces œuvres bien connues n’avaient plus besoin d’ambassadeur. Certes, l’interprétation est correcte, le sombre velours du violoncelle d’Ophélie Gaillard reste appréciable, le toucher délicat du jeune pianiste se dissout en quelques emportements fougueux, sa partie de l’Allegro de l’Opus 38 d’une belle et ferme clarté. Le dialogue s’installe, certains passages captent la fervente intensité qui sous-tend la musique de Brahms mais l’ensemble, assez distancié, voire lisse, reste en deçà de l’ampleur, l’intériorité et l’élan vital qui innervent ses partitions, malgré le timbre mélancolique de la clarinette de Fabio di Cásola, créant le climat nostalgique aux noirs élans qui sied au Trio, les trois instruments ici bien en phase (Aparté AP053). CL




Deux femmes pour le Requiem allemand





Une nouveauté et une réédition mettent en scène une bataille de femmes autour du Requiem allemand de Brahms. Marin Alsop, avec le Chœur et l’Orchestre de la MDR (Leipzig), bien ternes, surprend par un manque apparent de conviction: l’œuvre est certes apaisée, voire résignée, mais pas au point de sembler aussi apathique et éteinte, dépourvue de direction. Du côté des solistes, la toute jeune Anna Lucia Richter (née en 1990) l’emporte, malgré des aigus encore assez verts, sur le vibrato et le manque de souffle de Stephan Genz (né en 1973), autre déception inattendue de cet album (Naxos 8.572996). Parmi les seize titres qui ressortent à prix économique dans «LA Collection Naïve» (voir par ailleurs ici), l’éditeur a notamment retenu l’enregistrement réalisé en juin et juillet 2003 par Laurence Equilbey et son chœur de chambre accentus. Les tempi sont très voisins, mais l’interprétation, bénéficiant des légendaires sonorités fondues d’accentus, sait ici faire la différence entre atonie et sérénité, tout en dispensant davantage d’ampleur, bien qu’il s’agisse ici de la version dite «de Londres», réalisée par le compositeur lui-même et réduisant l’orchestre à deux pianos (Boris Berezovsky et Brigitte Engerer). En soliste, Sandrine Piau comme Stéphane Degout sont stylistiquement exemplaires (NC 40028). SC




Le Reine Elisabeth: une deuxième rétrospective





Selon le même principe que pour le violon, Muso a puisé dans les archives du concours Reine Elisabeth pour composer cette rétrospective consacrée cette fois au piano – y en aura-t-il une pour le chant, discipline apparue certes tardivement dans l’histoire du concours? Voici une excellente manière de retrouver quelques lauréats particulièrement marquants lors de leur prestation en finale et lors du concert des lauréats du 14 juin 2010 pour Denis Kozhukhin – regrettons l’absence d’Abdel-Rahman El-Bacha (1978), de Markus Groh (1995) et de Vitaly Samoshko (1999). Bonne idée en revanche d’attirer l’attention sur Cécile Ousset, classée quatrième en 1956: son Second Concerto de Chopin sensible et de grande classe méritait effectivement de sortir de l’oubli. Malgré un son précaire, le Premier de Brahms par Leon Fleisher (1952) devait évidemment figurer dans cette anthologie mais d’autres prestations passionnent davantage comme le Premier de Liszt aux tempi insensés de Vladimir Ashkenazy (1956), le Premier de Tchaïkovski puissant, racé et personnel de Valery Afanassiev (1972), le Troisième de Rachmaninov épique et grandiose d’Andrei Nikolsky (1987) et le Deuxième de Prokofiev d’Anna Vinnitskaya (2007), plus palpitant que son enregistrement en studio. Néanmoins, la plus grosse claque, c’est Pierre-Alain Volondat qui la donne, en 1983, avec un Second de Liszt absolument génial, d’une beauté sidérante et d’un souffle phénoménal. Le Premier de Prokofiev par Malcolm Frager (1960), le Premier de Chopin par Jeffrey Swann (1972), le Deuxième de Rachmaninov par Andrew Manz (1983) et le Quatrième de Beethoven par Frank Braley (1991) présentent par contre un intérêt moindre. Les inconditionnels du Reine Elisabeth et les amoureux du piano accorderont à cette publication toute l’attention qu’elle mérite (MU-005). SF




Archives beethovéniennes (1): Géza Anda





Les éditeurs entretiennent opportunément la mémoire de Géza Anda (1921-1976), plus particulièrement dans le répertoire concertant: voici quelques mois, ICA Classics publiait deux concertos de Brahms et Tchaïkovski réalisés à Cologne et c’est maintenant Hänssler Classic qui a puisé dans les archives de la SWR, comme à son habitude, deux témoignages beethovéniens datant quasiment de la même époque. Du Premier Concerto, audite a édité en 2008 une version plus tardive, captée à Cologne. Ici, en février 1960 à Stuttgart, Anda dirige du clavier la Camerata academica de Salzbourg, comme dans sa légendaire intégrale Mozart, et c’est précisément un tour mozartien qu’il donne à l’œuvre: pimpante, encore marquée par le classicisme, l’interprétation est suffisamment naturelle et stimulante pour faire oublier une prestation orchestrale parfois imprécise. Un peu moins convaincant, le Cinquième Concerto, enregistré en avril 1956, pâtit en outre d’une prise de son assez lointaine. Le soliste, en compagnie de l’Orchestre du Südwestfunk de Baden-Baden et de son directeur musical, Hans Rosbaud, tend à y cultiver le même registre stylistique, ce qui étonne sans doute moins dans l’Adagio un poco mosso central que dans les mouvements extrêmes, qui ne bénéficient généralement pas d’un piano aussi fin et chantant (CD 94.223). SC




Archives beethovéniennes (2): le Quatuor Amadeus





audite s’emploie à rééditer les enregistrements réalisés par le Quatuor Amadeus entre 1950 et 1969 pour la RIAS (Radio du secteur américain de Berlin-Ouest). Six volumes sont annoncés, chacun consacrés à un compositeur: avant Schubert, voici une quasi-intégrale Beethoven – le Dixième Quatuor manque mais la Grande Fugue et un réjouissant Quintette à cordes (avec l’inséparable Cecil Aronowitz) sont en revanche inclus. La crainte que cette parution, même si elle est la première à utiliser les bandes originales, ne constitue qu’une version dégradée de l’édition officielle chez Deutsche Grammophon, gravée entre 1959 et 1963, s’estompe rapidement. Car ici, on se situe loin, voire aux antipodes des caractéristiques que l’on prête d’ordinaire à la formation austro-britannique constituée en 1947 à Londres: foin de l’amabilité poussée jusqu’à la prudence ou au narcissisme, mais, au prix sans doute d’une moindre perfection instrumentale et d’une prise de son moins flatteuse, un engagement inlassable, une urgence, une intensité, une vigueur, parfois même une rage inattendues. Le fait que ces témoignages s’étalent sur une longue période (1950-1967) ou que chaque mouvement ait été capté en une seule prise, pour se rapprocher des conditions du concert, ne suffit pas à expliquer que les Amadeus soient aussi méconnaissables, à l’exception de deux constantes: un Opus 18 plus convaincant que les derniers opus et, surtout, en arrière-plan de ces embardées interprétatives et techniques auxquelles ils n’avaient pas habitué leurs admirateurs, une suprême maîtrise stylistique (coffret de sept disques 21.424). SC




Le Parsifal hors norme de la Monnaie





Pour une fois qu’un spectacle de la Monnaie est enregistré en DVD, ne passez pas à côté de celui-ci. Le Parsifal de 2011 est une des productions les plus originales et impressionnantes du mandat de Peter de Caluwe, au même titre que celle des Huguenots (2011) et de Lulu (2012) qui devraient absolument exister sur ce support – sera-ce le cas un jour? Vivement recommandé, moins pour la prestation musicale que pour le concept et la scénographie de Romeo Castellucci, impliquant de nombreux figurants bénévoles qui n’oublieront pas cette expérience de sitôt (Bel Air 097). SF




Feldman: du temps et de la patience





Si vous en avez le temps et de la patience, tentez l’expérience de Violon et orchestre (1979) de Morton Feldman (1926-1987), sorte de concerto de cinquante minutes d’un seul tenant. Le propos, très contenu, évolue dans un spectre dynamique étroit, le plus souvent dans les nuances piano, et ne varie que très légèrement. Les dix premières minutes suffisent pour se forger une première opinion sur cette composition, le reste étant de même nature. L’ouvrage bénéficie d’une interprète de choix, versée dans la musique contemporaine, en l’occurrence Carolin Widmann (née en 1976), remarquablement soutenue par l’Orchestre symphonique de la Radio de Francfort dirigé par Emilio Pomàrico (ECM New Series 476 4929). SF




Les musiques de Baudelaire, Baudelaire mis en musique





Après des livres-disques consacrés respectivement à Proust et à Zweig, Decca en publie un troisième, «Charles Baudelaire, le musicien». Le choix s’imposait, pour un auteur dont les poèmes sont parsemés de célèbres références à ses expériences de mélomane («la musique souvent me prend comme une mer», «des fanfares étranges passent, comme un soupir étouffé de Weber») et dont le travail d’écrivain aussi bien que de critique a été marqué par de non moins célèbres hommages à Liszt et à Wagner. Une longue introduction de Stéphane Barsacq (en français et en anglais) et une sélection iconographique de qualité (manuscrits, premières éditions, portraits) le rappellent, à l’appui de trois disques puisant dans le riche catalogue d’Universal et évoquant successivement le passionné des compositeurs de son siècle (de Beethoven à Wagner), avec des textes opportunément choisis mais lus par Irène Jacob sur un ton uniment exalté, puis le poète mis en musique par Berg, Caplet, Chabrier, Debussy, Duparc ou Dutilleux, mais aussi chanté par Montand, Gainsbourg, Catherine Sauvage, Juliette et, surtout, Ferré (livre et trois disques 480 8461). SC




Paul Badura-Skoda se porte comme un charme





Paul Badura-Skoda continue à enregistrer des concertos de Mozart pour TransArt (voir précédemment ici). Idéalement proportionnée, son interprétation lumineuse et élégante des Quinzième et Vingtième révèle une excellente santé digitale, malgré quelques accrocs furtifs et mineurs. Une légère raideur se perçoit de temps en temps, notamment dans l’Allegro du K. 466, mais, dans l’ensemble, le jeu est naturel, finement articulé et enlevé dans les finales – inutile de chercher à y déceler le moindre mauvais goût. Le pianiste dirige lui-même un Orchestre de chambre de Prague quelconque. Précision utile: ce mozartien émérite avait quatre-vingt-cinq ans au moment de l’enregistrement (TR175). SF




Un Macbeth pour collectionneurs et nostalgiques





Glyndebourne, 1972: l’image a vieilli, le son aussi et la scénographie est un bel exemple de ce qui ne peut plus raisonnablement se faire aujourd’hui. Dans ce Macbeth de Verdi, la mise en scène de Michael Hadjimischev tient la route, sans plus, le décor n’a presque rien pour lui et les costumes, encombrants et inélégants, prêtent à sourire. Néanmoins, Kostas Paskalis, baryton mal servi par le disque, vaut le détour dans le rôle-titre malgré une expression faciale figée – timbre sombre, ligne fort bien tenue, souffle ample – de même que l’impressionnante Lady Macbeth de Josephine Barstow, qui surjoue un peu trop mais dont la voix convient suffisamment bien au rôle. A noter également le Banquo remarquable d’autorité d’un James Morris âgé à l’époque de vingt-cinq ans – le fils paraît avoir le même âge... – et le Macduff fort honorable de Keith Erwen, disparu prématurément en 1984 à l’âge de quarante-deux ans. Ce DVD pour collectionneurs et nostalgiques rappelle aussi quel formidable chef de fosse fut John Pritchard (Arthaus 102 316). SF


La rédaction de ConcertoNet

 

 

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