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Joyeux Anniversaire M. Domingo 01/24/2011
S.M. la Reine Sophie d’Espagne & M. Plácido Domingo
(Courtesy of Teatro Real)
Ludi Placidi
La grande semaine de Plácido Domingo a en fait duré presque quinze jours. Madrid a célébré les 70 ans de ce madrilène qui est un musicien intégral : ténor qui est devenu un baryton à voix claire, lyrique ; chef d’orchestre, pianiste, manager…
Jeudi 13 : Première d’Iphigénie en Tauride, avec Susan Graham, Plácido et Paul Groves.
Vendredi 14 : l’association AIE (artistes interprètes) offrait un hommage à Plácido loin du centre ville, une fête à l’opposé de celle du vendredi suivant, entre 20 heures du soir… et presque 3 heures du matin.
Vendredi 21: 70 anniversaire de Plácido ; au Teatro Real, l’hommage géré par Mortier, des camarades de scène, des aficionados et aussi ces gens snobs qui réussissent toujours à se faufiler dans les Vanity Fairs. Quelqu’un qui disait : « Certainement, Plácido préfère l’hommage de ses camarades de profession de la musique légère de l’AIE ». Peut-être. Je ne suis pas sûr, mais les vendredi-samedi 14-15 Plácido était à son aise. Il fallait le voir à deux heures et demie du matin, content, frais, heureux. Tout le monde veut lui donner des prix, des hommages. Lorsque l'on divinise quelqu’un, tout le monde veut être près de lui, au cas où il nous transmettrait un peu de sa sainteté, comme une contagion bénéfique. Ce qu’on appelait « miracle » au temps jadis. Humain, trop humain. Il faut comprendre.
Mais la fête du 21 allait au-delà de la "foire aux vanités", parce qu’il y avait plus de mille personnes en dehors du théâtre, qui regardaient le concert, la fête, juste pour chanter pour Plácido « Cumpleaños feliz » (Bon anniversaire), malgré un froid de zéro degrés. Malgré la température, il était là, sur le balcon du Teatro Real, face à la très belle Place d’Oriente, face au Palais Royal. Il a chanté le "chotis" Madrid, Madrid, du compositeur mexicain Agustín Lara, montrant ainsi son double amour pour ses deux patries, l'Espagne et le Mexique.
Et la reine d’Espagne était là : Montesquieu savait bien que les marques d’honneur sont importantes dans un système, et Plácido a reçu l’honneur le plus distingué de cette monarchie plus républicaine que la plupart des républiques. Sans plaisanter, on aurait dit l’union des classes autour de Plácido! En plus, il faut se souvenir de la signification de cette Place. Dans le passé, c’était la place des manifestations « spontanées » autour de Franco. Le Teatro Real, avec son grand écran, a modifié depuis des années ce sens-là, avec ses opéras, avec des hommages comme celui-ci, ou un autre il y a deux ans décerné à Juan Diego Flórez. La revue Scherzo a aussi fêté l’anniversaire de Domingo avec une interview signée d’un spécialiste, Rubén Amón. Le « sérieux » et le « populaire » s’unissent aussi. De toute façon, Madrid n’a pas attendu la grande renommée de Plácido pour lui témoigner son affection. Depuis longtemps, le Teatro de la Zarzuela, avant la réouverture du Teatro Real comme colisée d’opéra, a été la scène de grands triomphes du ténor universel.
Pour ma part, j’avoue avoir un vieux projet discuté plusieurs fois avec la revue Scherzo, et peut-être un jour… Il s’agirait d’une interview avec Plácido Domingo autour des grands personnages qu'il a interprétés. Il a joué et chanté plus de 130 rôles, mais on voudrait se limiter à quatre, voire cinq : Otello, Hoffmann, Don José, Don Carlos, peut-être Cavaradossi. Trop peu ? Peut-être pas, s’il s’agit d’entendre notre musicien parler des lignes, de la construction des personnages, de la façon dont il a luté contre le défi d’un rôle comme Otello, qu’on lui avait pourtant conseillé d’éviter, et justement ce fut une de ses plus grandes réussites. Mais les jours de fête ne sont pas le moment le plus approprié pour des entretiens aussi « sérieux ».
Santiago Martín Bermúdez
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