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12/23/2012
Benjamin Britten : The Turn of the Screw, opus 54

Miah Persson (The Governess), Toby Spence (Prologue, Peter Quint), Susan Bickley (Mrs Grose), Giselle Allen (Miss Jessel), Joanna Songi (Flora), Thomas Parfitt (Miles), London Philharmonic Orchestra, Jakub Hrůsa (direction), Jonathan Kent (mise en scène), François Roussillon (réalisation)
Enregistré en public à Glyndebourne (août 2011) – 111’ + 22’ de bonus (entretiens avec le metteur en scène, le chef et les chanteurs)
Fra Musica 007 (distribué par Harmonia mundi) – Format 16:9 – Region code: 0 – Son: 2.0 PCM, 5.1 DTS Surround – Notice de présentation en français, anglais, allemand, italien et espagnol





Sélectionné par la rédaction


Attention: chef-d’œuvre. Cette mise en scène du Tour d’écrou (1954) de Benjamin Britten – conçue en 2007 par Jonathan Kent pour le festival de Glyndebourne (et filmée ici lors d’une reprise en 2011) – nous parvient dans une édition DVD absolument exemplaire (réalisation brillante, présentation impeccable, bonus intelligents).


Il faut dire que cette production marquera son époque tant le metteur en scène anglais a su magnifier l’opéra de Britten. Disant vouloir «mettre l’accent sur les transformations psychologiques et les éléments cachés du récit», Kent unifie le drame autour d’un décor tournant (symbole du «tour d’écrou») qui se transforme par l’ingéniosité d’un panneau en verre – tour à tour écran vidéo, vitrail d’église, baie vitrée, cloison ou lac («peau délicate entre le monde sûr et confortable de Bly et une Nature terrifiante et indomptable [...] mince protection séparant les deux forces qui se disputent le contrôle de l’esprit de Miles»).


La concentration de la mise en scène frappe d’emblée par l’intelligence des enchaînements et la puissance de la scénographie, culminant dans la fameuse huitième scène qui conclut le premier acte (voir un extrait vidéo). A travers la force et l’ambigüité des réminiscences musicales, Jonathan Kent construit un huis clos d’où s’élèvent des voix intérieures (qui inclinent à la noirceur et au mal) plutôt que des dialogues entre des personnages dont l’appartenance au réel ou au fantasmé, au souvenir ou au devenir, est mise sur le même plan. Une vision à la fois intemporelle, ancrée dans une époque (Kent transpose l’histoire dans les années 1950) et étonnement actuelle – à l’image de l’esthétique glacée et désolée du second acte, si proche de l’univers suicidaire, vampirique et surnaturel dont les œuvres audiovisuelles d’aujourd’hui sont friandes (Quint en spectre? Grose en médium? Miss Jessel en mort-vivant sorti des eaux stagnantes du lac?).


La distribution est de premier ordre – exceptionnelle même s’agissant des rôles masculins. Vocalement et plus encore scéniquement, elle ne souffre d’aucune faiblesse majeure et surprend par son homogénéité. Ainsi, la Mrs Grose de Susan Bickley – une révélation – marquerait presque davantage que la Gouvernante de Miah Persson, moins ambiguë que professionnelle. Toby Spence (d’une rigueur obsessionnelle) et le jeune Thomas Parfitt (d’une maturité glaçante) livrent, quant à eux, une prestation d’anthologie – développant un mimétisme perturbant en Quint et Miles… Janus dont le passé, le présent et l’avenir se confondent. Superposition des temporalités. Miroir troublant de la reproduction du vice, de l’ambivalence de la culpabilité, du refus de l’innocence.


Notre seule réserve – somme toute relative puisqu’elle ne perturbe en rien l’impact émotionnel de la production ¬– réside dans la fosse, où une formation non chambriste (le Philharmonique de Londres) ne parvient pas à exposer toute l’intimité affective du livret de Myfanwy Piper. La baguette de Jakub Hrůsa choisit la rigueur, la mesure et l’introspection... au détriment de l’opulence, de la virtuosité et de l’émotion qu’avait su apporter Daniel Harding à Aix (dans la production désormais historique – malgré une distribution plus inégale – de Luc Bondy, disponible en DVD chez BelAir Classiques). La sonorité est carrée, compacte – sans se faire étouffante pour autant. Un orchestre plus alerte et une baguette plus engagée auraient fait de ce DVD un «must» indiscutable. Les amoureux de l’œuvre ne sauraient pourtant s’en priver.


Gilles d’Heyres

 

 

 

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